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Annie Ernaux : «J’espère avoir vengé ma race» (entretien)

Presque un an après le Nobel de littérature, Annie Ernaux reprend sereinement ses esprits. Elle est surtout folle de joie de retrouver le temps d’écrire. On peut le dire après cet entretien : l’autrice est aujourd’hui une femme heureuse.

«Pour vivre heureux, vivons caché.» Si le proverbe dit vrai, Annie Ernaux est la femme la plus heureuse de la galaxie littéraire. A 40 kilomètres du tumultueux monde littéraire parisien, l’écrivaine fraîchement nobélisée a élu Cergy-Pontoise comme Terre promise. Une banlieue discrète de fraîche date et sans histoire. Annie Ernaux vit ici depuis près de cinquante ans. Elle nous accueille dans son petit royaume d’où éclatent les fiévreux orages d’encre contre la bourgeoisie et les classes dominantes. Elle est à l’image de sa maison, spacieuse et élégante, mais étrangement modeste et nue et qui trahit quelque chose de l’origine sociale populaire de cette transfuge de classe. Le salon, sobre et dépouillé, n’est occupé que par quelques meubles simples, une sobre table au milieu et une bibliothèque qui fourmille de «Pléiades».

L’écriture est comme une sorte de rachat.

Quand elle ouvre la porte, l’insolente souplesse de sa silhouette qui défie son âge civil saute aux yeux. Annie Ernaux a 82 ans. Et toutes ses dents. L’envie de mordre aux fesses des puissants et des dominants plus ardente que jamais. On se délecte de la voir parler, distinctement et avec douceur, mais à toute allure, ponctuant ses longues phrases par de mélodieux éclats de rire, de ses sujets de prédilection: la littérature, la politique, le féminisme, l’amour, le désir et, bien entendu, le Graal qu’elle a décroché, le prix Nobel de littérature.

Presque un an après l’apothéose, Annie Ernaux reprend sereinement ses esprits. Elle est surtout folle de joie de retrouver le temps d’écrire après une tournée mondiale qui n’a cessé de s’étirer. On la retrouve en librairie dès cette rentrée littéraire avec une édition augmentée de son remarqué L’Autre Fille (1). On peut le dire: Annie Ernaux est aujourd’hui une femme heureuse.

Cela fait presque un an que vous avez été lauréate du prix Nobel de littérature. Comment votre vie a-t-elle changé depuis?

Non, cela fait neuf mois (rires).

Pourquoi ce souci de la précision?

Parce que la durée de neuf mois me fait penser à plusieurs choses. Neuf mois, c’est une grossesse (rires). En l’occurrence, il ne s’agit pas de cela. Mais si on reprend la métaphore de la grossesse, disons que ce prix a substantiellement «grossi» mes droits d’auteur. En neuf mois, ils ont explosé. Ils étaient déjà importants, mais le Nobel les a projetés dans une autre dimension.

En plus des droits d’auteur, le Nobel c’est aussi un prix de 900 000 euros…

C’est énorme, c’est vrai, mais au fond, tout est relatif. Regardez, par exemple, la cagnotte pour le policier qui a tué le jeune Nahel. Ils ont récolté pour lui plus de 1 600 000 euros en quelques jours. En plus, sincèrement, je ne sais pas quoi en faire. D’ailleurs, je n’en ai rien fait. Je n’ai absolument rien changé. J’ai gardé la même maison, la même voiture, une vieille Polo qui a plus de 15 ans. Vous l’avez vue devant la porte, elle est très bien (rires). Disons que – même si c’est un peu indécent de le dire – je donne davantage. Je fais plus de cadeaux à mes enfants et petits-enfants. Mais je ne me suis pas sentie riche d’un coup, même si cela m’a fait un peu bizarre, c’est comme si j’avais gagné à la loterie.

Jamais l’autrice française n’avait songé recevoir un jour le Prix Nobel: «C’est un peu comme si j’avais gagné à la loterie.»
Jamais l’autrice française n’avait songé recevoir un jour le Prix Nobel: «C’est un peu comme si j’avais gagné à la loterie.» © getty images

Aviez-vous toujours eu le rêve de gagner cette distinction littéraire?

