Accord budgétaire flamand: « Qu’est-ce qu’on achète avec 15 euros par mois ? Un plaid ? »
Jeudi, quatre jours plus tard que prévu, le ministre-président flamand Jan Jambon a procédé à la lecture de la déclaration de septembre de son gouvernement. Sans surprise, l’accord budgétaire conclu fait l’objet de critiques, tant sur le fond que sur la forme.
L’accord budgétaire a prévu de consacrer 4 milliards d’euros à des mesures de lutte contre la crise et un milliard à des prêts aux entreprises. Le plafond de l’indexation du montant de base du paquet de croissance est à nouveau porté de 1 à 2%. En outre, tous les enfants recevront une allocation unique de 100 euros en 2022 et 2023. Par ailleurs, le groupe cible des suppléments sociaux sera étendu de 30.000 à 80.000 enfants, soit environ 10% du total. Le coût de ces ajustements passera de 160 millions euros en 2023 à 230 millions euros en 2027.
Pour les entreprises, il y aura une enveloppe de 250 millions d’euros de subventions, conditionnée à des investissements dans les économies d’énergie. Les entreprises recevront également un milliard d’euros de prêts et de garanties pour les aider à surmonter la crise énergétique. La prime à l’emploi, qui offre un salaire net supplémentaire aux plus bas salaires, sera prolongée. Le plafond sera porté à un salaire mensuel brut de 2.900 euros. Le montant annuel maximal de la prime passe de 600 à 700 euros.
« Un peu d’argent de poche »
Interrogé sur les ondes de la chaîne flamande Canvas, l’économiste et expert en pauvreté Ive Marx (Université d’Anvers) estime que ces mesures auront très peu d’impact sur le renforcement du pouvoir d’achat des Flamands. « Très peu de gens le sentiront dans leur portefeuille. C’est un coup de pouce, un peu d’argent de poche. »
« Qu’est-ce que le spectacle de la semaine dernière a apporté au Flamand? Rien », a réagi la cheffe du groupe Vooruit au parlement flamand, Hannelore Goeman, lors du débat qui a suivi l’allocution de Jan Jambon en séance plénière. Selon elle, les mesures prises par le gouvernement flamand sont nettement insuffisantes.
« Ce que je me demande, c’est ce que le Flamand ressentira immédiatement dans son portefeuille à la suite de ce paquet de mesures », a argumenté la cheffe du groupe socialiste. Selon elle, la Flandre continue à « faire des économies sur les enfants et les familles ». Le fait que les allocations familiales ne soient pas liées à l’indice de santé est incompréhensible. En même temps, « le gouvernement flamand continue à faire du cash sur les factures élevées payées par les Flamands », a-t-elle ajouté.
« La plupart des prestations sont indexées, y compris les allocations familiales à Bruxelles et en Wallonie. En Flandre, ce n’est pas le cas. C’est étrange », s’étonne également Ive Marx. « Au fond, on initie ici la réforme des allocations familiales, sans le dire. De cette façon, le gouvernement reconnaît qu’il a commis une erreur en commençant par un montant de base très élevé. En ne liant pas ce montant à l’index, on fait fondre un peu les allocations familiales« , a-t-il déclaré sur Canvas.
« Une ligne rouge »
Lundi soir, le président du CD&V Sammy Mahdi avait pourtant affirmé sur VTM que la liaison des allocations familiales au coût de la vie était une pour lui une « ligne rouge ». « Il y a des moments dans la vie où c’est si fondamental qu’il faut tirer une ligne rouge », avait-il déclaré. « Je pense que nous pouvons faire les deux choses en même temps: investir dans les suppléments sociaux et faire en sorte que la classe moyenne au sens large soit aidée également. Il y a des moyens pour ça », avait-il ajouté.
« Avec cela, la Flandre riche est maintenant à la traîne derrière Bruxelles et la Wallonie, qui augmentent les aides aux familles lorsque la vie devient plus chère », a dénoncé le chef de groupe Groen Björn Rzoska. « Le triste spectacle des derniers jours n’a finalement pas apporté grand-chose de plus aux Flamands, si ce n’est quelques jours de faux espoir et une plus grande méfiance à l’égard de la politique », a-t-il ajouté.
Ive Marx estime également que les suppléments sociaux restent bien trop bas. « 180 euros par an en plus l’année prochaine, c’est-à-dire 15 euros par mois. « Qu’est-ce que cela vous rapporte en cette période de crise énergétique? Un plaid en polaire? ».
Par ailleurs, Björn Rzoska estime que le gouvernement en fait également trop peu pour le climat. « La politique de l’autruche du gouvernement Jambon en matière de climat est à couper le souffle. Nous savons que l’impact de la crise climatique ne cessera de croître. Qu’elle ne fasse pas le nécessaire pour en protéger la Flandre est une omission coupable. »
Niveau fédéral
Pour Ive Marx, le gouvernement flamand a la chance que beaucoup de choses aient déjà été faites au niveau fédéral. « Le tarif social de l’énergie fait une très grande différence pour beaucoup de gens. Manifestement, le gouvernement flamand ne jette pas l’argent par les fenêtres comme le fait le gouvernement fédéral. »
Pour le ministre-président flamand Jan Jambon (N-VA), qui reconnaît que ces derniers jours ont été « tout sauf une belle image sur la manière dont nous voulons gouverner la Flandre », le gouvernement flamand dispose d’un « paquet incroyablement fort au bénéfice de nos familles et de nos entreprises« . « Vous avez devant vous un homme humble », a-t-il dit, « car je me rends compte que le processus que nous avons traversé en tant que gouvernement n’était pas beau à voir. Nous devons en tirer des leçons », a-t-il ajouté. (Avec Belga)
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici