Luc Delfosse
Travailler jusqu’à 67, 72 ou 88 ans…Oui mais pour qui et pour quoi faire?
Bosser jusqu’à 67 ans? Ok ! ok ! ok les technocrates aux mines d’enterrement! On sent bien que, entre la quête budgétaire effrénée du gouvernement, une troisième amnistie fiscale… unique et le refinancement multimilliardaire de banques aux comportements de joueurs compulsifs, l’affaire sera bientôt dans le sac au même titre que la fin du saut à l’élastique de l’index.
A titre tout à fait personnel -et de laudateur de l’âge prétendument blet (1)-, je suis peut-être prêt à me plier à ce nouveau théorème édicté, comme c’est farceur, par des quadras vibrionnants et de prétendus sages qui concurrencent allègrement Mathusalem. J’ai dit : peut-être… Car j’aimerais d’abord faire remarquer à ces nouveaux millénaristes que le drame n’est pas que la moitié de la population a déjà plus de 50 ans et que l’on ne sait plus, dès lors, comment financer la Sécu. Le drame, chères élites nées dirait-on ce matin, est que voilà grosso modo…. 50 ans que l’on sait pertinemment que l’on va droit dans le mur. Et que rien, si ce n’est peut-être la création d’un récent « Fonds de vieillissement » au pactole si convoité, n’a été fait à titre préventif (2).
Rien d’humainement essentiel, veux-je dire. Car enfin, sans tomber dans le gâtisme le plus réactionnaire, prenons, pour une fois, la question à l’endroit : travailler jusqu’à 66, 72 ou… 88 ans soit mais pour faire quoi au juste? Pour compenser l’imprévoyance, l’aveuglement ou le clientélisme des politiques ? Ceux-là même qui vous traiteraient de fous si vous preniez vos invalides sans avoir prévu une poire pour vos vieilles soifs ? C’est hors de question !
Mais à la vérité, il est de toute façon insensé et pour tout dire intolérable d’envisager l’allongement du temps de travail sans initier une réflexion sur l’aménagement du temps de chacun en fonction des âges de la vie, des forces, des compétences, des savoirs accumulés, des (petits) enfants à faire pousser, des énergies, des solidarités du moment, des habiletés physiques….
La vie, messieurs les grands comptables, est d’abord une succession de paliers où l’on fabrique, on crée, on voyage, on peine, on apprend on rêve, on souffre, on aime, on investit, on dépense et on déconne -mais oui !- différemment. Elle n’est pas une piste cyclable hollandaise, pas un parcours avec chien d’aveugle, pas un aller simple pour la tombe, pas une soumission, pas un tableau excel.
Ah ! nous l’entendons bien que nous sommes au bord de la catastrophe… Nous n’entendons hélas ni les regrets pour vos amnésies empilées ni les remèdes mobilisateurs. Au fond, votre « projet » est de nous user, de nous laisser décatir (avec ou sans Rolex) et puis de nous laisser clamser le plus vite possible au nom du bien commun.
Luc Delfosse (1950- ?)
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