Absolument pas. Je n’en avais jamais eu le désir – mais vraiment pas. Un jour, quand je serai morte, on lira mon journal intime et on verra que je n’ai jamais songé à cette récompense. Quand mon nom avait commencé à circuler comme favori au Nobel, je n’y ai pas cru dans un premier temps. Ensuite, la rumeur est devenue de plus en plus crédible. A ce moment-là: panique totale! Je me suis dit, mon Dieu, on va m’empêcher d’écrire. Hélas, c’est ce qui s’est réellement produit: cela fait neuf mois que je ne peux pas écrire. Mais il est vrai que je ne voulais pas y croire au début. J’étais dans le déni.

On ne vous a pas appelée en amont de l’annonce pour vous prévenir?

Si, mais je ne décrochais pas le téléphone (rires). Je ne le faisais pas car l’année précédente on m’avait fait une plaisanterie, une sorte de canular téléphonique, où l’on a essayé de me faire croire que j’étais lauréate. L’année suivante, je me suis dit on ne va pas me la faire deux fois. Jusqu’à ce que j’entende mon nom à la radio. A ce moment là, j’ai eu un sentiment de saut dans le vide. Je ne savais pas ce qui allait m’arriver. La seule chose que je savais était que je devais assurer et assumer. En même temps, je savais que je laissais derrière moi quelqu’un qui n’avait pas le Nobel. Mon «moi» d’avant.

Il y a désormais deux Annie Ernaux? Comment vivez-vous cette drôle de schizophrénie?

Oui, il y a eu une scission. Maintenant, je suis en train de recoller tout cela, de réconcilier les deux. Le plus dur, c’est qu’on me prend mon temps d’écrire.

Vous dites que vous n’aviez jamais eu le désir de gagner ce prix. Mais aviez-vous eu la tentation de le refuser, comme l’avait fait Sartre en 1964?

Franchement, non. J’aurais peut-être pu le faire pour les mêmes raisons que Sartre, d’ailleurs. Mais finalement, je n’ai pas ses raisons. En général, j’accepte ce qui m’arrive. C’est un principe de vie. Beaucoup de choses sont arrivées dans ma vie. J’ai plutôt l’impression que c’est écrit. On pourrait juger cela absurde, voire aux antipodes de la théorie de la liberté de Sartre. Mais là, je vous parle d’un sentiment. Le mien. La deuxième raison pour laquelle je n’ai à aucun moment songé à refuser ce prix, c’est que l’intention du prix Nobel est noble. Il s’agit de mettre en avant des idéaux. Alfred Nobel le dit très bien d’ailleurs, il s’agit de mettre au devant de la scène des personnes qui ont œuvré pour le bien de l’humanité. Cet aspect des choses, je ne le récuse pas.

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Pour vous, ce fut l’occasion de jeter la lumière sur les causes qui vous sont chères: la condition des classes populaires, le féminisme, etc.?

Absolument. Cette consécration est l’occasion de parler des «classes laborieuses» – je préfère la formule «classes dominées» – et du féminisme. Ce sont précisément ces deux volets de mon œuvre qui ont été mis en avant par le Nobel. J’ai reçu des lettres et des retours de la part de plusieurs lecteurs qui m’ont confirmé la même chose. Ils étaient contents parce que, d’une certaine manière, ils avaient l’impression qu’ils avaient, eux aussi, reçu le Nobel. C’est quelque chose qui me bouleverse.

Avec le prix Nobel, ajouté aux précédentes distinctions institutionnelles que vous avez reçues, ne craignez-vous pas que votre œuvre, subversive et même scandaleuse à une époque, soit récupérée et, d’une certaine manière, «domestiquée»?

