Le temps d'écran des adolescents a augmenté de 70% depuis le début du premier confinement.

Les enfants, ces mini clients chouchoutés par les banques

La jeune génération de moins de 18 ans se voit proposer une série de services gratuits dans les établissements financiers. Qui espèrent bien en faire de futurs clients fidèles.

Trois euros pour un snack, une quinzaine de plus pour un ticket de cinéma ou un cadeau d’anniversaire… Les motifs invoqués par les enfants pour solliciter financièrement leurs parents ne manquent pas. Et voilà que la solution d’ouvrir un compte à vue avec une carte de paiement est envisagée. Le début de l’année scolaire serait d’ailleurs une période particulièrement agitée dans les banques. « Nous avons constaté une augmentation de 57% des premières demandes de carte par rapport aux mois de mai et juin. Chez les enfants de 11 ans, elle atteint même 103% », observe-t-on chez Argenta. Pour les établissements bancaires, c’est évidemment une opportunité à saisir. « Ce sont des futurs clients adultes, il est donc important de bien cerner leurs besoins et leurs désirs », reconnaît Felbelfin, la fédération du secteur. Et même si les jeunes ados ne sont pas très dépensiers, qu’ils n’ont pas d’épargne faramineuse, c’est déjà l’occasion de les fidéliser et leur faire une place. « Nos clients entre 12 et 17 ans représentent un peu plus de 4% de notre portefeuille clients », confie Fabien Tyteca, porte-parole chezCBC.

Partout, ils sont donc choyés et ont accès à des offres adaptées, parfois accompagnées de petits cadeaux de bienvenue (un casque tendance, une enceinte bluetooth, une carte bancaire personnalisable, …) Chez nous, ce segment reste pour l’instant aux mains des banques traditionnelles, contrairement à d’autres pays européens où des start-ups se sont spécialisées dans cette jeune génération.

La carte dès 7 ans

A partir de quand les mineurs peuvent-ils détenir un compte à vue ? D’un point de vue juridique, la loi ne prévoit rien de particulier à ce sujet, ni pour les cartes de paiement, ni pour l’accès aux applications (contrairement aux comptes d’épargne). C’est donc d’abord un choix des parents. « Chez nous, l’ouverture d’un compte de paiement s’effectue souvent vers l’âge de 11 ou 12 ans et est suivie par la demande d’une carte de débit. Ça correspond à l’entrée dans le secondaire. Les ados ont alors de nouvelles responsabilités, qu’il s’agisse de prendre seul les transports en commun pour se rendre à l’école ou d’acheter leur snack pendant la pause de midi ou après l’école », commente David Volland, chef de produit chez Argenta.

Sur le marché, chaque établissement bancaire a sa propre politique. Et les variations peuvent être importantes. Ainsi, chez BNP Paribas Fortis, l’enfant peut avoir un compte courant via le Welcome Pack dès sa naissance et une carte de débit à partir de 6 ans et 10 mois. Chez ING, l’âge minimum pour l’ouverture du compte et la possession d’une carte bancaire a été fixé à 10 ans. Même limite chez CBC, mais elle inclut aussi l’accès à l’application K’Ching, spécialement conçue pour les jeunes. Chez ING et BNP Paribas Fortis, le mineur devra attendre ses 12 ans pour télécharger, utiliser l’app et même payer via celle-ci. Le compte courant Jump de Beobank, la carte et l’app’ sont accessibles dès 12 ans, tout comme les mêmes produits chez Belfius ou la néobanque Nickel. Seul point commun à tout le monde : l’ouverture du compte est soumise à une autorisation parentale. Parfois, il faut même faire le déplacement jusqu’à une agence pour y souscrire.

« Chez nous, pour la détention d’une carte de débit, les parents doivent signer un porte-fort », précise-t-on chez ING. Et les parents, qui sont les responsables légaux du compte, ont toujours accès aussi à ce qui s’y passe, via gsm ou ordinateur. Ils peuvent bloquer certaines fonctions si nécessaire. 

Plafonds limités

Pour les plafonds qui encadrent les retraits ou les paiements (en ligne ou chez le commerçant), les parents gardent aussi la main. Ils peuvent toujours adapter ce que la banque prévoit. D’ailleurs, en général, celles-ci imposent déjà des limites plus basses que celles des comptes classiques pour adulte. Chez CBC par exemple, la limite journalière de retrait est fixée à 120 euros pour les mineurs (contre 650 pour les adultes), par semaine, c’est 900 euros maximum (2.500 pour les adultes). C’est plus strict pour les jeunes clients BNP, avec une limite de retrait de 150 euros par jour et 250 euros par semaine. « Le niveau de ‘protection contre les excès’ varie très largement d’une banque à l’autre. Certaines ne fixent même pas de limites différentes pour les jeunes, à moins que vous ne le demandiez explicitement », prévient toutefois Test-Achats. Attention, on parle ici toujours d’opérations via une carte de débit, les mineurs ne sont pas autorisés à avoir une carte de crédit. Ils ne peuvent pas non plus aller dans le rouge.

