Qui pourra en bénéficier? Quid des aides actuelles? 5 questions sur le nouvel abaissement des droits d’enregistrement en Wallonie
La promesse de la nouvelle majorité wallonne est claire: faciliter l’accès à la propriété. Avec une mesure phare: l’abaissement des droits d’enregistrement à 3%. Une bonne nouvelle pour les futurs acquéreurs? Le point en cinq questions.
Sera-t-il bientôt plus facile d’acquérir un premier bien immobilier en Wallonie? La nouvelle majorité MR-Les Engagés s’est félicitée, parmi les mesures annoncées lors de la présentation de son accord de gouvernement, de l’abaissement des droits d’enregistrement pour le premier achat immobilier. Objectif: faciliter l’accès à un premier logement pour tous les Wallons et faire «de l’accès à la propriété une priorité absolue».
1. Qui pourra en bénéficier?
«Face aux défis posés par les prix élevés de l’immobilier dans certaines régions ou la difficulté de financer un montant suffisant par crédit bancaire, le gouvernement wallon s’engage à faciliter l’acquisition d’un premier logement pour les Wallonnes et les Wallons», peut-on lire dans la Déclaration de politique régionale wallonne (DPR). Mesure phrase: l’abaissement à 3% des droits d’enregistrement (au lieu de 12,5% actuellement), dès le 1er janvier 2025. Cette réduction de taux est applicable en cas d’acquisition d’une habitation «propre et unique». En d’autres mots: l’acquéreur doit s’y domicilier et ne pas posséder un autre bien immobilier au moment de l’achat.
Pour ceux qui peuvent en bénéficier, c’est une bonne nouvelle, estime Renaud Grégoire, porte-parole de notaire.be: «Les droits d’enregistrement sont souvent un frein au lancement sur le marché immobilier. C’est une manière de rassembler dans un même système toute une série de mesures.» Aujourd’hui, il existe un régime de réduction des droits d’enregistrement à 6%. Il est possible d’en bénéficier en fonction du revenu cadastral. «Les primo-acquéreurs étaient presque obligés de choisir un bien à la campagne ou en banlieue pour espérer une réduction, car en ville le revenu cadastral est toujours supérieur», poursuit le notaire. Un décalage remis à plat avec les futures dispositions. «Cela simplifie fortement les choses.»
2. Et si je ne suis pas un primo-acquéreur?
Pour les multipropriétaires, pas de changement: ils seront toujours soumis aux droits d’enregistrement actuels.
Il sera néanmoins permis «de bénéficier directement de l’avantage en cas de revente et de rachat dans un délai raisonnable de l’habitation propre et unique afin d’accompagner les propriétaires dans l’évolution de leur vie et de fluidifier le marché immobilier», selon la DPR. Exemple: en cas de séparation, celui qui revend son bien et en acquiert un neuf, qui sera son seul bien immobilier ainsi que son domicile, pourra en bénéficier.
3. Quid des aides existantes?
La mesure est «financée par la suppression de toute une série de petits mécanismes», assure Georges-Louis Bouchez à Matin Première (RTBF). L’idée, c’est de baisser pour tout le monde.» Parallèlement, les aides existantes seront donc abrogées. «Cette réforme remplace de manière plus favorable les réductions, abattements et avantages existants, dont le chèque habitat», mentionne le texte de la majorité. La mesure ne remettra cependant pas en cause les bénéficiaires existants des différents avantages fiscaux.
Le chèque habitat prévoyait une dégressivité de l’aide publique en fonction de la hauteur des revenus. Le nouveau dispositif ne fait, lui, aucune distinction entre bas, moyens et haut salaires. «La Région wallonne était la dernière en Belgique à avoir ce système, avec une économie de 1.000 à 1.500 euros dans les impôts d’un propriétaire d’une habitation unique et propre», précise Renaud Grégoire. Désormais, tout le monde aura droit aux mêmes avantages, quel que soit le revenu ou le revenu cadastral du bien choisi. «Un choix politique», juge-t-il.
Selon l’économiste Philippe Defeyt, directeur de l’Institut pour un développement durable (IDD) et ancien secrétaire fédéral d’Ecolo, il est probable que le nouveau système sera «d’autant plus favorable quand on monte –et cela va souvent de pair– dans l’échelle des revenus et de la valeur du bien acheté.» De plus, «contrairement au chèque habitat, la baisse des droits d’enregistrement n’est en rien liée à l’existence d’un crédit hypothécaire. Dès lors, un ménage aisé, plus ou moins soutenu par des apports familiaux, fera partie des grands gagnants. Est-ce vraiment équitable?», s’interroge-t-il.
La majorité MR-Les Engagés prévoit également de plaider, au fédéral, pour un régime TVA favorable à l’acquisition d’un logement propre et unique.
4. Un accès à la propriété facilité?
L’abaissement des droits d’enregistrement est «un incitant simple et lisible pour renforcer l’accès des jeunes à la propriété», promet la Déclaration de politique régionale. Une mesure qui s’aligne sur les dispositions en vigueur en Flandre.
Pour le porte-parole de notaire.be, cela répond à une demande, car le moment de l’achat est souvent compliqué pour les particuliers. «La Banque nationale, depuis plusieurs années, a enjoint les banques à limiter le montant qu’elles prêtent. C’est sans doute légitime, mais c’est un peu dur pour les particuliers. Quand il s’agit d’un achat pour soi-même, les banques prêtent encore régulièrement 90% voire 100% du prix d’achat. Mais il faut financer les frais. Si vous avez 30.000 à 40.000 euros à payer, ou 5.000 à 10.000, ce n’est pas comparable…» Surtout pour une personne qui, par exemple, souhaite acquérir un bien seule et doit prendre en charge l’entièreté de ces frais.
Selon le notaire, cela permet donc l’accessibilité à un plus grand nombre. «Posséder une propriété reste un gage de sécurité. L’encourager est une mesure de long terme, car cela reste la meilleure façon d’aborder la pension puis la fin de vie avec sérénité.» Une difficulté pointée par plusieurs études notariales.
5. Quel impact sur le marché immobilier?
L’économiste Philippe Defeyt redoute que cette baisse des droits d’enregistrement profite aux vendeurs plutôt qu’aux acheteurs. Renaud Grégoire n’en est pas convaincu. «Pour le moment, le marché est stable, voire en diminution, donc cela va plutôt le soutenir, estime-t-il. Et quand un bien est mis sur le marché, tous les candidats ne sont pas en mesure de bénéficier de la réduction.» Il prédit que la réduction à 3% en Wallonie dynamisera le marché et l’ensemble des acteurs de l’immobilier. «Le business amène le business. Quand il y a des droits d’enregistrement favorables, la concurrence l’est plutôt également.»
La mesure sera en vigueur le 1er janvier 2025. Cela ne risque-t-il pas de provoquer de l’attentisme sur le marché de l’achat? Pas forcément, l’échéance arrivera vite. «La logique serait que cela concerne les actes signés à partir de cette date. Ce qui est très probable avec un compromis signé dans un gros mois, vu le délai.» Avec peut-être une dynamique à revers en fin d’année: «Souvent, les gens veulent se précipiter avant les changements de la nouvelle année. Cela risque cette fois d’être l’inverse.»
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