Pierre Havaux
Vent du Nord de Pierre Havaux: eux, ils sont tous des Puigdemont (chronique)
Mercredi 10 mars à l’ordre du jour du parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, aucune question d’actualité sur l’immunité levée de Puigdemont. Du côté flamand, la séance plénière commence par des questions sur « la levée de l’immunité parlementaire de trois eurodéputés catalans ». Deux démocraties?
Mercredi 10 mars, après-midi, le parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles siège en séance plénière, attaque ses traditionnelles questions d’actualité par « l’embrasement au Sénégal ». Pas un traître mot, pas la manifestation d’un état d’âme, rien qui vienne évoquer pour s’en émouvoir la levée, décidée la veille par le Parlement européen, de l’immunité parlementaire de trois eurodéputés catalans dans le collimateur de la justice espagnole pour activisme indépendantiste. Un trio d’ex-ministres en danger? Un dénommé Puigdemont, ancien président de la Généralité de Catalogne, dans les ennuis? Qui ça, où ça, comment ça? Désolé, connais pas. Pierre-Yves Jeholet (MR), ministre-président de l’espace francophone, est dispensé d’avoir à touiller dans la popote interne à l’Espagne. C’est toujours ça de pris.
Cela me fait penser aux ru0026#xE9;gimes dictatoriauxu0022, ose Jan Jambon.
Mercredi 10 mars, après-midi, le parlement flamand se réunit en séance plénière, entame ses classiques questions d’actualité par « la levée de l’immunité parlementaire de trois eurodéputés catalans ». C’est la moindre des choses quand on a à son actif deux résolutions votées en faveur de la fin de la répression politique et de la désescalade. Et ça y va fort. La N-VA est naturellement remontée. Comment se taire, comment passer sous silence ce qui vient de se jouer au coeur de l’Union européenne, cette Union « qui fait la leçon à la Russie quand le chef de l’opposition Navalny est mis en cellule, fait la leçon aux régimes dictatoriaux du Moyen-Orient, mais qui se tait lorsque cela se passe dans son arrière-cour », s’indigne le député Karl Vanlouwe.
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Invité à prendre attitude, Jan Jambon se pose en ministre-président tiraillé. Entre son coeur de nationaliste flamand qui saigne abondamment et sa stature de chef de gouvernement (N-VA – CD&V – Open VLD) qui le contraint à prendre de la hauteur et lui interdit de porter un jugement sur une décision du Parlement européen. Mais comment ne pas descendre dans l’arène espagnole, ne pas constater ce qui s’y trame, ne pas s’alarmer du retour brutal à un régime d’incarcération strict pour les prisonniers catalans, sitôt le vote du Parlement européen acté? « Cela défie toute représentation d’un Etat de droit démocratique, cela me fait penser aux régimes dictatoriaux », ose Jan Jambon.
Nationalistes/séparatistes ou pas, de la gauche radicale à l’extrême droite, c’est à l’unisson que l’assistance parlementaire communie dans le chagrin et l’inquiétude. Le sort réservé aux élus catalans ne laisse personne indifférent. Chaque parlementaire (y compris du CD&V et de l’Open VLD, qui se sont abstenus au Parlement européen) choisit ses mots pour exprimer une réprobation, un regret, l’espoir d’un apaisement. Karl Vanlouwe clôture le choeur des lamentations par une pensée émue pour Carles Puigdemont et un renvoi possible au pays: « Au cours de l’histoire, tous les ministres-présidents ont fui, ont été emprisonnés et pour certains même, assassinés. Réfléchissons bien à ce qui se passera en Espagne s’il venait à être livré. »
Le parlement flamand a pris le deuil, l’assemblée francophone n’a pas versé une larme. Chacun ses causes, ses émois. Chacun sa route, chacun son chemin. Deux démocraties?
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