Ces produits oubliés (3/6): le petit épeautre, céréale de l’antiquité
Pas tout jeune, l’engrain est mieux connu sous le nom de «petit épeautre». Cette céréale n’a pourtant rien en commun avec l’épeautre classique.
C’est son faible rendement qui lui a valu son déclassement. Alors qu’on cultivait déjà le petit épeautre il y a douze mille ans dans la région du Croissant fertile – même la Bible le mentionne –, le blé l’a largement supplanté au fil du temps. Mais le vent tourne. On retrouve aujourd’hui du petit épeautre sur les marchés et dans les boutiques bio, en farine ou en grains. Sa plus faible teneur en gluten en fait un ingrédient recherché par tous ceux qui éprouvent du mal à le digérer. «Ce n’est pas seulement qu’il en contient moins – 7% contre 12% dans les variétés de blé –, précise Isabelle Coupienne, à la tête de l’entreprise Land, Farm & Men et de la marque Graines de Curieux. Sa qualité le rend aussi plus facile à absorber par le système digestif.» Des médecins et nutritionnistes recommandent d’ailleurs cet aliment qui n’a pratiquement pas été modifié génétiquement depuis l’origine. Petit bémol: en contenant moins de gluten, la farine de petit épeautre a tendance à moins lever, par exemple dans les pains, que de la farine de blé.
Le climat, plus chaud aujourd’hui en Belgique, rend également plus aisée la culture de cet aliment venu du bassin méditerranéen. Son cycle de croissance n’en reste pas moins le plus long parmi les céréales: onze mois en terre! On en cultive en Italie et dans les Alpes-de-Haute-Provence. Il a besoin d’un sol sec pour croître. L’autre élément qui joue en sa faveur est évidemment la demande des consommateurs, aujourd’hui plus attentifs à la qualité nutritive de leur alimentation. «On l’appelle épeautre, mais il n’en est pas, fait remarquer Isabelle Coupienne. Il s’agit d’engrain, qui donne au pain une texture plutôt moelleuse et une couleur un peu plus jaune.»
Chez Land, Farm & Men, 45 hectares de petit épeautre sont plantés afin de répondre à la demande croissante. Cette céréale n’ en reste pas moins un produit de niche, qui se vend autour de sept euros le kilo en magasin. «La culture du petit épeautre est en plein développement en Wallonie et le nombre d’hectares cultivés progresse chaque année, embraie Ariane Beaudelot, coordinatrice du pôle développement de filières chez Biowallonie. L’an dernier, entre deux cents et trois cents hectares en étaient emblavés.»
Riche en magnésium, en calcium, en lipides et en protéines, le petit épeautre l’est aussi en glucides, en oligoéléments (comme le zinc et le fer) et en fibres alimentaires. Autant d’atouts qu’il conserve évidemment même après le décorticage du grain, qui lui fait tout de même perdre 40% de son poids.
Du pain, du gratin et des bières
Le petit épeautre, également appelé «engrain», porte en latin le nom de triticum monoccucum. On peut se procurer cette céréale sous forme de grains, de farine (complète, semi-complète ou blanche) ou en flocons. En farine, elle peut être incorporée dans des pains, des pâtisseries ou utilisée pour la confection de pâtes. Le petit épeautre peut se cuisiner comme du riz, en salade, sucré, salé, en risotto, en taboulé ou en gratin. Il est conseillé d’en rincer les grains avant de les cuire. Certains les font même tremper dans de l’eau pendant quelques heures avant la cuisson. Enfin, les amateurs goûteront avec curiosité les bières de petit épeautre.
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