Gaza est détruite au-delà de toute nécessité militaire. © GETTY IMAGES

7-Octobre, un an après: l’Occident en accusation

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

«Le consentement à l’écrasement de Gaza» par Israël de la part des Etats occidentaux restera-t-il comme une honte en regard de l’ordre moral du monde?

La violence, la disproportion et l’indifférence au sort des civils de la réponse israélienne au massacre du 7-Octobre posent légitimement des questions. Elles sont portées, parfois de façon radicale, par Didier Fassin, professeur au Collège de France, dans Une étrange défaite et par l’historien et professeur à l’université Cornell, aux Etats-Unis, Enzo Traverso, dans Gaza devant l’histoire. Elles visent, bien sûr, le gouvernement israélien, mais aussi les dirigeants des pays occidentaux, à l’indifférence coupable.

«Le consentement à l’écrasement de Gaza a créé une immense béance dans l’ordre moral du monde», assène ainsi Didier Fassin, qui estime qu’il «laissera une trace indélébile dans la mémoire des sociétés qui en seront comptables». Le blanc-seing accordé au Premier ministre Benjamin Netanyahou et à son ministre de la Défense, Yoav Gallant, pour punir collectivement les Gazaouis, au nom de l’horreur du massacre du Hamas et du droit d’Israël à se défendre, est d’autant plus choquant, pour l’auteur, que la Cour internationale de justice a demandé à Israël, en janvier 2024, de «prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide», preuve que le risque existe. «Le paradoxe est […] que cette abdication morale des Etats a été justifiée au nom de la morale même», ajoute Didier Fassin, faisant référence à la responsabilité historique des pays européens à l’égard des Juifs après l’Holocauste.

«La destruction de Gaza est l’aboutissement d’un long processus d’oppression et de déracinement.»

C’est pourquoi le professeur au Collège de France estime que «l’acquiescement à la guerre à Gaza et à ses conséquences rend pour longtemps illégitime et inopérante l’invocation des droits humains et de la raison humanitaire par celles et ceux qui ont participé à cette abdication morale» et que l’image d’Israël sera durablement et profondément dégradée par cette guerre.

Enzo Traverso en donne sa vision, tout aussi dévastatrice pour le crédit de l’Etat hébreu: «La bande de Gaza, territoire habité par 2,4 millions de personnes soumises à une ségrégation totale depuis douze ans, est donc devenue le berceau du mal, où des assassins sans scrupules agissent en toute impunité, transformant les civils en « boucliers humains ». La réalité, c’est que la destruction de Gaza est l’aboutissement d’un long processus d’oppression et de déracinement.» Lui aussi questionne l’Occident pour ce «permis de tuer» accordé aux soldats israéliens et pour cette indifférence face à «une destruction unilatérale, continue, inexorable». Le double standard appliqué à l’Ukraine et à la Palestine «suscite l’incompréhension et l’indignation de la planète entière», rappelle Enzo Traverso. L’Occident s’en remettra-t-il?

© DR

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