Luc Delfosse
Tirons au sort le président du PS !
Tirer au sort, parmi la population, une bonne trentaine de sénateurs ? L’idée ma foi est excellente comme le chantait Brassens. Mais l’initiative « personnelle » de Laurette Onkelinx qui l’a évidemment testée auprès du président à vie du Parti socialiste et de son aréopage, est-elle réellement de nature à revigorer une démocratie défaillante – pour ne pas dire à bout de souffle – et à ramener un tantinet de confiance dans la chose publique?
Ou s’agit-il de l’un de ces gadgets de rentrée qu’affectionne la classe politique qui ne sait plus trop comment relancer l’attention, capter la sympathie déliquescente du quidam à son égard et montrer qu’elle est parfois préoccupée par d’autres combats que celui de sa propre survie?
C’est entendu, la « vie citoyenne , pour reprendre la belle expression de Théo Hachez, par laquelle s’amorcent et s’infléchissent les débats », ne passe plus nécessairement par les partis politiques. On notera au passage que les Belges n’ont pas attendu que leurs « représentants » s’ébrouent avec l’inertie, la frilosité et l’orgueil qu’on leur connaît pour se mobiliser, se fédérer, débattre, réfléchir et proposer, depuis des mois, au sein de plusieurs plateformes et collectifs « civils » dont l’appétit démocratique, la qualité, la force de proposition et l’indignation ravigotent.
N’ergotons pas sur la méthode proposée qui pose mille questions. Mais pourquoi diable, Madame, le Sénat ? Oh bien sûr, la dernière réforme de l’Etat a bouleversé la vieille Chambre haute qui, comme le graillonnait ce vieux farfadet d’Egdar Faure, n’était chez nous aussi que « litanie, liturgie et léthargie ». Elle est désormais un lieu de rencontres entre les différents parlements régionaux et communautaires qui y délèguent leurs représentants pour débattre avant tout – n’ergotons pas – des questions institutionnelles. Le voilà le hic : en quoi le fait de parachuter une poignée de particuliers dans cette assemblée éminemment, terriblement lourdement, « technique » pour ne pas dire carrément « poildecuteuse », serait-il de nature à créer une nouvelle dynamique démocratique ? .
S’il s’agit, Madame, de permettre aux citoyens lambdas de se réapproprier l’espace politique, c’est évidemment à la base et non au sommet du triangle du pouvoir qu’il faut agir. Pour commencer. Un tirage au sort dans les conseils communaux, les CPAS et les parlements régionaux serait autrement utile, ravigotant et pour tout dire infiniment plus efficace et novateur. Ce ne sont pas des citoyens-sénateurs dont la démocratie a le plus urgent besoin, mais de créateurs, de stimulateurs, de boosteurs politiques dès ces premiers échelons.
La désignation par tirage au sort du président du PS m’apparaîtrait comme une idée aimable et formidablement excitante
Et, tant qu’à faire, on ne saurait trop recommander aux partis et singulièrement au PS, de roder ce système tonifiant et roboratif dans ses propres instances dirigeantes ces directoires de cooptés où quelques individus confisquent avec l’appétit de Gargantua le pouvoir pendant des décennies, campant sur des mandats qu’ils semblent détenir de droit quasi divin et brûlant la moitié de leur belle énergie à ne pas en perdre une miette. Et, puisqu’il est d’excellente qualité, Madame, poussons le bouchon au mieux et plus loin : à défaut d’une réduction drastique du nombre et de la durée des mandats (sans aucune esquive !), la désignation par tirage au sort du président du PS m’apparaîtrait comme une idée aimable et formidablement excitante.
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