LONDON, UNITED KINGDOM - 2022/11/30: Mick Lynch, RMT general secretary speaks at The University and College rally outside London's King's Cross Station. Over 70,000 university staff at 150 universities are taking part in an industrial action this month over pensions, pay and working conditions, making it the biggest national strike in the history of higher education. (Photo by Steve Taylor/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

Mick Lynch, l’inébranlable syndicaliste qui tient tête au gouvernement britannique (portrait)

« Grinch » ayant gâché Noël avec la grève des cheminots pour les uns, voix des travailleurs dans un Royaume-Uni en crise pour les autres, le syndicaliste du rail Mick Lynch, affiche sa détermination et une répartie à toute épreuve face au gouvernement et à l’hostilité de certains médias.

Sur le point de fêter ses 61 ans, le secrétaire général du syndicat des transports RMT Mick Lynch, est devenu en quelques mois une figure incontournable du paysage médiatique pour défendre un mouvement de grève à l’ampleur inédite depuis 30 ans dans le secteur ferroviaire. Après des débrayages cet été, à l’automne et juste avant Noël, quelques 40.000 cheminots se sont de nouveau mis en grève la semaine dernière, pour réclamer notamment des augmentations de salaires dans un pays où l’inflation dépasse les 10%.

D’autres professions, comme les ambulanciers ou les infirmières, les employés de la logistique ont aussi débrayés, sans se heurter à une hostilité massive du public, sensible à la crise du coût de la vie. Face à un mouvement sans précédent depuis les années 1980 et qui ne faiblit pas, le gouvernement s’est résolu à recevoir lundi les syndicats.

Depuis un piquet de grève ou devant une caméra de télévision, Mick Lynch, le regard bleu azur et le crâne chauve souvent flanqué d’une casquette irlandaise, référence à ses origines familiales, affiche une détermination sans faille. « La plupart d’entre nous n’ont pas eu d’augmentation depuis quatre ans » et « il n’y a pas beaucoup de gens qui peuvent s’en sortir avec une baisse de 20% de leurs revenus » en deux ans du fait de l’inflation, défend-il auprès de l’AFP devant la gare de Euston au coeur de Londres.

Mick Lynch, plus populaire que le Premier ministre

Ses interventions aussi sobres qu’affutées, voire sarcastiques, face à des journalistes parfois agressifs ou des responsables politiques dont il démonte les imprécisions, ont fait son succès dans l’opinion et sur les réseaux sociaux. Selon un sondage YouGov datant de décembre, il est bien plus populaire que le Parti conservateur ou le Premier ministre Rishi Sunak. 

Il assume être devenu le visage de la contestation car « c’est ce qui est nécessaire actuellement », estimant que les gens aiment sa « franchise », sa « manière directe de parler » et son « humour », même s’il assure « ne pas chercher à être au premier plan ». Arrivé en mai 2021 à la tête du puissant syndicat RMT, cet électricien de formation ayant quitté l’école à 16 ans, a une longue histoire syndicale, entamée dès son apprentissage.

Mis sur une liste noire pour avoir été membre d’un syndicat lorsqu’il a bifurqué vers la construction, il se tourne ensuite vers le secteur ferroviaire et rejoint la compagnie transmanche Eurostar dans les années 1990. Il s’y rapproche du RMT, montant progressivement dans la hiérarchie. Pro-Brexit, marié à une infirmière du service public de santé britannique et père de trois enfants, ce charismatique supporter de football est issu d’une famille de cinq enfants de milieu modeste.

Politiques sociales « réactionnaires »

Inconnu il y a quelques mois, il est devenu la bête noire de la presse conservatrice, soupçonné d’être un communiste marxiste qui voudrait détruire la société, dépeint par le tabloïd The Daily Mail en « Grinch », ce personnage de livres pour enfants qui détestait Noël. Le ministre des Entreprises, Grant Shapps, l’a comparé à un « baron syndical des années 1970 », époque où l’action syndicale était bien plus fréquente au Royaume-Uni. Amusé, il juge ses attaques « ridicules » et fustige les journalistes « paresseux » qui tentent juste de le « piéger » en direct à la télévision. Sans succès jusqu’ici.

Lui qui affirme vouloir instaurer « un peu de socialisme », voit dans la crise sociale qui secoue actuellement le Royaume-Uni la conséquence « des nombreuses politiques réactionnaires depuis (Margaret) Thatcher », Première ministre de 1979 à 1990. « Beaucoup de gens se sentent dans la précarité » aujourd’hui, souligne-t-il, citant la crise du logement, les contrats à zéro heure et l’inflation, et voulant pour preuve les grèves récentes de « gens de la classe moyenne » comme les avocats.

D’où l’échec selon lui du gouvernement à monter vraiment la population contre les grévistes, même si les cheminots sont plus critiqués que les infirmières ou les ambulanciers. « Les gens se disent: ils ont de bonnes raisons et tout ça m’arrive à moi aussi dans mon travail, que ce soit dans le secteur public ou privé« . Il espère désormais une plus grande coordination des mouvements, notamment pour s’opposer à la loi annoncée la semaine dernière par le gouvernement conservateur sur le service minimum.

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