Les marchés attendent les annonces économiques promises par Donald Trump, qui paraît hésiter en matière de protectionnisme. © AFP

L’économie américaine suspendue aux incertitudes de Donald Trump

Clément Boileau
Clément Boileau Journaliste

Le président américain refuse d’imaginer qu’une récession puisse toucher le pays, alors que sa politique économique demeure confuse. Les marchés font montre d’une relative anxiété.

«Je déteste prédire des trucs comme ça», a lancé Donald Trump sur Fox News ce dimanche, alors qu’on lui demandait s’il fallait craindre une récession aux Etats-Unis cette année. Les certitudes affichées tout au long de sa campagne en matière économique vacillent quelque peu ces derniers jours, le président américain semblant hésiter sur les droits de douane élevés qu’il entend appliquer à ses voisins canadien et mexicain: ceux-ci attendront début avril…  Concernant l’Europe, rien n’est moins sûr là aussi, avec une menace de hausse de 25% de droits de douane sur les importations —sans que cela soit pour le moment d’application. Idem pour la Russie, choyée diplomatiquement mais menacée encore récemment de nouvelles sanctions bancaires. Seule la Chine s’est pour l’instant vue appliquer des droits de douane plus élevés.

Bourses anxieuses

Les incertitudes «trumpiennes» ne sont pas pour arranger les affaires de la Bourse américaine. Depuis dix jours, les principaux indices (Dow Jones, Nasdaq, S&P500) s’affaissent, au gré des craintes de ralentissement de l’économie américaine, quand le VIX, surnommé «indice de la peur» car lié à la volatilité du marché et aux incertitudes dont ont horreur les investisseurs, n’arrête pas, lui, de grimper. L’été dernier, le VIX avait déjà fait parler de lui après une alerte sur un possible ralentissement de l’économie américaine, avant un net refroidissement des craintes boursières suite à de bons résultats sur l’emploi.

«Le nouveau gouvernement est en train de mettre en place des réformes politiques significatives (…) L’incertitude autour de ces réformes et de leurs effets potentiels reste élevée.»

Jerome Powell, chef de la Fed, équivalent de la banque centrale américaine

En attendant, «le moins que l’on puisse dire de Trump, c’est qu’il est confus, ce qui ne fait pas du tout les affaires des marchés financiers, qui ne savent plus sur quel pied danser», fait remarquer, sur son blog, l’économiste en chef chez CBC Bernard Keppenne, qui observe également que la Fed, l’équivalent de la banque centrale américaine, inquiète d’une reprise de l’inflation, est sur ses gardes. «Le nouveau gouvernement est en train de mettre en place des réformes politiques significatives (NDLR: sur le commerce, l’immigration, la fiscalité et la régulation), a ainsi fait remarquer son chef Jerome Powell, craignant que «l’incertitude autour de ces réformes et de leurs effets potentiels reste élevée», a-t-il ajouté.

Le spectre de l’inflation

Et il n’est pas certain que les prochaines semaines clarifient quoi que ce soit. Côté budgétaire, la chambre des représentants et le sénat doivent avaliser le projet de financement de l’administration américaine jusque fin septembre —en cas d’échec, c’est le shutdown, soit la cessation des activités des administrations gouvernementales et un joli lot d’incertitude à gérer en plus si le blocage persiste. Date butoir pour l’adoption de ce texte: ce vendredi 14 mars, minuit. Avant cela, ce mercredi, les chiffres concernant l’inflation sont attendus, suivis des prix à la production: ceux-ci dicteront l’attitude de la Fed en matière de taux, notamment pour éviter que l’inflation reparte à la hausse.

A l’extérieur des frontières américaines, les négociations sur un éventuel cessez-le-feu en Ukraine se poursuivent depuis ce lundi en Arabie Saoudite. Trump et son administration sont plus que jamais de la partie, eux qui entendent mettre la main sur le sous-sol ukrainien riche en minerais rares. Si un accord était signé cette semaine dans ce cadre, l’anxiété boursière céderait sans doute à l’euphorie...

Quand les marchés vont bien

Mais on n’en est pas là, et d’ailleurs une bonne santé des marchés n’est pas forcément gage de miracle économique. Lors du mandat précédant de Donald Trump, sa politique de dérégulation (bancaire, notamment) couplée (déjà) à des mesures protectionnistes et en particulier à la «guerre commerciale» faite à la Chine, n’avait pas permis d’inverser la balance commerciale en faveur du pays, alors que le déficit public s’était singulièrement creusé. Reste que les Etats-Unis étaient en situation de plein emploi avant le covid et que les marchés se portaient parfaitement bien, le Dow Jones progressant de 55% et le SP500 de 46% sur l’ensemble du mandat de Trump, malgré l’impact du covid et une volatilité presque constante.

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