« Le marché de l’électricité est extrêmement volatil »
La semaine dernière, la Commission de Régulation de l’Électricité et du Gaz (CREG) annonçait une baisse de 20% des prix des nouveaux contrats par rapport au mois d’octobre. Et cette semaine, les prix de l’électricité flambent. Quel impact ces fluctuations de prix ont-elles sur la facture du consommateur ?
Ces derniers jours, le prix de l’électricité a dépassé les 400 euros le MWh en Belgique, avec des pics le soir avoisinant les 600 euros. Le froid et une faible production des énergies renouvelables ont fait doubler le prix de l’électricité par rapport aux dernières semaines. S’ajoute à cela la France qui importe pas mal d’électricité, plusieurs de ses réacteurs nucléaires étant en maintenance ou à l’arrêt.
Responsable communication à la FEBEG (Fédération Belge des Entreprises Electriques et Gazières) Stéphane Bocqué, explique que le prix de l’électricité ne dépend pas uniquement de la météo, loin de là. Avant d’être produite, transportée et livrée chez un client final, l’électricité fait l’objet d’un marché entre professionnels du secteur, tels les producteurs, fournisseurs et traders en électricité.
Plusieurs marchés d’électricité
« Les prix varient à chaque instant: la cotation de l’électricité se fait sur plusieurs marchés différents. Il y a des marchés à très court terme, à court terme, à moyen terme, et à long terme », déclare Stéphane Bocqué. Il y ainsi le Day Ahead Market qui désigne la négociation d’électricité pour le lendemain. « La plupart des fournisseurs sont ce qu’eux-mêmes appellent des gestionnaires d’équilibre, et s’ils ne le sont pas, ils sont adossés à une entreprise qui fait cette gestion d’équilibre pour eux. A chaque instant, le fournisseur doit en effet être en équilibre, avec ce que ses clients vont consommer, à chaque quart d’heure. Si cet équilibre n’est pas présent, il y a des frais de déséquilibre, une sorte d’amende », explique Stéphane Bocqué.
Il y a aussi le marché Intraday où les prix sont négociés jusqu’à une heure avant la livraison. « Ce marché est forcément très sensible à tous les éléments qui peuvent changer rapidement ou qui ne se comportent pas exactement comme prévu. Ces gestionnaires d’équilibre achètent aussi en fonction de l’évolution prévisible de leur portefeuille, avec les pertes, les gains de clients », ajoute le responsable en communication.
Plus de demande en hiver qu’en été
Là-dessus, d’autres inconnues peuvent se greffer, comme la météo, même si l’électricité est moins sensible aux températures que le gaz. « La courbe de demande d’électricité révèle qu’il y a plus de demande en hiver qu’en été. C’est normal, d’abord parce que les journées sont plus courtes, donc il y a plus d’éclairage même si ce n’est pas le plus important. Il y a aussi plus de demande pour la circulation de l’eau chaude, et il y a aussi une partie des gens qui se chauffent directement à l’électricité. Plus il fait froid, plus il y a de consommation d’électricité, ceci dit, la Belgique est moins thermosensible du point de vue électricité que nos voisins français où il y a énormément de gens qui chauffent à l’électricité, beaucoup plus qu’en Belgique ».
D’autres facteurs peuvent également influencer les prix, tels que des problèmes de maintenance. « Un facteur de maintenance est un problème temporaire, ou d’indisponibilité non annoncée, c’est un facteur typiquement très court terme. Par contre, si demain il y a un problème sur une interconnexion internationale due à une situation politique, géopolitique ou même technique, c’est un problème à plus long terme, car ce ne sera pas résolu en deux temps trois mouvements. Cela impactera les prix à court terme, puisque vous ne disposerez plus de cette infrastructure, mais cela va aussi influencer les prix à long terme, car les opérateurs vont se dire que le problème sera résolu dans deux ou trois mois, et les prix à deux ou trois mois vont grimper alors que les prix à six mois seront moins influencés ».
Il y a donc toute une foule de paramètres aux horizons temporels différents qui exercent une influence sur les cours de l’électricité: géopolitiques, internationaux, interconnexion, l’état du parc nucléaire français, etc. « A l’heure actuelle, il y a une volatilité relativement exceptionnelle, et le marché est très sensible à toute annonce dans un sens comme dans l’autre. Très rapidement, cela crée des amplitudes assez importantes. Après, il faut être bien conscient que la plupart des fournisseurs et des gestionnaires d’équilibre sont positionnés sur des marchés à moyen et à long terme », souligne Stéphane Bocqué.
Selon lui, la seule chose qui change par rapport à la donne normale, « c’est que nous sommes dans une situation de guerre économique, et que par conséquent les marchés sont beaucoup plus tendus. Dans un environnement normal, cela changerait quelque chose au prix, mais pas dans les proportions que l’on connaît maintenant. Ce qui est surtout important, c’est que les prix sont structurellement élevés, et surtout que la volatilité est extrêmement importante ».
Impact pour le client final
Il précise que le client final paiera une moyenne moyennée. « Les factures arrivent au bout d’un an de consommation, et là il y a deux composantes qui jouent un rôle : les kilowattheures directement influencés par ces éléments de température et puis la composante tarif déterminée par les circonstances du marché qui pour le moment, ne sont pas vraiment bonnes« .
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