Tinne, prostituée par son mari: « Va chercher de l’argent au distributeur »
Tinne, 39 ans, a été prostituée par son mari, un homme beaucoup plus âgé qu’elle qui, même aujourd’hui alors qu’ils sont séparés, continue à la harceler. Voici son histoire, à lire dans le cadre de notre dossier spécial « Assez » publié à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, de 25 novembre.
Il était une des connaissances de sa mère et il lui a demandé de faire du baby-sitting. Elle avait de bons contacts avec son fils, âgé de 3 ans. Au final, elle partagera sa vie durant dix-huit ans. Ils ont construit une maison de leurs propres mains, ont eu un enfant, ont acheté une seconde résidence à l’étranger et ont rêvé d’ouvrir un bed and breakfast. Mais elle a dû apprendre à vivre avec ses colères. Il avait un avis sur tout, détestait la moitié du monde et se montrait méprisant, surtout envers elle.
En même temps, il fallait gagner de l’argent. Surtout elle. Il perdait un emploi après l’autre et il a fini par ne plus travailler. En plus de son travail, Tine faisait des « petits jobs » le soir. Cela a commencé par une formation en maquillage et de la danse dans une discothèque, pour se terminer par des massages et des services sexuels au domicile d’inconnus. Son corps était son pays conquis. Il disait qu’il trouvait cela excitant. Elle se sentait toute petite. Mais la seule chose qui comptait, c’était l’argent. « Va chercher de l’argent au distributeur« , lui demandait-il souvent en riant. C’était censé être un compliment.
Tine se sentait seule, elle travaillait sans relâche. Elle n’avait jamais le temps de s’arrêter pour faire le point et décider de ce qu’elle voulait faire. Elle a fini complètement épuisée et a perdu le contrôle. Au fur et à mesure que la consommation d’alcool de son compagnon augmentait, leur relation se détériorait. Il la raillait et la tourmentait de plus en plus souvent. La voir craquer lui procurait du plaisir. Fille d’un père décédé d’une cirrhose du foie, Tine savait ce dont l’alcool est capable. Mais c’était un sujet tabou.
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Pendant dix-huit mois, elle a essayé de le quitter. « Tu as vu ? C’est ça, ta mère. Elle t’abandonne, lançait-il souvent à leur fils. Nos projets d’avenir, une vie agréable à l’étranger, elle fout tout en l’air. » Des mots assassins qui l’ont fait revenir plusieurs fois. Un jour, elle n’est pas rentrée.
Trois ans après, le harcèlement continue
Cela fait aujourd’hui un peu plus de trois ans que Tine a son propre appartement. Elle ne fait plus de « petits jobs ». Plus jamais. Elle l’a quitté, mais continue à le craindre. L’homme la harcèle toujours, casse tout ce qu’elle a laissé chez lui, fait traîner la procédure judiciaire. Mais elle ne se laisse plus faire et sa nouvelle vie commence à prendre forme. Elle fait du sport, envisage d’entamer une formation et espère trouver un nouvel emploi.
Leur garçon de 8 ans passe la moitié du temps chez elle. Tine fait de son mieux, et la situation s’améliore. Mais certaines nuits, le doute la tient éveillée. « Tu n’es pas une bonne mère« , s’assène-t-elle. Cela se produit de moins en moins souvent, mais lorsque cela arrive, c’est toujours lorsque l’enfant vient chez elle, après avoir passé une semaine chez son père. Parfois, il ne veut pas dormir. Avec une persistance qui continue à étonner Tine, le gamin reproduit envers sa mère ce qu’il a vu.
Colères, moqueries, humiliations. Tine essaie de faire profil bas, mais tous deux savent ce qui les attend. Les mises en garde deviennent des menaces, le ton monte. Il est allongé, à plat ventre sur ses genoux, et pendant que cela arrive, elle est saisie d’horreur. Les coups se terminent dans une grande tristesse. Ses larmes, son réconfort. Et finalement, l’enfant accepte d’aller se coucher.
Durant les jours qui suivent, la scène se répète dans sa tête. Tine est malade de honte et de déception. Les choses doivent changer. Elles vont changer. Elle est en train de refermer ce chapitre. Work in progress.
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