Tinne Van der Straeten et Alexander De Croo
Tinne Van der Straeten et Alexander De Croo n'ont pas mis un terme aux débats sur l'énergie nucléaire. © Belga

La Vivaldi mise sur les SMR: que sont ces petits réacteurs nucléaires amenés à remplacer les grandes centrales?

Christophe Leroy Journaliste au Vif
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Si la question des SMR divise encore au sein du gouvernement, la Belgique a rejoint un consortium international et investi 100 millions d’euros pour ces petits réacteurs nucléaires. Suffisant pour compenser l’arrêt des grandes centrales ?

Ce mercredi, le cabinet du Premier ministre a annoncé que la Belgique entrera dans un consortium international constitué pour développer les SMR (Small Modular Reactors – petits réacteurs modulaires). Le gouvernement a décidé l’an dernier d’investir 100 millions d’euros dans la recherche et le développement de cette technologie nucléaire, considérée comme plus sûre et moins productrice de déchets. Même si le sujet demeure controversé au sein de la majorité Vivaldi, les SMR devraient faire partie du mix énergétique futur de la Belgique. La construction d’un réacteur à petite échelle à Mol (province d’Anvers) est attendue autour de 2035-40.

Les SMR, ces petits réacteurs nucléaires qui feront partie du mix énergétique belge

Toujours basés sur la fission, ces SMR, d’une capacité d’environ 300 mégawatts, présentent quatre avantages par rapport aux grandes centrales. Un: «Même dans le cas d’un SMR de seconde génération, utilisant la même technologie que nos centrales actuelles, sa sécurité passive est plus grande, précise Thomas Pardoen, professeur à l’UCLouvain et président du comité consultatif scientifique du centre de recherche nucléaire de Mol (SCK-CEN). Elle est inhérente au réacteur. Puisqu’il est plus petit, il se refroidit d’autant mieux.»

« Les SMR réduiront d’un facteur 100 la quantité de déchets »

Thomas Pardoen (UCLouvain)

Deux: la capacité pilotable d’un SMR lui conférerait une flexibilité particulièrement compatible avec l’intermittence des énergies renouvelables. Trois: ces petits réacteurs peuvent aussi fonctionner comme une unité de cogénération, produisant non seulement de l’électricité, mais aussi de la chaleur à différents niveaux de températures. «Enfin, les versions utilisant des neutrons rapides pourront épuiser le combustible presque cent fois mieux et diviser dès lors d’un facteur 100 la quantité de déchets», poursuit l’expert. Ces dernières versions ne seront toutefois pas opérationnelles avant 2045.

La Belgique peut-elle se passer du nucléaire?

Peu coutumière des analyses énergétiques prospectives et chiffrées, encore moins des politiques de planification permettant d’honorer ses objectifs (y compris de production renouvelable), la Belgique n’a jamais envisagé un quelconque scénario associant renouvelable et nucléaire, d’autant que sa loi de 2003 proscrit encore cette hypothèse. L’ année dernière, l’institut flamand EnergyVille a toutefois comparé trois pistes énergétiques d’ici à 2050: un scénario dit «central», intégrant un large éventail de filières et d’options technologiques (électrification, efficacité énergétique, hydrogène, capture du carbone…), un scénario «molécules propres», principalement axé sur l’import de carburants de synthèse comme l’hydrogène vert, et un scénario «électrification», combinant essentiellement un vaste parc éolien offshore (16 gigawatts en mer du Nord) et la mise en fonction de plusieurs SMR sur le territoire belge. Verdict: ce dernier apparaît comme le moins onéreux des trois pour réduire au maximum les émissions de gaz à effets de serre à cette échéance.

D’après le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), tous les scénarios susceptibles de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré par rapport à l’ère préindustrielle incluent un accroissement de la part du nucléaire dans la consommation d’énergie primaire. Sachant que la Belgique sera encore très loin de l’objectif 100% renouvelable dans les deux prochaines décennies, peut-elle encore se permettre d’évincer l’hypothèse d’un apport substantiel du nucléaire au-delà de 2035? C’est l’une des questions opposant partisans et détracteurs de la filière. Car, techniquement, il est concevable d’envisager la mise en fonction de SMR de seconde génération à cette échéance. «Ceux-là seront disponibles dès 2030, précise Thomas Pardoen. A l’heure actuelle, plus de 70 options sont en développement sur la planète. On aura sans doute des surprises, et de bonnes surprises. Avec l’espoir que leur coût diminue, notamment grâce à leur standardisation – en faire plus avec les mêmes pièces.»

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