80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz: les derniers témoignages oraux de la Shoah
Quatre-vingts ans après la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau, des survivantes témoignent de l’horreur. Pour ne pas oublier.
Le 27 janvier 2025 est commémoré le 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau. Les survivants en mesure de témoigner des souffrances subies et de la mort administrée à plus d’un million de personnes dans ce centre d’extermination des Juifs mis en place par l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale sont de plus en plus rares. Le cinéaste et écrivain David Teboul a rassemblé «quatre des toutes dernières survivantes françaises d’Auschwitz» pour recueillir leur récit et le partager à travers un documentaire pour France Télévisions et un livre intitulé Les Filles de Birkenau.
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Elles ont toutes plus de 95 ans, mais ont la mémoire vive de leur déportation dans le camp d’extermination, parfois entrecoupée par des séjours dans des camps de travail et de concentration. Isabelle Choko, née à Lodz (Pologne) en 1928, se rappelle le conseil transmis en polonais par «un homme qui n’était pas de notre convoi» à son arrivée à Auschwitz: «Attention fillette, au bout du quai, il y a une sélection. […] A gauche, c’est la vie. A droite, c’est la mort. Va à gauche, n’oublie pas!» Ginette Kolinka, née à Paris en 1925, regrettera toute sa vie d’avoir, au même endroit, recommandé à son père, affaibli, et à son frère de monter dans les camions de transport qui allaient les conduire directement vers les chambres à gaz…
«Il faut parler de ces mères qui ont emmené sans le savoir leurs enfants dans les chambres à gaz.»
Les jeunes filles avaient eu des échos des persécutions infligées aux Juifs par le régime nazi. Elles ne pensaient pas, même après avoir vécu un transfert en train dans des conditions particulièrement inhumaines, qu’il pourrait en arriver à «assassiner des gens de cette façon». Aussi, il n’y a pour Judith Elkán-Hervé, née en Transylvanie roumaine en 1926, qu’un seul devoir aujourd’hui: «Ce n’est pas de nos souffrances qu’il faut parler, ce n’est pas de notre faim, de notre froid ou de nos poux. Il faut parler de ces mères qui ont emmené sans le savoir leurs enfants dans les chambres à gaz (NDLR: confiés à des grands-parents, les enfants pouvaient survivre, ainsi que leurs mères). Il faut s’imaginer ces femmes au moment où elles ont compris où elles arrivaient.»
La mémoire de l’horreur de l’Holocauste fait dire à Isabelle Choko qu’elle ne comprend pas que l’on compare les atrocités contemporaines à la Shoah. «Cette action méthodique sur la longue durée pour supprimer les êtres humains en les considérant comme moins que des animaux, cela ne se compare pas.» Un précieux rappel.
Les Filles de Birkenau, récits recueillis par David Teboul, Les Arènes, 272 p.Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici