Série (2/10) | D’où vient l’expression « avoir le cafard »?
Les expressions et les métaphores animalières comme « avoir le cafard » ont toujours existé dans la langue française. Leurs origines sont parfois troubles, mais elles ont souvent bien des choses à apprendre sur notre histoire.
Les expressions mettant en scène des animaux étoffent, depuis toujours, la langue française. D’abord car, depuis qu’il existe, l’humain vit au contact d’animaux. Ceux-ci lui ont donc servi de source d’inspiration pour illustrer ses propos, comme bien d’autres choses dans son entourage. Tantôt de manière évidente, tantôt de manière plus alambiquée, avec des expressions dont le cheminement a été long et valloné. Quid d' »avoir le cafard » ?
Signification : être déprimé
Pour mieux comprendre sa signification, il faut d’abord remonter à l’origine du mot « cafard ». Celui-ci vient de l’arabe « kafir », désignant les non-croyants. Au XVIème siècle en France, c’est dans ce sens que le mot « cafard » était utilisé. Le sens qu’on lui connait aujourd’hui semble dériver du rapprochement entre l’insecte et ces incroyants, faux dévots se cachant dans l’obscurité et les recoins sales et sombres des maisons, d’où la piètre image du cafard que l’on connaît. C’est Charles Baudelaire qui a popularisé cette analogie entre l’insecte et la déprime dans la langue courante, dans son poème La destruction, issu du recueil Les Fleurs du mal.
Parfois il prend, sachant mon grand amour de l’Art,
La forme de la plus séduisante des femmes,
Et, sous de spécieux prétextes de cafard,
Accoutume ma lèvre à des philtres infâmes.
Il me conduit ainsi, loin du regard de Dieu,
Haletant et brisé de fatigue, au milieu
Des plaines de l’Ennui, profondes et désertes,
(…)
Dans cet extrait, on peut encore percevoir cette dimension de non-croyance qu’avait le mot à son origine. Baudelaire était visiblement un expert lexical. C’est d’ailleurs à lui qu’est attribuée l’invention du spleen.
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