Négociations Engie – Gouvernement: ce qu’il manque pour trouver un accord
Les négociations avec Engie en vue de prolonger les réacteurs de Tihange 3 et Doel 4 se poursuivront dans les prochains jours. L’objectif était d’avoir cet accord bouclé avant la nouvelle année, mais les deux parties n’y sont pas parvenues. Il est désormais difficile d’estimer quand elles parviendront à pleine entente.
Le Premier ministre Alexander De Croo et la ministre de l’Energie, Tinne Van der Straeten, négocient depuis plusieurs mois avec le groupe français Engie la prolongation de dix ans des deux réacteurs les plus récents du parc nucléaire belge, afin de garantir la sécurité d’approvisionnement en électricité du pays. Au mois de juillet, les deux parties avaient conclu un accord de principe (lettre d’intention). L’accord final était attendu d’ici la fin de l’année 2022. Il prendra donc un peu de retard.
Les négociations se dérouleraient de manière constructive, mais sont extrêmement complexes. La veille du Nouvel An, le Premier ministre Alexander De Croo et le ministre de l’Énergie Tinne Van der Straeten ont siégé avec les dirigeants d’Engie jusqu’à 18 heures. La date limite du 31 décembre avait été fixée. Malgré cette dernière tentative, le deal s’est avéré irréalisable, les deux parties ont alors envoyé un communiqué pour signaler qu’il fallait simplement plus de temps pour conclure.
« De nombreuses avancées ont pu être réalisées ces derniers jours, sur un nombre conséquent de points cruciaux, ce qui réjouit les deux parties. Un délai est néanmoins nécessaire pour parvenir à un accord qui satisfait entièrement les deux parties », dit le communiqué.
« Le gouvernement fédéral et Engie ont, dès lors, décidé de prolonger les discussions en cours dans les prochains jours. L’objectif reste d’aboutir rapidement à un accord permettant la prolongation de la durée de vie des réacteurs de Doel 4 et Tihange 3 pour 10 ans. Cet objectif est partagé tant par le gouvernement fédéral que par Engie », ajoute-t-il.
Engie – Gouvernement: qu’est-ce qui bloque ?
Il n’y a pas un seul élément qui bloque tout le processus. En réalité, les discussions se concentrent sur trois axes interconnectés, déjà identifiés dans la lettre d’intention de juillet: la prolongation en elle-même, la structure qui devra être créée par Engie et l’Etat pour exploiter les centrales, et le coût lié à la gestion des déchets nucléaires.
Aucun des deux camps ne prend ces sujets à la légère. Non seulement les deux parties doivent se mettre d’accord sur la structure juridique, mais elles doivent aussi définir dès maintenant ce qui doit se passer si des problèmes surviennent en cours de route. Tout cela doit être déterminé et juridiquement stable.
Le gouvernement a donné mandat aux négociateurs de poursuivre les discussions. En vertu d’une loi de 2003, confirmée en 2015, le parc nucléaire belge doit en principe s’éteindre en 2025. La prolongation des deux réacteurs concernera les hivers 2026-2027 et les années qui suivent. « De nombreuses mesures et de nombreux investissements ont déjà été mis en place pour garantir la sécurité d’approvisionnement d’ici là », assure le gouvernement dans le communiqué.
Pour permettre cette sortie du nucléaire, un Mécanisme de Rémunération de Capacité (CRM) a notamment été mis en place. Il doit compenser la fin partielle de cette source d’énergie et repose entre autres sur de nouvelles capacités offertes par des centrales au gaz.
L’accord de principe conclu en juillet entre le gouvernement fédéral et Engie doit faire en sorte que les réacteurs de Tihange 3 et Doel 4 soient opérationnels en octobre-novembre 2026 afin que la sécurité d’approvisionnement énergétique du pays soit garantie à l’entrée de l’hiver 2026-2027, avaient alors expliqué De Croo et Van der Straeten.
Une nouvelle société doit voir le jour, dont l’Etat belge et Engie seront actionnaires à parts égales et dans laquelle seront logés les deux réacteurs prolongés. L’exploitant demeure Engie Electrabel mais l’Etat entrera dans le capital de cette structure.
Outre la constitution de cette nouvelle société, d’autres points sont abordés, selon plusieurs médias et des sources proches du dossier, dont celui de la gestion des déchets issus de l’activité nucléaire en Belgique et la lourde facture que devra supporter Engie pour ce faire alors que le gouvernement n’a pas encore déterminé la méthode de stockage qui sera utilisée. Or, il y a peu, Engie a contesté le surcoût de plusieurs milliards d’euros fixé par la Commission des provisions nucléaires.
Le gouvernement avait fixé la fin de l’année pour trouver un accord. Celui-ci devrait prendre quelques jours de plus. Si ces quelques jours ne changeront guère la situation, le temps est néanmoins compté. L’accord doit être soumis à la Commission européenne et les opérations pour la prolongation des deux réacteurs doivent encore commencer et recevoir l’aval de l’Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire (AFCN) pour aboutir à une prolongation opérationnelle en 26-27.
Quand peut-on s’attendre à un accord ?
Le délai initial étant dépassé, le gouvernement n’a pas refixé une nouvelle échéance. Un accord devrait intervenir à court terme. Si les grandes lignes sont actées, il s’agit maintenant de régler des derniers points de détails pour que l’ensemble soit validé. Les discussions sont constructives, mais il manque encore un accord global.
Le fait que les travaux se soient poursuivis aussi longtemps un 31 décembre montre la détermination des deux parties à arriver à cet accord. Il n’était cependant pas question de se mettre d’accord uniquement pour respecter le délai, au risque de rencontrer des problèmes colossaux à l’avenir. L’avis partagé étant qu’il vaut mieux un bon accord qu’un accord précipité.
Ce lundi, le gouvernement fédéral a repris les négociations avec Engie, en vue d’un accord complet.
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