Services gratuits

Côté prix, les comptes proposés aux jeunes sont quasi systématiquement gratuits. Pas de frais pour la détention du compte ne tant que tel, pour la carte de paiement, ni même pour les retraits au distributeur. Une gratuité qui, dans certaines banques, est prolongée au-delà des 18 ans. Ainsi, le Welcome Pack de BNPPF, converti en un compte Hello 4 You à partir de 18 ans, reste gratuit jusqu’à 27 ans inclus. Chez Belfius, Crelan, Axa Bank ou CBC, cela reste gratuit jusqu’à 25 ans.

Attention, ça n’est pas toujours le cas. Gare donc aux conversions automatiques qui embarquent vers un compte régulier payant, avec tous les frais qui l’accompagnent. Chez ING par exemple, lorsqu’un jeune atteint 18 ans, son compte à vue est transformé en ING Do Basic (payant). Il faut également être prudent par rapport à certains frais, parfois élevés, qui ne sont pas compris dans le pack « jeune ». Cela peut être le cas des retraits d’argent dans les distributeurs des autres banques, les retraits avec la carte prepaid, les virements en urgence, etc.

Epargne : un encadrement plus strict

Dès le plus jeune âge de l’enfant (parfois même avant sa naissance), les parents – ou même les grands-parents – ont à cœur de constituer un petit bas de laine que le petit pourra utiliser plus tard, lorsqu’il aura des besoins financiers plus conséquents. L’option la plus courante est alors d’ouvrir un compte d’épargne au nom de l’enfant, qui aura accès à l’entièreté du capital à ses 18 ans. Le parent peut y verser de l’argent régulièrement ou lors d’occasions spéciales. Dans les banques, des comptes d’épargne « enfant » sont très souvent proposés et présentés sur une page illustrée de photos de bébé ou de dessins enfantins.  Mais il ne faut pas s’y tromper, il s’agit bien souvent d’un produit d’épargne classique, le même que proposé aux adultes. Pas de rendement différent donc, à quelques exceptions près (chez CPH ou Europabank par exemple). Et puis, si l’enfant ne peut souvent pas y toucher, certaines possibilités sont ajoutées au fur et à mesure qu’il grandit. Ainsi, chez BNP Paribas Fortis, l’enfant pourra effectuer des retraits supérieurs à 125 euros avant 16 ans, avec l’accord de ses parents. Chez Argenta, il pourra consulter son compte d’épargne dès ses 11 ans via l’app de la banque, sans pour autant pouvoir effectuer des opérations.

Capital bloqué jusqu’à 18 ans

Pour les parents par contre, il sera beaucoup plus compliqué d’y toucher. Car l’épargne des mineurs est réglementée. Pas question par exemple de se faire un petit virement. Même en cas de petit coup de mou financier qu’on rembourse par la suite. « Les parents peuvent retirer de l’argent, mais uniquement s’ils l’utilisent dans l’intérêt de leur enfant. Pour lui acheter quelque chose, payer ses études », explique-t-on chez Wikifin, la plateforme d’éducation financière de la FSMA (le gendarme des services financiers). Mais pour cela, il faut théoriquement l’avis du juge de paix. Et en cas de doute, la banque peut s’opposer au retrait. D’autre part, à 18 ans, l’adolescent peut exiger le remboursement de l’argent que ses parents auraient utilisé pour eux-mêmes. En France, dans de très rares procès, le juge a donné raison aux enfants. Une des solutions pour éviter ces situations embarrassantes est d’ouvrir le compte au nom des parents. Ils en gardent alors la maîtrise et choisissent quand le bambin touchera l’argent, à 18 ans ou plus tard.

Il faut savoir qu’en cas de décès des parents, le contenu du compte tombe dans la succession générale et pas forcément entre les mains de l’enfant concerné. Il est, de plus, soumis aux droits de succession. Il existe enfin des produits d’investissement pour les enfants. C’est plus risqué, mais plus rémunérateur qu’un compte d’épargne. Si le produit bancaire (ou d’assurance) est au nom de l’enfant, il ne doit pas contenir d’actifs risqués. Chez BNP Paribas Fortis par exemple, les comptes-titres pour mineurs n’incluent jamais de trackers, d’EFT ou même d’actions. Et là aussi, si le parent veut toucher au produit, il doit obtenir l’autorisation du juge de paix. 

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