De toute façon, ce sont les dominants qui choisissent les œuvres à consacrer et qui ont consacré la mienne. C’est un fait, il faut composer avec. Il ne faut pas oublier que ce sont les éditions Gallimard qui ont lancé ma carrière d’écrivaine en publiant mon premier roman, Les Armoires vides, qui était vraiment, je peux vous le dire, subversif. J’y ai raconté mon avortement. Il est paru en 1974. Il faut bien se figurer ce que cela représentait à l’époque. C’était juste avant la loi Veil dépénalisant l’avortement. Cela dit, je pense que les lecteurs sont, en général, capables de faire la part des choses. Est-ce que le fait que mes livres soient étudiés, notamment en classes préparatoires, neutralise la dimension subversive de mon œuvre dont vous parlez? Je ne le crois pas. On peut même supposer le contraire. Certes, statistiquement, peu de fils d’ouvriers intègrent les classes préparatoires. Mais à travers un livre comme Les Années, les élèves ont accès à un regard différent sur toute l’histoire de France. Ils y ont accès d’un point de vue différent, celui d’une femme d’origine populaire, avec l’essentiel des tensions et phénomènes sociaux qui traversent notre société encore aujourd’hui.

Peut-on dire à présent que «vous avez vengé votre race» comme vous en manifestiez le désir toute jeune dans votre journal intime?

J’ai passé ma vie à écrire, et cette phrase m’a toujours travaillée. Je l’avais inscrite dans mon journal intime quand j’avais 22 ans: «J’écrirai pour venger ma race.» Aujourd’hui, on me reproche beaucoup cette phrase parce que la race n’existe pas. Elle m’a été inspirée par Rimbaud, dans Une saison en enfer, qui écrit: «Je suis de race inférieure de toute éternité.» J’ai été bouleversée quand je l’ai découverte pour la première fois à 22 ans.

En effet, on vous l’a beaucoup reprochée. Pourquoi justement parlez-vous de «race» et pas de «classe», tout simplement?

Je l’emploie dans un sens symbolique et imagé: c’est un mot plus puissant que celui de «classe». A l’époque j’étais étudiante en faculté de lettres. Je me retrouvais parmi des élèves issus de la bourgeoise. J’ai vite senti une hétérogénéité totale par rapport à eux. Il y avait d’une part, eux, les étudiants, les bourgeois, et d’autre part, un «moi» ou un nous – les dominés. Je pensais naïvement, à l’époque, qu’écrire me permettrait de «venger ma race». Aujourd’hui que j’ai le Nobel, je ne sais pas si j’ai vengé ma race. Je l’espère.

On retrouve souvent chez les transfuges de classe une sorte d’amour-haine à l’égard de leur classe sociale d’origine. Peut-on dire que vous cherchiez aussi à «vous venger de votre race»?

A bien réfléchir, je ne vois pas de haine, mais de la révolte et de l’accablement, «pourquoi sont-ils comme ça?». Puis il y a le désir de ne pas leur ressembler, de sortir de mon milieu d’origine. Ce qui se produit par les études. C’est la raison pour laquelle j’emploie souvent le mot «trahison». Le sentiment de traîtrise vient de cette échappée en solitaire. Et l’écriture est comme une sorte de rachat.

Le prix Nobel vous dote, pour le dire comme Pierre Bourdieu, sociologue que vous admirez, d’un «capital symbolique» considérable. Comment comptez-vous le dépenser? Pour quelles causes comptez-vous le mobiliser?

Depuis que j’ai reçu le prix on me demande de m’engager pour plusieurs causes. Mais je reste fidèle à mes engagements de toujours, à savoir mes engagements féministes, en participant, par exemple, au capital du nouveau magazine féministe La Déferlante, et puis évidemment mes engagements politiques et écologiques – aux yeux du pouvoir en place, je suis certainement identifiée comme «écoterroriste» (rires).

Selon vous, quel est l’aspect de votre œuvre qui a été consacré: votre style d’écriture? Vos engagements politiques? Votre itinéraire de transfuge de classe?

Je pense que le choix a été très difficile pour le jury. En tant qu’écrivaine, c’est d’abord l’écriture et le style qu’on consacre. C’est une constance pour le prix Nobel. Cela dit, mon écriture est intimement liée à mes engagements politiques. Donc forcément, les deux aspects ont été pris en compte. N’en déplaise au public qui m’est hostile et qui a voulu voir dans cette consécration strictement une récompense politique ou le couronnement de mes engagements politiques.

S’agissant de votre style littéraire, il fait l’objet de beaucoup de controverses. Vous-même, vous revendiquez une «écriture plate». De quoi s’agit-il?

