Autoriser les enfants à voter, un devoir démocratique? © Getty Images

Et si on donnait le droit de vote aux enfants? Pourquoi ceci n’est pas une blague

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Professeure en sciences de l’éducation, Clémentine Beauvais voit dans l’octroi du vote dès la naissance une manière de renforcer la démocratie et de responsabiliser les adultes.

«C’est une blague?» Quand elle a expliqué à des amis qu’elle travaillait sur un essai Pour le droit de vote dès la naissance, Clémentine Beauvais, professeure en sciences de l’éducation à l’université de York, au Royaume-Uni, et autrice de livres jeunesse, s’est heurtée à un mur d’incrédulité à peine brisé par l’interrogation: «Mais tu crois vraiment qu’il faut le faire, ou c’est juste une expérience de pensée?» Ce n’est pas qu’une expérience intellectuelle.

«Les bébés, enfants, adolescents ont de très nombreuses compétences que les adultes n’ont plus.»

Clémentine Beauvais répond à l’inconvénient directement brandi par les incrédules, celui du manque de compétences des enfants. «Les bébés, enfants, adolescents ont aussi de très nombreuses compétences cognitives, émotionnelles, physiques, sociales, etc., que les adultes n’ont plus.» Et puis, «en risques pour la démocratie, la possibilité d’un électorat incompétent qui « voterait mal » (NDLR: qui vaut aussi pour un électeur adulte) ne peut être mise sur le même plan que l’exclusion réelle d’une large partie de la population de cet accès basique à la représentation». Tout juste, l’autrice admet-elle que des modalités particulières, comme un système de procuration aux parents pour les nouveau-nés, devraient être prévues jusqu’à ce que l’enfant décide de son propre chef de vouloir voter. Autre inconvénient à prendre en compte, l’électeur doit être «mis en capacité de prendre de la distance sur [sa] propre expérience pour la comprendre, et pour appliquer cette compréhension à des décisions futures». Une tâche plus difficile pour un enfant que pour un adulte. Clémentine Beauvais croit pouvoir y remédier par «une éducation politique véritablement populaire».

Cette solution ébauche tous les avantages que l’autrice voit à donner le droit de vote dès la naissance: «Réorienter l’intérêt médiatique et public vers les mesures qui protègent les enfants», réduire les facteurs d’angoisse des «mineurs qui subissent les conséquences de mesures politiques prises par les adultes», notamment en matière de lutte contre le dérèglement climatique, et donc «rendre la démocratie plus forte». «Envisager le droit de vote dès la naissance implique de se poser mille questions audacieuses, radicales, surprenantes, sur ce qu’est la démocratie et ce qu’elle pourrait être», juge Clémentine Beauvais. Un bon moyen de revivifier notre démocratie en manque de souffle?

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