
Les contrats d’électricité dynamiques vont débarquer: 5 questions pour comprendre cette nouveauté
Plusieurs fournisseurs d’électricité achèvent la mise en place de leur nouveau contrat «dynamique». Une formule qui facture l’énergie heure par heure, avec un prix variant en fonction de l’offre et de la demande. De quoi aider le réseau à lisser les pics de production du renouvelable notamment, en incitant le client à consommer aux bons moments.
Les contrats d’énergie aux tarifs fixes et variables ne seront bientôt plus seuls sur le marché. La facturation dynamique s’apprête à débarquer en Wallonie ainsi qu’à Bruxelles, plusieurs fournisseurs terminant la mise en place de cette nouveauté. L’offre sera même obligatoire pour les plus gros acteurs, dès 200.000 clients.
Concrètement, il s’agit d’offrir aux consommateurs la possibilité de payer leur électricité à un tarif variant d’heure en heure. Ce type de contrat sera soumis aux variations de prix de façon très fréquente, à plusieurs moments de la journée, mais permet également de profiter des moments où l’électricité est bon marché, voire affiche un tarif négatif dans le meilleur des cas.
Seule la Flandre, depuis 2021, permettait de choisir ce type de contrat jusqu’ici, mais plusieurs fournisseurs au sud du pays et dans la capitale préparent la mise en route de ces contrats dynamiques. Ils dépendent de plusieurs facteurs techniques pour pouvoir être proposé au client final. Ce dernier ayant tout intérêt à bien analyser sa consommation avant de se lancer. Explications en cinq questions.
1. Comment fonctionne un contrat dynamique?
Pour utiliser ce contrat, le client final doit posséder un compteur électrique communiquant. Il s’agit de la seule manière pour le fournisseur de connaître la consommation –et l’éventuelle injection– de manière fréquente, afin de pouvoir facturer correctement le consommateur.
«Pour ce contrat, les prix de la journée sont annoncés la veille et dépendent du marché « day ahead », qui reflète assez bien la quantité d’électricité disponible, notamment renouvelable. L’idée du contrat dynamique est de reporter au maximum la consommation d’électricité au moment où l’offre sera abondante, avec un prix plus avantageux», explique Damien Ernst, professeur à l’ULiège et spécialiste des questions liées à l’énergie.
L’utilisateur est donc appelé à suivre ces tarifs afin de maximiser sa consommation aux bons moments. Un élément qui doit aussi permettre au réseau de mieux absorber la quantité d’énergie renouvelable injectée, éolien et solaire, à mesure que celle-ci augmente.
2. Pour quel type de consommateur et d’installation?
Le gain potentiel dépend évidemment de la consommation globale d’énergie électrique. Un gros consommateur ayant plus à gagner qu’un petit, en montant absolu. Certains fournisseurs précisent que l’offre s’adapte mieux dès que la consommation atteint au moins 5.000 kWh/an. «Bien informé sur les tarifs et en suivant les moments les plus opportuns, un consommateur peut gagner plusieurs centaines d’euros par an», détaille Damien Ernst.
Pour passer à ce genre de tarif, il convient donc de s’intéresser aux importants postes de consommation, comme les appareils énergivores et les voitures roulant à l’électricité. «Les possesseurs de véhicules électriques peuvent programmer la recharge au moment où les tarifs sont faibles. Les ménages avec des panneaux photovoltaïques qui ont aussi une batterie peuvent jouer avec cette dernière pour lisser la consommation et jouer sur la recharge de la batterie à moindre coût, selon les tarifs annoncés», poursuit le professeur.
Choisir un contrat dynamique, c’est donc aussi consentir à un suivi plus actif afin de gagner sur sa facture. En cas d’hésitation, il peut être intéressant de vérifier comment sa consommation actuelle est répartie sur la journée, et voir ce qui peut se décaler.
Le travail d’information des fournisseurs sur les tarifs en vigueur sera crucial. Ceux avec des plateformes performantes et des données efficaces communiquées aux clients pourraient avoir un avantage sur d’autres, lors du choix entre plusieurs offres.
3. Un prix de l’électricité sous zéro, comment est-ce possible?
La combinaison des deux facteurs –offre abondante et demande faible– peut même faire tomber le prix de l’électricité en négatif. Le consommateur est alors «payé» pour consommer. Un incitant qui n’est possible qu’avec un contrat dynamique.
«Le prix de l’électricité peut effectivement être négatif, mais il ne faut pas oublier que ce n’est qu’une partie de ce que nous payons. A côté, il y a également des taxes et des frais de distribution qui, eux, restent toujours positifs, rappelle le spécialiste. Cela dit, il est clair que nous allons vers des périodes de prix négatifs de plus en plus fréquentes à l’avenir, à mesure que le renouvelable se développe.»
Selon les données de Testachats, le phénomène d’électricité à prix négatif est encore assez limité. Pour l’année 2024, cela a représenté environ 408 heures au total, soit moins de 5% du temps. Mais l’association de défenseur des consommateurs acquiesce: cela va continuer d’augmenter.
4. Quels désavantages pour un contrat dynamique?
Le client final se retrouve davantage acteur de sa consommation, étant incité à consommer aux moments peu chers. Cela demande un travail plus actif de suivi des prix et de programmation des appareils. Les systèmes connectés et intelligents permettent de reporter une partie de ce travail, en automatisant certaines décisions. Sans cela, en consommant passivement, le risque existe de payer plus qu’avec un contrat fixe ou variable.
Le risque d’envolée des prix est également là et pèse plus fortement dans le décompte qu’avec un contrat variable, revu mois après mois. «Le fournisseur reporte effectivement une partie de ce risque de volatilité des prix sur le client, puisque la variation sera reportée plus directement sur ce dernier. Mais le consommateur garde la main au final: c’est toujours lui qui décide du moment où il prélève son électricité et il a le loisir de décaler certaines consommations. C’est finalement assez fou qu’il ait fallu attendre si longtemps pour voir arriver ce genre de produits sur le marché», reconnaît Damien Ernst.
5. Quand arriveront ces nouveaux contrats?
Les fournisseurs d’électricité dépendent en grande partie des gestionnaires de réseaux de distribution (GRD) pour pouvoir proposer les contrats dynamiques. Ces derniers seront chargés de communiquer les relevés précis au quotidien, permettant ensuite la bonne facturation.
Ores, plus grand GRD en Wallonie, n’est pas encore totalement prêt pour cela, mais devrait l’être en juin, tout comme Sibelga à Bruxelles, tandis que Resa, actif notamment du côté de Liège, est déjà opérationnel. En attendant, l’installation des compteurs communicants se poursuit chez tous les GRD, condition obligatoire pour pouvoir demander un contrat dynamique.
«Ce tarif est clairement appelé à se développer mais il reste encore assez marginal actuellement», explique-t-on du côté de Luminus, qui peaufine son offre pour un lancement en Wallonie dans les prochaines semaines, mais propose déjà pareil contrat en Flandre. Bruxelles n’entre actuellement pas dans les plans du deuxième plus gros fournisseur du pays.
Du côté de Liège, avec Resa comme GRD, Octa+ permet déjà de souscrire un contrat à prix dynamique depuis le 1er mars dernier. Engie prévoit une première offre dynamique pour la fin d’année et devrait être suivi par les autres principaux acteurs.
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