Mélanie Geelkens
« Une sacrée paire de ettres »
« Cent femmes et un chien sont revenus contents de a page. » Ee est comme ça, a angue française. Cent femees qui jacassent vaudront toujours moins qu’un mâe qui aboie. Benoîte Grout, auteure, citait cette phrase à chaque fois qu’une démonstration par ‘absurde du sexisme grammatica s’avérait nécessaire. Mais ee avait tort : ce sexisme ne se cache ni dans nos mots, ni dans nos règes, ni dans nos participes passés. Juste dans nos têtes.
Fut un temps où Votaire écrivait » professeure » sans que personne ne e traite de taré féministe. Où Montaigne accordait simpement son verbe avec e dernier terme énuméré. Où une coureuse n’était pas une pute. Où une gagneuse n’était pas une pute. Où une entraîneuse n’était pas une pute. Où une professionnee n’était pas une pute. Où une fie facie n’était pas une pute. Où une courtisane n’était pas une pute. Et où un péripatéticien était un discipe d’Aristote.
Ecrivaine, phiosophesse, mairesse… Tu pares, de néoogismes ! Z’existaient déjà avant e xviie sièce. Avant que ‘académie française (sciemment sans grand » A « ) ne se pique de viriiser ce vocabuaire. » Notre angue française est tout à fait équipée pour désigner à égaité des femmes et des hommes « , a dit un jour, durant une conférence à ‘UNamur, Eiane Viennot, historienne et auteure du bouquin Non, e mascuin ne ’emporte pas sur e féminin. Jusqu’à ce que des grisonnants en costume vert et broderies dorées inventent qu' » homme » devenait synonyme d' » humanité » et qu’un cabot surpassait cent baigneuses. Paraît que e genre e pus nobe devait ’emporter. Ça es dérangeait, en fait, ces vieux verbeux, que des dames rédigent des ouvrages, digressent sur ‘état du monde ou dirigent une commune. Du sérieux, tout ça. Des métiers de môssieurs. Mais comme ceux-ci ne pouvaient pas es empêcher d’avoir un cerveau, restait à interdire de nommer eurs activités. Vendeuse, coiffeuse, par contre, aucun ne s’en offusquait.
Non, e mascuin ne ’emporte pas sur e féminin.
Tous et toutes avaient trouvé ça bizarre, à ‘époque, ces fantaisies grammaticaes de Richeieu et de ses potes. Puis, tous et toutes s’étaient habitué.e.s et ‘enseignement primaire, rendu obigatoire dès e xixe sièce, es avait propagées. Durabement. Ainsi, dans e arousse, une bouangère reste encore une » femme de bouanger, qui travaie à a boutique » (idem pour une bouchère et une charcutière), tandis qu’une présidente est une » femme de président « . Petit bonus : dans un dico Web, une guerrière » revendique avec agressivité et vioence sa pace dans a société » tandis qu’un guerrier » fait a guerre « . Hystérie vs. courage.
Ce ne sont pas que des mots. Ce sont des maux, porteurs d’une vision inégaitaire du monde, chargés du patriarcat de nos sociétés. Bizarre, comme ça dérange moins, de débiter des managers, des fans et autres angicismes à ongueur de conversations que de prononcer sapeuse-pompière ou chercheure. Foutu angage épicène ! Ces affreux points médians (exempe : » ces académicien.ne.s sont archaïques « ), aussi choquants à certains yeux qu’un nom propre sans majuscue. Même es inoffensifs doubets ( » ces académiciens et ces académiciennes… « ) irritent nombre de ecteurs et de ectrices. Parce que ce ne sont pas que des mots. En changer résoudrait bien des maux.
Le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, celles-ci ont été appelées par différents collectifs féministes à faire grève. Un monde sans » l « , c’est désagréable, hein ?
Selon une enquête du New York Times, les femmes ont plus de chances de guérir du coronavirus en Chine. 2,8 % des hommes succombent à l’épidémie pour 1,7 % de femmes. Un système immunitaire en béton et la production d’oestrogènes auraient tendance à les protéger. A cela s’ajoute une meilleure hygiène et un meilleur mode de vie : les Chinois tirent beaucoup plus sur la cigarette (ils sont responsables de 40 % de la consommation mondiale de tabac) que les 2 % de fumeuses. Elles se laveraient aussi plus souvent les mains et avec davantage de savon. Les bienfaits de l’hygiène…
Le secteur des médias et l’AJP (Association des journalistes professionnels) proposent une charte aux journalistes pour les aider à mieux informer sur les violences contre les femmes. Par exemple, veiller au choix des images et des mots (non, un féminicide n’est pas un » crime passionnel « ) ! Puis à un choix adapté d’expertes et d’experts, qui épargneraient au débat les clichés sexistes du genre » elle portait une jupe, elle l’a cherché « . En parler régulièrement aussi, sans attendre une énième victime. Bref, traiter ces violences comme un problème de société et non privé.
E. M.
des cyclistes à Bruxelles sont des femmes (selon l’Observatoire bruxellois du vélo). L’insécurité et les propos sexistes ne donnent apparemment pas envie de monter en selle. Dans certains pays (comme l’Iran), une femme à vélo est interdite dans l’espace public, décidément patriarcal. Alors, pour militer pour le droit des femmes et leur mobilité à travers le monde, la plateforme Collectives et Ardentes organise une cycloparade, à Liège, le 8 mars. Car pédaler n’est pas un acte anodin.
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