Les propositions pour les pensions font réagir: « Lalieux veut faire payer plus à ceux qui travaillent ou donnent du travail »
Les propositions de la ministre des Pensions Karine Lalieux sont sous le feu des critiques.
La ministre fédérale des Pensions, Karine Lalieux, a avancé ses propositions pour corriger certains aspects de la réforme des pensions approuvée en juillet dernier. Parmi elles, une sanction pour les entreprises qui n’emploieraient pas assez de travailleurs âgés en fonction de la moyenne du secteur d’activité. De proposition vivement critiquée.
Selon la Fédération des Entreprises de Belgique (FEB), « cela n’a aucun sens de faire des prépensions, des crédits-temps de fin de carrière… quasiment un droit mais, de l’autre côté, de sanctionner les entreprises si elles emploient trop peu de gens ». « On engagera un travailleur de plus de 60 ans qui, quelques mois plus tard, recourra à un système de retraite anticipée, et on sera sanctionné », a analysé l’administrateur-délégué de la fédération patronale, Pieter Timmermans, sur les ondes de Radio 1. À ses yeux, il faut coupler le débat sur les fins de carrière au débat sur la réforme des pensions. « La solution se trouve dans une approche globale, où tous les systèmes de départ anticipé sont revus et où un lien est fait entre un départ anticipé et le fait de travailler plus longtemps », a-t-il ajouté.
La fédération flamande des entrepreneurs, Unizo, abonde dans le même sens. « Le défi de maintenir plus longtemps les plus de 60 ans sur le marché du travail demande une politique intersectorielle et de stimulation, pas un système d’amende », réagit l’administrateur délégué Danny Van Assche. « Dans quel monde vivent les politiques qui proposent cela? Les entrepreneurs n’arrivent pas à trouver assez de monde pour répondre à leurs offres d’emploi mais ils seraient sanctionnés si une statistique n’est pas bonne ».
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La N-VA qualifie la proposition de « plan visant à imposer des taxes supplémentaires à ceux qui travaillent ou donnent du travail, en particulier en Flandre ». Le parti préférerait voir l’amende pour les entreprises qui emploient trop peu de personnes de plus de 60 ans remplacée par la suppression de la préretraite, selon le député Wim Van der Donckt. Les propositions concernant les pensions des fonctionnaires, la pension de maladie et la pension minimale sont, selon lui, des « interventions cosmétiques qui donnent l’impression que l’on fait quelque chose ».
Le président du CD&V, Sammy Mahdi n’est pas non plus convaincu par la proposition d’imposer des amendes aux entreprises qui n’emploient pas suffisamment de personnes de plus de 60 ans. « Le respect des plus de soixante ans ne s’obtient pas par des quotas et des amendes condescendants », a-t-il tweeté.
Pension complémentaire
Une autre proposition est sous le feu des critiques: une taxation accrue de la pension complémentaire. Les employeurs accusent la socialiste de rompre les engagements pris à propos du deuxième pilier. « Je demande de ne pas rompre l’accord et la confiance dans le deuxième pilier », a dit M. Timmermans.
Globalement, le PTB juge qu' »une économie de 2 milliards d’euros supplémentaires » dans le cadre des pensions est « socialement infaisable ». Entre autres, le maintien d’une condition unique de durée de carrière pour accéder à la pension anticipée passe mal auprès du parti marxiste. « Seules 55% des femmes atteignent aujourd’hui les 42 années de carrière requises pour accéder à la pension anticipée avant l’âge de 65 ans », note Kim De Witte, spécialiste des pensions du PTB. La limitation du public qui pourrait prétendre à un bonus pension est également critiquée, tandis que le PTB s’inquiète des métiers pénibles, pour lesquels il n’y a « aucune solution en vue », selon lui.
La première tranche de subsides européens en suspens
Du côté européen, la Commission européenne évaluera la réalisation du jalon lié à la réforme des pensions lorsque le pays aura soumis sa première demande de paiement, a indiqué lundi l’exécutif européen, interrogé par Belga sur son évaluation des nouvelles propositions de la ministre Lalieux.
La Commission ne s’est pas avancée sur le fond de ces propositions. Le jalon exige non seulement qu’une proposition de réforme des pensions de retraite soit présentée pour approbation au conseil des ministres, mais aussi que la réforme inclue des mesures visant à améliorer la soutenabilité financière du système des retraites et la convergence entre les différents systèmes de retraite. Pour ce qui est de l’adoption de la réforme à la Chambre, le plan de relance de la Belgique prévoit que ce soit fait en vue de la sixième demande de paiement des subventions européennes, précise-t-on à la Commission.
Le gouvernement aurait pu demander début janvier le versement d’une première tranche de près de 850 millions d’euros, sur les 4,5 milliards promis à la Belgique dans le cadre du plan de relance post-Covid décidé par l’UE. Mais il avait dû reporter cette demande en raison d’avancées jugées insuffisantes sur la réforme des pensions, ainsi que sur un autre dossier concernant une réforme technique en matière de lutte contre le blanchiment.
L’été dernier, le gouvernement fédéral s’était accordé sur une réforme des pensions, mais le mécanisme du bonus pension qui y est inclus va augmenter légèrement les dépenses de pensions à long terme, alors que l’Europe souhaite au contraire une maîtrise en la matière. Le point doit dès lors être renégocié au sein de la majorité Vivaldi, mais aucun accord n’a encore pu être trouvé.
Alors que cinq pays de l’UE ont déjà reçu leur deuxième tranche de subsides européens de relance, la Belgique n’a pas encore reçu la première, n’ayant jusqu’ici obtenu qu’un préfinancement de 770 millions d’euros.