Anne-Sophie Bailly

Bon d’Etat | Pourquoi revoir l’exonération des comptes d’épargne serait une bonne nouvelle

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

L’arrivée à terme du bon d’Etat va faire resurgir le débat sur l’immobilisme de l’épargne. L’exonération des intérêts sur les comptes d’épargne est sur la table de la coalition Arizona. Et c’est une bonne nouvelle.

Après avoir régné des années sans partage sur l’épargne des Belges, les banques ont vu leur forteresse ébranlée il y a un an par une attaque en règle du ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V). Sa botte secrète, un bon d’Etat aux conditions avantageuses, lui avait permis d’emporter une manche dans sa croisade contre la faiblesse de la rémunération de l’épargne.

Un an plus tard, la deuxième joute commence. L’enjeu: 22 milliards d’euros disponibles pour de nouveaux placements. Alors banquiers et assureurs fourbissent leurs armes pour regagner un maximum du terrain perdu. Bon de caisse, branche 21, compte à terme, prime de fidélité… c’est à celui qui se montrera le plus persuasif ou inventif pour regarnir son bilan. Mais malgré ces alternatives et l’émission d’un nouveau bon d’Etat, un pourcentage non négligeable de cet argent regagnera probablement les comptes de dépôt. Et relancera une nouvelle fois le débat sur l’immobilisme de l’épargne en Belgique.

C’est d’ailleurs pour lutter contre cette inertie que la «supernota» de Bart De Wever proposait de remettre en cause l’exonération de 1.020 euros dont bénéficient actuellement les intérêts sur les livrets d’épargne. L’idée de l’informateur royal était d’étendre cet avantage fiscal à d’autres produits financiers. Cette proposition ne constituait que quelques lignes dans le projet plus vaste de réforme fiscale déposé sur la table des négociateurs de l’Arizona –aujourd’hui en phase de déminage. L’occasion serait pourtant belle d’enfin ajuster un mécanisme dans le collimateur de l’Europe, qui le juge discriminatoire depuis des années parce que applicable seulement aux revenus provenant de dépôts auprès d’établissements de crédit belges et qui porte désormais l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Outre cette menace judiciaire, c’est l’épargnant qui aurait tout à gagner avec la fin de ce régime de faveur à l’avantage exclusif des banques. En effet, étendre l’exonération fiscale à d’autres produits financiers accentuerait de facto la concurrence et obligerait les institutions bancaires à davantage de transparence dans leurs offres. La comparaison entre les solutions de placement s’en trouverait facilitée et l’épargne pourrait trouver d’autres chemins que celui trop emprunté du livret qui, rappelons-le, en cette période d’inflation élevée et de taux bas se traduit par une perte de pouvoir d’achat sur chaque centime déposé. Cerise sur le gâteau, l’épargne des Belges pourrait être mobilisée au service de l’économie réelle, au lieu de prendre la poussière sur un livret peu généreux.

Bien entendu, le lobby bancaire freine des quatre fers face à cette éventualité, trop content de disposer d’un aussi confortable matelas de sécurité. Mais entre la menace européenne et la prise de conscience du consommateur, sa position devient de moins en moins tenable.

Il n’existe pas, paraît-il, de forteresse imprenable. Aux partenaires de la probable future Arizona de bien choisir leur angle d’attaque.

Banquiers et assureurs fourbissent leurs armes pour regagner un maximum du terrain perdu.

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