Pierre Havaux
Vent du Nord de Pierre Havaux: La Flandre hypermédaillée aux JO réclame un juste retour de ses performances dans les choix du Comité Olympique Belge
Le regard tourné vers les JO d’été de Paris en 2024, la Flandre a faim de médailles. Sa politique sportive, centrée sur le soutien aux performances de ses athlètes de haut niveau, lui permet de surclasser les compétiteurs francophones au palmarès que décroche la Belgique dans les compétitions internationales. Ben Weyts (N-VA), ministre des Sports, veut que les dividendes de cette réussite flamande soient désormais prises à leur juste valeur par le Comité Olympique Belge chargé de sélectionner les élites sportives nationales.
Et à la fin, c’est quasi toujours la Flandre qui gagne. Les chiffres ne mentent pas et Ben Weyts (N-VA) est un ministre flamand des Sports qui sait compter: six des sept médailles et 23 des 26 Top 8 décrochés par la Belgique aux JO d’été de Tokyo de 2021 étaient «made in Vlaanderen», les deux médailles et les six diplômes olympiques belges récoltés aux JO d’hiver de Pékin en 2022 dégageaient une saveur bien flamande. Une telle forme olympique autorise Ben Weyts à bomber le torse, à faire jouer ses muscles et à laisser toute modestie au vestiaire. «Nous, en Flandre, sommes le moteur des succès sportifs au plus haut niveau.» C’est là qu’est l’os: si sur les podiums, le noir-jaune-rouge reste de rigueur sur les maillots, si c’est la Brabançonne qui retentit lorsque le drapeau tricolore grimpe au mât, c’est sans faire dans la nuance et relever que c’est la Flandre qui s’y taille la part du lion.
Mais voilà que s’annoncent les JO de Paris en 2024. La Flandre y aura toujours aussi faim de médailles, assure Ben Weyts, impatiente qu’elle sera de montrer sur la piste et dans les salles la redoutable efficacité de sa politique sportive orientée résultats. Gloire aux 68 athlètes de haut niveau actuellement sous contrat chez Sport Vlaanderen, rémunérés en conséquence à condition de figurer dans le Top 3 d’une compétition européenne ou dans le Top 8 d’un championnat du monde ou de Jeux olympiques.
Tout miser sur les cracks, choyer le haut du panier, tel est le prix à payer pour attirer l’attention médiatique sur des performances sportives. La Flandre attend un retour sur ses 28 millions d’euros investis cette année dans une formule qui n’a jamais autant gagné ni surclassé les compétiteurs sous pavillon wallon. Question de choix et de philosophie, assumée en novembre dernier par Valérie Glatigny (MR), ministre des Sports à la Fédération Wallonie-Bruxelles, lors d’une conférence de presse en compagnie de son homologue flamand depuis le lieu de stage des athlètes belges en Turquie. «Nous n’investissons pas dans des médailles mais dans du capital humain. Notre objectif est d’offrir un soutien global aux athlètes.» Traduction un peu brutale par Ben Weyts: une «poedersuikerbeleid» ou l’art de saupoudrer les moyens dégagés (onze millions côté wallon) sur toutes les disciplines afin de ne mécontenter personne.
Chacun son couloir sauf que la Flandre qui joue pour la gagne creuse l’écart. Alors Ben Weyts s’irrite que cette belle échappée ne se reflète pas dans le visage que montre le Comité olympique et interfédéral belge, sélectionneur des élites sportives belges à envoyer aux JO. Le palmarès flamand sous le bras, le ministre presse ses instances dirigeantes d’ouvrir enfin les yeux et d’entrer dans la Belgique du XXIe siècle où le sport est avant tout une affaire flamande et francophone. De sortir de leur archaïsme en rompant avec une parité linguistique qui ne serait plus de mise. Bref, d’accorder à la Flandre un mot à dire qui vaille son pesant de médailles. Vae victis.
Pierre Havaux est journaliste au Vif.
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