La Belgique, véritable cancre d’Europe : notre gouvernement jette-t-il de l’argent par les fenêtres?
Le budget fédéral belge crée des remous. En Belgique, mais aussi en Europe. La Commission européenne a statué sur le budget belge. Comme attendu, notre pays a pris un sérieux avertissement. La faute aux chiffres, dans le rouge, et à la récente bourde d’Eva De Bleeker, qui a laissé un trou d’1,7 milliard dans le budget fédéral. Notre situation actuelle serait même pire que celle de nombreux pays d’Europe du Sud, surnommés le « Club Med » du Vieux continent.
Eva De Bleeker, désormais ex-secrétaire d’Etat au budget, avait soumis un déficit budgétaire de 6,1% du PIB de la Belgique, et non 5,8% comme notifié à la Commission européenne il y a peine un mois. La faute à la TVA réduite sur l’énergie qui n’avait pas été incluse. Une bourde qui l’a poussée à démissionner. Ces 3% de différence représentent un trou d’1,7% milliard.
Le budget belge fait désormais office de cancre de l’UE. Depuis des années, l’Europe surveille de beaucoup plus près les recettes et les dépenses de ses États membres.
Pour maintenir le marché unique et l’euro à flot, l’UE demande que chaque Etat fasse preuve de discipline. Un déficit annuel supérieur à 3 % du produit intérieur brut (PIB) a été défini par l’Europe comme la ligne rouge à ne pas dépasser. Avec ses 6,1% de déficit, la Belgique est donc doublement dans le rouge. Pendant le Covid, l’UE a fermé les yeux, mais cette politique de tolérance touche progressivement à sa fin.
Plonger sous le seuil de douleur de 3 % est une chose, mais en 2023, la Belgique sera, selon toute vraisemblance, le plus mauvais élève d’Europe. La Commission européenne pourrait donc sévir à l’encontre de notre pays. Les récents rapports montrent d’ailleurs que le budget de la Belgique dérape, passant de -5,2% en 2022 à -5,8% en 2023 – partageant la dernière place avec la Slovaquie. En 2024, nous serons au niveau de la Hongrie et la Pologne – deux pays qui ressentent pleinement les effets négatifs de la guerre en Ukraine.
Dès lors, une question : la Belgique peut-elle s’attendre à être punie ? Une chose est certaine, l’Union européenne va la placer sous une surveillance budgétaire accrue. Un avertissement a été donné. En 2023, la clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance continue d’être activée, ce qui veut dire que la mise en garde n’a pas de conséquence formelle. Il est attendu que les États de la zone euro reviennent aux règles limitant le déficit public et l’endettement en 2024.
Déficit de la Belgique: des primes à tout le monde, sans ciblage
Comment le pays est-il devenu le pire élève de la classe européenne ? Dans son rapport, la Commission souligne l’augmentation rapide des dépenses publiques. Le gouvernement fédéral accorde des subventions pour le Covid et l’énergie à tout le monde. Mais le système des primes ne cible pas suffisamment les entreprises et les familles qui en ont vraiment besoin. Aux yeux de l’UE, ce sont donc des mesures beaucoup trop coûteuses.
Une autre cause est l’indexation automatique des salaires et de toute une série d’aides, a pointé un responsable européen. Comme pour de nombreux autres pays européens, la Commission met aussi en garde contre des mesures d’aides énergétiques insuffisamment ciblées et temporaires.
« Les États membres ont été encouragés à prendre des mesures pour soutenir les ménages vulnérables et entreprises en difficulté » face à la crise énergétique, reconnait ce responsable. « Mais la manière dont cela est fait est particulièrement importante ». L’UE ne cesse en effet d’insister sur l’importance de cibler les aides sur les ménages et entreprises qui sont dans le besoin. Or, jusqu’ici une grande part des mesures prises sont des mesures « sur les prix », qui par définition s’appliquent à tous, sans ciblage utile.
En outre, l’UE souhaite de toute urgence des réformes à plus long terme. Structurellement, trop peu de mesures sont prises pour assurer notre propre approvisionnement énergétique à l’avenir.
L’un des grands chantiers ouverts est celui de la facture du vieillissement. La réforme des retraites de la ministre Karine Lalieux (PS) coûte plus d’argent qu’elle n’en rapporte, selon les calculs de sa propre administration. Mais économiser sur les retraites reste difficile politiquement parlant, -encore plus à l’approche des élections de 2024- les retraités représentant un groupe d’électeurs de plus en plus nombreux.
Un contexte qui pousse la Commission européenne à être réticente quant à l’aide d’un milliard d’euros initialement promise à la Belgique pour la relance économique. Un revers supplémentaire pour le budget national.
L’Espagne et l’Italie reçoivent chacune environ 70 milliards d’euros de ce fonds d’aide européen. La Belgique ne reçoit que 4,2 milliards, alors qu’elle met 8 milliards dans la cagnotte européenne chaque année. Progressivement, la Belgique creuse son trou économique et pourrait même connaître un sort identique au « Club Med », ce groupe de pays d’Europe du Sud où la situation financière est alarmante.
Selon l’historique de la dette par pays, la Belgique est aujourd’hui plus mal lotie que le « Club Med », affirme la Commission européenne. Alors que la Grèce, l’Espagne, le Portugal et la France réduisent leur dette publique, celle de la Belgique continuera d’augmenter dans les années à venir, pour atteindre 109 % du PIB en 2024. Plus que jamais, des ajustements budgétaires s’avèrent nécessaires, et urgents. Auquel cas le pays risque également de devenir de moins en moins attractif aux yeux des investisseurs étrangers. La nouvelle secrétaire d’État au Budget, Alexia Bertrand (Open-VLD), a du pain sur la planche.
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