Carte blanche
TECs : faire rouler les bus plutôt qu’agiter les symboles
Le Gouvernement wallon MR/CDH souhaite marquer les esprits en ne diminuant plus seulement le nombre d’administrateurs des TEC ou en étudiant un scénario de fusion réfléchie des sociétés du Groupe, mais en opérant à la hussarde une fusion des 6 sociétés du Groupe TEC dans un calendrier qui tient davantage compte d’impératifs électoraux que d’une gestion performante.
Ces décisions matamoresques, prises sans concertation avec les cadres et travailleurs du groupe, sans prendre en compte les conclusions de l’audit réalisé par un consultant professionnel à la demande du précédent Gouvernement wallon et malgré un courrier de mise en garde du conseil d’administration de la SRWT unanime, vont-elles améliorer l’efficacité de l’entreprise ? Vont-elles permettre d’offrir aux utilisateurs des TEC une offre de bus plus performante, qui corresponde mieux à leurs besoins et attentes ? Va-t-elle contribuer à ce que la Wallonie apporte sa contribution à une meilleure mobilité plus verte et aux enjeux climatiques qui sont aujourd’hui la première préoccupation des citoyen.ne.s ?
Rien ne l’indique. Et rien n’indique non plus que ce soit la véritable intention du Gouvernement wallon.
Le groupe TEC et ses 5.000 travailleurs ne sont pas opposés à l’évolution de leur entreprise, mais ils souhaitent légitimement être entendus à propos d’un projet de fusion dont ils ne connaissent actuellement pas les tenants et aboutissants. Le changement sera réalisé efficacement s’il est réfléchi et fondé sur la participation, l’expérience et l’expertise, des personnes concernées.
Une chose est certaine toutefois : ce n’est pas le temps passé durant les prochaines années à digérer une fusion improvisée de structures, imposée d’en haut plutôt que construite avec les parties prenantes, qui remettra l’usager au centre de l’action des TEC.
La mission prioritaire du ministre de la Mobilité et du Groupe TEC, c’est améliorer l’offre de transport, de la faire mieux coller aux besoins réels des citoyens et de rendre ce service fiable. Cette fiabilité passe bien sûr par une réduction du nombre de jours de grève. En ce sens, le travail réalisé ces dernières années grâce à l’amélioration du dialogue social a largement porté ses fruits puisque le nombre de grèves liées spécifiquement au TEC a fortement diminué.
C’est cette expérience positive qu’il faut poursuivre et amplifier avant de se précipiter dans des réformes aussi sensibles qu’une fusion improvisée des entités de l’entreprise et un hypothétique service minimum. C’est d’autant plus nécessaire s’agissant d’un projet de service minimum plus symbolique qu’effectivement opérationnel et décrié même par l’administrateur général du Groupe. Il sera, on le sait, très difficile à mettre en oeuvre sur le terrain pour des raisons de sécurité et de priorisation : qui choisira-t-on de transporter et dans quelles conditions de sécurité ?
Comment le Gouvernement peut-il prendre des décisions aussi importantes pour l’avenir de la plus importante entreprise publique régionale sans avoir sollicité du Groupe la moindre note sur la faisabilité de ce service minimum ni avoir organisé l’audition des acteurs concernés pour nourrir un débat public ?
Le changement dans une entreprise doit poursuivre des objectifs précis, objectivables et s’appuyer sur l’adhésion de ses forces vives. Ce qui n’est clairement pas le cas ici. Et au-delà du risque d’inefficacité et d’échec, la stratégie du coup de force du Gouvernement wallon entraîne les TEC dans une logique de fuite en avant conflictuelle dont les usagers des bus sont les premières victimes.
« Remettre l’usager au centre » disions-nous. A nos yeux, la cohérence avec ce slogan nécessite de revoir les priorités politiques :
Le Gouvernement wallon doit respecter les termes du contrat de service public et ses modalités financières. Or, depuis 2014, la dotation annuelle du TEC a été diminuée de 5 %, puis de 8 %, puis de 10 %. Ainsi, en 2017, la Cour des comptes a estimé le « définancement » des TEC à 39 millions €. Comment déployer l’offre de bus dans ces conditions ?
Le plan réseau 2020 ambitionnait une meilleure adaptation de l’offre aux attentes des citoyens. Ce travail a été mis en veilleuse par le ministre au profit d’une approche basée sur la recherche permanente de petites et grandes économies. Il s’agit de le remettre d’urgence en chantier plutôt que de monopoliser le temps et l’énergie disponibles en interne pour réaliser à la hussarde une fusion juridique du Groupe qui pourrait se réaliser progressivement.
Toutes les possibilités de concertation sociale doivent être activées pour moderniser l’entreprise, la rendre plus efficace et performante, en impliquant les cadres et les travailleurs dans l’optique d’un objectif commun : offrir aux habitants de Wallonie une offre de transport adaptée, performante et fiable.
L’agitation de symboles idéologiques et les exercices de musculation stériles des uns et des autres entraînent aujourd’hui une escalade de la tension qui nous mène dans l’impasse et dont la facture sera in fine envoyée aux usagers. Il est temps que cela cesse. Notre volonté est que le TEC soit toujours davantage un outil au service d’une mobilité durable, de la lutte contre les embouteillages et pour la préservation du climat plutôt que l’otage de bras de fer politiques.
Nous appelons le ministre et les organisations syndicales à s’engager résolument dans un dialogue respectueux et constructif, pour le bien de l’entreprise TEC et, plus fondamentalement, des citoyens wallons.
Christina Dewart et Julien Vandeburie
Administrateurs Ecolo à la SRWT
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