Non, je ne le revendique pas.

Si, vous le dites dans La Place

J’emploie cette formule uniquement dans ce livre. Il s’agit d’un mot d’ordre stylistique et esthétique valable uniquement pour ce livre. Je n’avais pas d’autres choix de mots. Je voulais tout simplement dire que j’allais prendre les faits comme critère et fil conducteur. Les faits et rien que les faits. Or, il se trouve que le mot «factuel» n’existait pas à l’époque. Le mot ne deviendra courant qu’une dizaine d’années plus tard. «Ecriture plate» voulait tout simplement dire une écriture des faits, par opposition aux métaphores, aux comparaisons, mais aussi à l’expression des émotions et sentiments. Je m’y tenais à la description des choses. Or, la formule «écriture plate» a été détournée par mes détracteurs dans un sens péjoratif. Si on prend, par exemple, Mémoire de fille ou Les Années, on cherchera en vain une «écriture plate» dans le sens où ils l’entendent, c’est-à-dire un style qui serait «pauvre». Ma préoccupation fondamentale en tant qu’écrivaine est de trouver des mots pour cerner exactement la réalité. Mon écriture est une écriture du réel.

L’Autre Fille (édition augmentée), par Annie Ernaux, Gallimard, 112 pages.
L’Autre Fille (édition augmentée), par Annie Ernaux, Gallimard, 112 pages. © National

Vos romans portent sur votre expérience vécue et personnelle. En quoi vos récits ouvrent-ils sur l’universel, qui reste, en définitive, la vocation première de la littérature?

A vrai dire, je me méfie de cette notion d’«universel». Je préfère plutôt parler d’écriture «trans-personnelle». Je veux dire par là que ce que j’écris passe de moi aux autres. C’est mon principal désir quand j’écris. A la fin de L’Evénement, je note que le but de ma vie est peut-être que mon corps, mes sensations et mes pensées deviennent de l’écriture, mon existence dissoute dans la vie des autres.

Que ce soit dans vos romans, particulièrement les derniers, ou dans le film documentaire que vous avez coréalisé avec votre fils David, Les Années Super 8, vous semblez avoir une obsession de la mémoire et une peur de l’oubli.

En effet. Mais c’est quelque chose qui est venu assez tard dans ma vie. Dans la jeunesse, je n’avais pas ce souci de mémoire. Il m’est venu quand j’ai atteint la quarantaine, précisément au moment où j’ai organisé la liberté de ma vie.

A quel moment avez-vous retrouvé cette liberté?

Lors de la séparation d’avec mon mari. Je me suis sentie libérée. C’était libérateur mais très difficile. Il faut se figurer le contexte à l’époque: c’était le mariage pré-Mai 68. C’était le mariage pour la vie. Le divorce était très mal perçu et condamné socialement. Il était interdit moralement. Heureusement, nous avions déménagé en région parisienne. Si nous ne l’avions pas fait, le poids des regards des autres en province aurait été plus pesant sur nous. Dans ma nouvelle vie après le divorce, la question du temps et de la mémoire s’est violemment imposée à moi. Avant cela, ma seule obsession était ma vie qui n’allait pas bien et ma seule préoccupation était de faire qu’elle aille mieux.

D’ailleurs, dans le film, encore mariée et jeune trentenaire, on vous sent un peu mal dans votre peau, solitaire dans votre tête, un peu perdue…

Cela est dû à mon désir d’écrire que j’avais à l’époque mais que je n’arrivais pas à satisfaire à cause des multiples occupations domestiques. Alors, certes, on voit que j’avais deux enfants, une belle maison – de fonction, de mon mari – , j’étais professeure de lettres, etc. mais malgré cela, tout n’allait pas bien. Quand mon père meurt brutalement en 1967, j’ai 26 ans. Sa disparition fait ressurgir mon enfance, tout me revient à l’esprit, c’est le retour violent du refoulé social avec le désir de comprendre. Donc d’écrire.

A ce moment, avez-vous renoué avec votre classe d’origine, avez-vous opéré un «retour», comme dirait votre ami le sociologue Didier Eribon?

