Réinvestir l’argent du bon d’Etat: l’exemple à succès du «bon communal» d’Etterbeek
Inspiré du modèle «bon d’Etat», le «bon communal» émis par Etterbeek, inédit en Belgique, a séduit en quelques heures les épargnants.
C’est ce qui s’appelle un «vrai coup de bol», selon Vincent De Wolf (MR), bourgmestre d’Etterbeek. Alors que 22 milliards d’euros issus du bon d’Etat Van Peteghem reviennent sur les comptes des souscripteurs et alors que les banques et l’Etat se disputent cette nouvelle épargne disponible, Etterbeek lance son «bon communal». Une première, en Belgique. Et un succès inouï. En à peine quelques heures, la campagne de levée a atteint sa limite maximale d’investissement, c’est-à-dire près de 1,2 million d’euros. La souscription est donc arrêtée, alors qu’elle était initialement prévue jusqu’au 18 octobre.
Le principe est identique à celui d’un bon d’Etat: on investit un capital qu’on récupère avec des intérêts à l’échéance du bon. La mise minimale s’élève à 1.000 euros. Ce bon est émis pour 18 mois et rapportera 4,5% brut annuel pour ses habitants (soit, 3,15% net) et 4% pour les non-résidents (soit 2,8% net). Les intérêts sont versés tous les six mois. Soit un taux légèrement supérieur à la plupart des banques. Soit aussi une sérieuse concurrence? «Dans un contexte de baisse des taux, le rapport entre le rendement et le risque était très attractif, souligne Charles-Albert de Radzitzky, cofondateur et CEO de Spreds, la plateforme spécialisée en financement participatif par laquelle la commune est passée. La durée, surtout, a séduit: 18 mois restent rares. L’investisseur bénéficie de six mois supplémentaires à un taux garanti.» Bref, un produit remboursé en 18 mois, en trois fois, ça n’existe pas sur le marché bancaire.
Investir dans une municipalité se révèle aussi peu risqué, puisqu’il existe plusieurs garde-fous. En effet, les communes bruxelloises ne peuvent déposer de budget en déficit. Etterbeek (sous tutelle régionale) dispose d’un pouvoir fiscal, comme toutes les entités locales. Enfin, elle possède des réserves. «Le risque de non-remboursement est considéré comme faible, même si aucun investissement n’est totalement dénué de risques», poursuit Charles-Albert de Radzitzky.
Le profil est sans aucun doute l’épargnant qui a réinvesti son épargne récupérée du premier bon d’Etat.
Au-delà d’un taux d’intérêt attractif, c’est ce faible niveau de risque qui a assurément attiré. «Le profil est sans aucun doute l’épargnant qui a réinvesti son épargne récupérée du premier bon d’Etat, émis en septembre 2023, et qui a moins d’appétit pour le risque», résume le CEO de Spreds. Les Etterbeekois ont davantage contribué, à hauteur de 85%. La mise moyenne se chiffre à 14.000 euros. Un montant relativement élevé. En comparaison, dans le secteur des start-up, la mise moyenne est de 2.000 euros.
La formule sert à financer la durabilité de la commune, par des projets verts et vertueux qui concernent les citoyens. Elle s’inscrit dans le cadre du plan carbone d’Etterbeek dont l’ambition est de diminuer de 40% l’émission des gaz à effet de serre. Le produit financera ainsi une crèche (56 lits) passive ou basse consommation, avec pompe à chaleur, récupération des eaux pluviales, toiture verte et accueillera, en partie, des parents à faibles revenus. Son coût: 4,6 millions d’euros. Le prêt participatif sert à compléter son financement pour 1,2 million d’euros. «Permettre aux citoyens d’être acteur, et non simple spectateur est un vecteur essentiel de changement de mentalité et d’ancrage local, avance Vincent De Wolf. Chaque participant pourra dire qu’il aura contribué à créer cette crèche; cela produira un sentiment de fierté et d’appropriation.»
De quoi inspirer d’autres communes? Le maïeur y croit et veut déjà renouveler l’opération, à plus grande échelle. «Je suis sûr que dès la semaine prochaine, mes confrères me questionneront pour savoir comment nous avons procédé», assure Vincent De Wolf. A noter, enfin: dans l’accord de gouvernement wallon MR-Engagés, on peut lire que l’exécutif «étudiera les possibilités pour mobiliser l’épargne citoyenne (par exemple un crédit d’impôt pour investissement ou un bon d’Etat wallon) afin de financer des projets de transition climatique et énergétique».
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