Jusqu’à +32%: pourquoi le précompte immobilier explose dans certaines communes

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

L’indexation du précompte immobilier à 9,6% va impacter tous les propriétaires du pays. Certains, principalement à Bruxelles, connaîtront « une double peine », estime l’avocat fiscaliste Thierry Litannie.

Les propriétaires vont subir la désagréable conséquence de l’inflation. Avec une indexation estimée à 9,6%, le précompte immobilier, taxe annuelle qui s’applique à chaque détenteur d’un bien, va connaître une forte augmentation. « C’est un coup dur pour les propriétaires, même s’ils peuvent toutefois indexer leurs loyers sur base de l’indice santé », cadre l’avocat fiscaliste Thierry Litannie (LawTax).

Précompte immobilier: trois possibilités

Pour l’expert en droit fiscal, il convient de distinguer trois situations.

1. « Il est interdit, pour le propriétaire, de reporter le paiement du précompte immobilier sur le locataire. C’est donc une mauvaise nouvelle pour le détenteur qui occupe son bien, mais aussi pour celui qui le loue à titre privé. »

2. « S’il s’agit d’un local commercial, il revient à l’occupant de payer le précompte immobilier. Les entreprises ou indépendants qui ont des baux commerciaux sont donc redevables de cette taxe. »

3. « Treize communes en Belgique, dont huit bruxelloises (retrouvez la liste détaillée en fin d’article, NDLR) ont décidé d’augmenter leurs centimes additionnels au précompte immobilier. La commune de Forest, à Bruxelles, détient le record national, avec une augmentation de 28%. Les propriétaires de cette localité vont donc subir l’indexation de 9,6%, qui sera également appliquée aux centimes additionnels, eux-mêmes gonflés, de sorte que le précompte total augmentera de 32%. Les gens qui se trouvent dans cette situation subissent une véritable une double peine. »

Un cercle vicieux

Ce dernier cas de figure est quelque peu baroque, estime Thierry Litannie. « Car les communes qui appliquent des centimes additionnels élevés sont souvent celles qui ne sont pas les plus riches du Royaume, et dont les propriétaires et les occupants ne sont pas les plus aisés non plus. A l’inverse, à Knokke, il n’y a pas de centimes additionnels », fait-il remarquer.

Ainsi, une espèce de cercle vicieux se crée. « La commune défavorisée, qui doit financer davantage de services sociaux, va appliquer, par la force des choses, des centimes additionnels plus élevés à la charge de personnes moins aisées financièrement. Paradoxalement, plus la commune est riche, moins les centimes additionnels sont élevés », relève l’avocat fiscaliste.

Chacun taxe dans son bac à sable. Mais aucun organisme n’impose une vision globale.

Thierry Litannie

Pour le spécialiste, les niveaux de taxation sont trop divisés en Belgique, et, par conséquent, aucune vision globale ne se dégage. « C’est l’effet pervers de notre lasagne institutionnelle. Les propriétaires paient le droit d’enregistrement à la Région, les impôts au fédéral s’ils louent leur bien… Chacun taxe dans son bac à sable. Mais aucun organisme n’impose une vision globale. »

Maigre lot de consolation pour les propriétaires bruxellois, une prime de 153 euros leur sera consacrée. Un montant « dérisoire », estime Thierry Litannie, en regard de l’indexation du précompte immobilier.

Les centimes additionnels, késako ?

Le précompte immobilier est fixé sur base du revenu cadastral, soit le loyer annuel théorique d’un bien au… 1er janvier 1975. En principe, tous les dix ans, une péréquation cadastrale doit être réalisée, c’est-à-dire une révision générale dans tous ces revenus à l’échelle belge. Mais les quatre dernières décennies n’ont pas connu cette mise à niveau. « D’une certaine façon, plus le temps passe, plus il est serait désastreux de faire une péréquation, car cela induirait un relèvement massif des revenus cadastraux, et donc une augmentation insensée des précomptes immobiliers », commente Thierry Litannie.

Ce décalage est actuellement contrebalancé par l’indexation des revenus cadastraux, et c’est sur cette base qu’est calculé le précompte immobilier. « La recette de ce dernier va à la fois au fédéral, à l’agglomération et aux communes. Autrement dit, il faut disséquer le revenu entre trois parties, et il se fait que la commune a le pouvoir d’appliquer un pourcentage d’augmentation de ce précompte immobilier. Ce sont les fameux centimes additionnels », expose l’avocat fiscaliste.

Quelles communes augmentent leurs centimes additionnels ?

Les treize communes qui augmentent leurs centimes additionnels, sont, dans l’ordre décroissant :

  • Forest (27,88%)
  • Gand (19,15%)
  • Jemeppe-sur-Sambre (18,60%)-
  • Anderlecht (18,46%)
  • Ixelles (16,95%)
  • Molenbeek (16,12%)
  • Saint-Gilles (13,11%)
  • Watermael-Boitsfort (10,36%)
  • Schaerbeek (10,00%)
  • Ghansoren (8,36%)
  • Floreffe (5,36%)
  • Andenne (3,70%)
  • Baarle-Hertog (0,06%)

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