A la différence de Didier, je n’ai jamais coupé les liens. J’allais souvent voir mes parents. Ma mère est venue vivre avec nous, avec mon mari et mes enfants. Le fait d’écrire sera ma manière d’opérer un «retour». C’est la raison pour laquelle j’écrivais en secret, car ce que j’écrivais était tellement violent que je ne pouvais en parler ni à mon mari ni à ma mère. Comme je vous le disais il y a un instant, c’est lors de la mort de mon père que ma mémoire sociale a ressurgi.

A propos de la mort: dans le film, vous prononcez cette phrase: «Il ne faut pas penser à la vieillesse et à la mort sous peine de désespérer.» Vous vous appliquez ce mot d’ordre?

Lorsque ma mère meurt, j’ai vécu également comme une déchirure dans le temps. C’est comme si je me rendais compte qu’il y avait quelque chose d’irrémédiable. Sa mort m’a fait vieillir même si je n’avais que 45 ans. J’ai commencé à penser à ma propre vieillesse et à ma propre mort. C’est peut-être là l’origine des Années. Aujourd’hui, à 82 ans, vieillesse et mort sont des évidences qui me sont sans cesse rappelées, par la diminution de mes forces et la disparition de contemporains.

Vous êtes d’habitude discrète sur ces sujets. On connaît bien vos opinions politiques mais peu vos conceptions philosophiques et vos convictions spirituelles.

J’ai été élevée dans la tradition catholique à laquelle j’ai complètement adhéré jusqu’à mes 15 ans. Je l’ai même pratiquée jusqu’à ce que je quitte le foyer familial, parce que ma mère m’aurait fait une de ces scènes si jamais j’avais manqué la messe. Mais dès mes 15 ans, j’ai pris mes distances: par exemple, je ne voulais pas me marier à l’église. Aussi, on a caché, mon mari et moi, à nos familles respectives, qu’on n’a pas baptisé notre fils aîné. Ça, c’est pour les pratiques. S’agissant de la croyance, c’est autre chose. Mon sentiment profond, c’est qu’il n’y a rien après la mort. Et en même temps, je n’en sais rien. Je dirais que je suis plus agnostique qu’athée. Il persiste toujours en moi le désir qu’il y ait une autre vie. Mais je sais bien que l’autre vie, ce sont mes livres. Et mes enfants. Ils représentent à mes yeux la vie continuée, je les ai mis dans la chaîne humaine. Au fond, je crois avoir un solide amour de la vie, malgré tout ce qui s’y passe de triste et de révoltant. La vie est formidable pour plein de raisons: l’amour, la musique, le partage, l’amitié, la littérature…, n’est-ce pas?

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Vous avez toujours été amoureuse?

C’est vrai que je l’ai souvent été.

A vous lire (on songe à Passion simple, par exemple), et à vous entendre, on dirait que vous tombez facilement amoureuse.

Ça dépend. Disons que c’est une question de moment. J’ai ressenti ce sentiment très jeune. Je crois que mon premier souvenir remonte à 1944. Il y avait des soldats anglais qui buvaient dans le petit bistrot tenu par mes parents. J’étais sur les genoux de ma mère et je n’ai pas arrêté de regarder un jeune soldat anglais qui m’a beaucoup plu (rires).

Que vous inspire l’amour en 2023, à l’ère de Tinder et des réseaux sociaux?

C’est très difficile pour moi de me prononcer. Cela ne m’a jamais concernée. Les sites de rencontre existent, sous d’autres formes que celles d’aujourd’hui, depuis un certain temps déjà. Mais ils ne m’ont jamais attirée. Je suis une romantique. Je crois à la rencontre réelle ou même à l’échange épistolaire. Pas à la virtualité des sites de rencontre.

Bio express

1940

Naissance, le 1er septembre, à Lillebonne, en Normandie.

1971

Agrégation de lettres modernes.

1974

Publie son premier roman, Les Armoires vides (Gallimard), récit de son attente d’avortement.

1984

Lauréate du prix Renaudot pour La Place.

2022

Coréalise avec son fils, David Ernaux-Briot, le film Les Années Super 8.

2022

Lauréate du prix Nobel de littérature.

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