Bruxelles veut renforcer la lutte contre la discrimination dans l’accès au logement
La commission du Logement du Parlement bruxellois a donné son feu vert, à une large majorité, à un projet d’ordonnance visant à renforcer le dispositif de lutte contre la discrimination dans l’accès au logement.
En cas d’adoption en séance plénière – d’ici les vacances d’été -, le texte élaboré il y a plusieurs mois, fera de la Région-capitale, la première du pays à se doter d’un dispositif de tests pro-actifs en la matière.
Le projet d’ordonnance initié par la secrétaire d’État au Logement, Nawal Ben Hamou vise à remédier aux faiblesses du dispositif existant qui n’a donné jusqu’à présent que peu de résultats. Les tests anti-discrimination ont été pratiqués à seulement trois reprises et aucune sanction n’a été prononcée depuis septembre 2019. En cause, selon la secrétaire d’État, l’encadrement trop strict des tests de la réglementation actuelle à travers l’existence de trois conditions cumulatives: l’existence d’une plainte ou d’un signalement préalable; des indices sérieux de discrimination; et ne pas commettre de provocation.
L’ampleur du phénomène de la discrimination dans l’accès au logement a été documentée dans plusieurs études scientifiques.
Plus récemment, une nouvelle étude a mis en lumière l’effet négatif du confinement sur l’ampleur des discriminations au logement en Région de Bruxelles-Capitale. On y constate notamment que la discrimination envers les personnes avec un nom d’origine nord-africaine a presque doublé, passant de 20 à 36%.
Autoriser les tests proactifs
La nouvelle réglementation en gestation prévoit d’autoriser des tests proactifs. Seule l’interdiction de la provocation est maintenue comme critère préalable.
Le nouveau dispositif permet à l’Inspection régionale du logement d’engager des acteurs pour réaliser des testings pour son compte et de permettre aux associations œuvrant à l’insertion par le logement de réaliser des testings à la demande de la victime ou de l’Inspection. Les tests de situation nécessitent en effet des profils différents pas toujours présents chez les agents de l’Inspection régionale (e.a. femmes enceintes, pensionnés ou personnes handicapées).
La future ordonnance étendra la lutte contre la discrimination dans tout le secteur du logement et ne la limitera pas à la recherche du logement. L’objectif est de viser toutes les discriminations qui touchent les candidats locataires et les locataires avant et pendant toute la durée du bail. Par exemple, si un locataire est expulsé, car il s’est mis en couple avec une personne de même sexe, le bailleur pourra être poursuivi et sanctionné.
Plusieurs critères de protection contre la discrimination sont ajoutés :
- les responsabilités familiales (familles nombreuses, monoparentales),
- l’adoption,
- la coparentalité,
- la paternité
- et le statut de séjour.
Le projet précise également qu’une discrimination fondée sur la procréation médicalement assistée, l’allaitement, les caractéristiques sexuelles et l’identité ou l’expression de genre est assimilée à une discrimination fondée sur le sexe. Le refus d’aménagement raisonnable est également assimilé à une discrimination directe.
Seront également précisées quelles informations peuvent être demandées par le bailleur et à quel moment le bailleur pourra solliciter certaines informations au candidat locataire. Il ne sera plus permis aux bailleurs de faire remplir des fiches d’information extrêmement intrusives avant même une simple visite.
L’avis du monde politique
Le PTB a rejoint la majorité, même si son représentant, Petya Obolensky a estimé que la provocation n’est pas écartée par la jurisprudence en la matière. L’élu d’extrême gauche a par ailleurs regretté que l’on ne mobilise pas davantage de moyens pour lutter contre ce phénomène bien implanté.
Le MR s’est abstenu. Sans mettre en cause le principe de la lutte contre la discrimination, Bertin Mampaka (MR) a déploré que le propriétaire soit privé de la possibilité de tenir compte du statut du locataire (permis de séjour ou non), et par effet de rebond, de sa capacité de payer le loyer. Un propriétaire ne pourrait ainsi se tourner vers le Juge de Paix.
Gilles Verstraeten (N-VA) qui a voté contre s’est montré plus critique. « Il est de moins en moins intéressant d’investir dans le logement en Région bruxelloise », a-t-il dit, faisant également référence à la réglementation des loyers.
Au rythme où vont les choses, le marché locatif bruxellois ne sera bientôt plus composé que de logements sociaux publics, d’un segment de logements de luxe et d’un segment illégal, ce qui rendra impossible la recherche d’un logement abordable et de qualité pour la classe moyenne, a-t-il conclu.
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