Dirk De Block, tête de liste PTB à Molenbeek, espère être le premier bourgmestre communiste de Belgique.
Dirk De Block, tête de liste PTB à Molenbeek, espère être le premier bourgmestre communiste de Belgique. © Sofia Touhami

Un premier bourgmestre PTB à Molenbeek ? Pourquoi les marxistes visent cette commune bruxelloise

Dirk De Block, tête de liste du PTB à Molenbeek, ne se contente plus de viser une majorité avec les socialistes. Le marxiste veut contrer les plans du PS, qu’il suspecte de préparer une coalition miroir avec les libéraux.

Sur les fenêtres du restaurant où le rendez-vous est donné, parvis Saint-Jean-Baptiste à Molenbeek, sont placardées des affiches du Parti Socialiste, comme dans beaucoup d’autres commerces de la commune, d’ailleurs. Le MR est, lui aussi, bien présent sur les façades molenbeekoises à moins d’un mois du scrutin communal. C’est à cette domination politique «vieille de 30 ans» que Dirk De Block, tête de liste du PTB molenbeekois, veut mettre fin. L’ancien président du PTB en région bruxelloise fait un pas de plus que son président national Raoul Hedebouw dans ses déclarations et vise ni plus ni moins que le maïorat. Le spectre d’un bourgmestre communiste, une première en Belgique, plane sur Molenbeek. «Les gens veulent un vrai changement. Et nous, on veut changer les plans de certains socialistes qui veulent faire une coalition miroir avec le MR.» Contactée, Catherine Moureaux (PS) dément.

Résultats détaillés (2024)

A l’analyse des résultats du 9 juin, le scénario semble plutôt plausible. Aux élections fédérales, le PTB était le premier parti de la commune avec 26,2% des voix, soit 0,7% de plus que les socialistes. A la région, ils étaient au coude-à-coude à 32,8% pour le PS, 32,7% pour le PTB (qui enregistrait un bond de 12% par rapport au scrutin de 2019). Aux européennes, les marxistes se démarquent nettement, avec 34,2% des voix contre 25%.

Ceci dit, il n’y a pas qu’à Molenbeek que le PTB a performé en région bruxelloise. A Saint-Gilles, Anderlecht ou Forest, le parti est sorti premier, et il talonnait son adversaire socialiste à Schaerbeek et Bruxelles-Ville également. «On n’exclut de majorités nulle part, assure Giovanni Bordonaro, l’actuel président du PTB en région bruxelloise. Dans certaines communes, on est plus préparé et donc on met le paquet.»

L’ambition des marxistes pour Molenbeek est à mettre en contexte, note le politologue de l’ULB, Romain Biesemans. «Le PS et Catherine Moureaux (NDLR: la bourgmestre socialiste sortante) sont dans une position assez inconfortable. Il y a beaucoup de tensions internes, l’absence de Jamal Ikazban porte un coup car c’est un gros faiseur de voix. Il est probable que le PS soit deuxième.» Ce n’est pas pour autant que le PTB sera premier, ajoute-t-il, en raison notamment de la présence la liste Fouad Ahidar qui grignotera des électeurs aux deux partis de gauche. De son côté, le MR (dont l’ancienne bourgmestre Françoise Schepmans pousse la liste) s’est renforcé également à tous les niveaux de pouvoir le 9 juin dernier, et l’arrivée de Michaël Vossaert sera à prendre en compte.

«Ce ne sera pas le miracle socialiste»

Voilà pour la théorie. En pratique, comment Dirk De Block compte-t-il appliquer le programme très social du PTB alors que les échelons régional et fédéral ont pris un virage à droite il y a quatre mois à peine, et que les flux financiers des régions et du fédéral vers les communes risquent de diminuer ? «On voit, au niveau fédéral, des mesures qui pourraient compter 16 millions en plus pour une commune avec la limitation des allocations de chômage. Le communal sera le niveau de résistance contre des politiques d’austérité. C’est important que les gens puissent compter sur leur majorité pour les défendre. Il y a aussi des mesures que l’on peut mener à l’échelle communale.» Le marxiste entend par là la mise à disposition des parkings des entreprises à disposition du public la nuit et les week-end, l’homogénéisation des taxes de bureau ou encore la diminution des cabinets échevinaux au profit de l’administration.

Le communal sera le niveau de résistance contre des politiques d’austérité.

Dirk De Block, candidat-bourgmestre PTB à Molenbeek.

Pour le politologue Romain Biesemans, la tâche ne sera pas si aisée. «Aujourd’hui, on lit que le PTB veut une politique de rupture au niveau local. Même avec le gouvernement bruxellois sortant composé du PS, d’Ecolo et de Défi côté francophone, je ne suis pas certain qu’elle aurait été si facile à appliquer.»

«Ce ne sera pas le miracle socialiste», reconnaît Giovanni Bordonaro. Cette première participation à un exécutif dans une ville de 100.000 habitants constitue-t-elle donc un crash test pour un parti dont la non-participation au pouvoir est une critique récurrente ? «On fera des erreurs, on ne réalisera pas 100% de ce que l’on a envie de faire. Par contre, les gens verront que l’on aura tout fait pour», ajoute Dirk De Block. Le PTB n’a donc pas grand chose à perdre, analyse Romain Biesemans. «D’un coup, il gagnerait en légitimité. Ca enverrait aux formations politiques qui ne considèrent pas le PTB comme un parti normal un signal très, très fort.»

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