Nucléaire: le duel à distance entre De Croo et Nollet, par sommet interposé
Le Premier ministre Alexander De Croo a rappelé l’importance du nucléaire à l’entame d’un sommet mondial consacré à cette source d’énergie, à Bruxelles. Dans le même temps, le coprésident d’Ecolo Jean-Marc Nollet a martelé que l’atome faisait partie du passé.
Une trentaine de chefs d’Etat et de gouvernement se sont réunis jeudi à Bruxelles, sur le plateau du Heysel, pour un sommet dédié au nucléaire. L’objectif de cette grand-messe internationale, première du genre, était de consacrer la place de cette source d’énergie dans la stratégie en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre et garantir la sécurité énergétique.
« L’énergie nucléaire fait partie de la solution pour parvenir à des émissions nettes nulles d’ici 2050″, a déclaré le Premier ministre belge Alexander De Croo, hôte de ce sommet. À titre personnel, il s’est d’ailleurs prononcé pour une prolongation de 20 ans de la durée de vie des réacteurs belges de Doel 4 et de Tihange 3, au lieu de la prolongation de 10 ans décidée par le gouvernement actuel.
« Le nucléaire est une forme d’énergie durable »
Pour atteindre les objectifs climatiques de l’Europe, M. De Croo estime que l’énergie nucléaire doit être pleinement déployée. À cette fin, il faudra bousculer l’opposition entre les énergies renouvelables et le nucléaire, car les deux seront nécessaires pour parvenir à des émissions nettes nulles d’ici 2050, selon le premier ministre. Le nucléaire constitue une forme d' »énergie durable » disponible en « quantités énormes, sûres et fiables », avance-t-il.
Ce message a été souligné par Rafael Grossi, directeur général de l’AIEA. M. Grossi a notamment évoqué la crise énergétique et les nombreuses tensions dans le monde pour expliquer pourquoi le tout premier sommet sur l’énergie nucléaire n’a lieu qu’aujourd’hui. L’énergie nucléaire représente actuellement un quart des énergies renouvelables dans le monde, et la moitié en Europe, a indiqué M. Grossi. « Mais il faut faire plus. Il ne s’agit pas d’un concours de beauté, mais d’un combat dans lequel toutes les sources d’énergie disponibles et exemptes de CO2 doivent être utilisées pour se libérer du carbone le plus rapidement possible ».
Nollet maintient: pour Ecolo, l’atome est du passé
Le nucléaire est une source d’énergie du passé et n’est pas une solution à la crise climatique, a répété jeudi Ecolo. « L’organisation de ce sommet ne change rien à la ligne pragmatique des écologistes. Pour eux, le nucléaire n’est pas une solution à la crise climatique: trop cher, trop dangereux, trop polluant et trop peu flexible cette source d’énergie relève du passé », a déclaré le parti.
Le co-président des Verts francophones, Jean-Marc Nollet, était présent dans la matinée au contre-sommet organisé non loin de là par des associations. « La Belgique peut sereinement se tourner vers l’avenir et choisir un des scénarios qui conduit le pays et l’Europe à un mix énergétique 100 % renouvelable à l’horizon 2050 : c’est faisable, moins cher et beaucoup moins aventureux », a souligné celui-ci.
Ecolo et Groen ont commandé une étude au consortium universitaire Energyville sur le mix énergétique futur qui permettra à la Belgique de tenir ses objectifs climatiques. L’un des scénarios, privilégié par les Verts, permet de se passer du nucléaire.
Une étude l’affirme: décarboner l’Europe peut se faire sans le nucléaire
Un nouveau rapport de la coalition d’ONG European Environmental Bureau (EEB) estime que l’Europe peut se passer de l’atome pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2040. « La construction de nouvelles centrales nucléaires reste une stratégie de décarbonation irréaliste au regard des coûts élevés et des longs délais de construction », affirme l’EEB dans ce rapport, publié jeudi.
Selon la coalition, qui représente quelque 180 ONG, le parc nucléaire existant peut être progressivement supprimé parallèlement aux combustibles fossiles si les pays de l’UE adoptent « un système énergétique plus efficace, alimenté par les énergies renouvelables et soutenu par des options de flexibilité ».
S’appuyant sur un scénario compatible avec l’Accord de Paris, visant 100% d’énergies renouvelables d’ici 2040, l’EEB table sur un déploiement rapide des énergies renouvelables, une forte réduction de la demande d’énergie, portée par des mesures d’efficacité, une gestion optimisée de la demande et des options de flexibilité (comme le stockage d’énergie ou l’interconnexion transfrontalière des réseaux), simultanément à l’électrification des processus qui dépendent actuellement des combustibles fossiles.