certificat médical
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Suppression du certificat pour trois jours: répit pour les médecins ou porte ouverte aux dérives?  

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke soutient la proposition d’Ecolo Groen de permettre aux travailleurs malades de rester chez eux pendant trois jours sans présenter de certificat médical. Il estime que le système actuel surcharge les médecins généralistes. Certains craignent toutefois que la mesure ouvre la porte aux abus.

Depuis le 28 novembre 2022, la plupart  des employés ne sont plus tenus de présenter un certificat médical pour une absence d’une journée. Début avril 2023, les écologistes ont déposé une proposition de loi pour étendre cette mesure aux absences de trois jours trois fois par an, une position soutenue par le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit). « Nous devrions laisser les médecins faire le travail nécessaire, sans paperasserie inutile », estime-t-il.

En mai dernier, l’entreprise de services RH Acerta a publié une étude, d’ailleurs citée par le ministre, qui révélait que le nombre de travailleurs absents une seule journée pour cause de maladie a augmenté, passant de 2,4% au premier trimestre 2023 à 3,0% au premier trimestre 2023, mais que l’absentéisme pour maladie de courte durée a, lui, reculé de 5% par rapport à la même période de l’année précédente. La mesure n’a donc pas augmenté les jours de maladie des travailleurs.

Juriste chez Acerta, Amandine Boseret souligne que la proposition d’Ecolo Groen concerne également les petites entreprises. « Depuis le 28 novembre, les entreprises de moins de 50 travailleurs ont la possibilité de prévoir tout de même un certificat obligatoire, même pour une journée. La raison, c’est que les absences dans les petites structures sont plus difficiles à absorber. » La nouvelle mesure s’appliquerait donc à toutes les entreprises.  

Une économie pour l’Etat  

La proposition a ses partisans et ses détracteurs. Côté défenseurs, on invoque l’exemple de la Suède, de la Norvège et des Pays-Bas où le système fonctionne bien, sans trop d’abus. Les adeptes insistent aussi sur les bénéfices pour les médecins, qui se retrouveront délestés d’une partie de leurs tâches administratives. Amandine Boseret rappelle aussi que cette mesure entraîne une économie pour l’Etat. « Si les gens vont moins chez le médecin, l’Etat devra un peu moins intervenir », observe-t-elle.

Certains estiment aussi qu’une telle mesure permettrait de baser la relation employeur-travailleur sur la confiance plutôt que sur le contrôle. « Depuis le télétravail généralisé depuis la pandémie, il y a de plus en plus une relation de contrôle. L’employeur a moins de possibilités de contrôler son employé », souligne la juriste.

A l’inverse, les opposants pointent l’éventuel danger pour la santé à attendre trois jours avant de se rendre chez le médecin. Ils avancent également que les certificats médicaux ne sont pas la seule charge administrative des médecins, qui pourraient réduire celle-ci en émettant un certificat standardisé pour tout le monde.

Finalement, certains détracteurs craignent d’éventuels abus. « Certains employeurs redoutent que leurs employés utilisent ces jours pour prolonger leur week-end ou se remettre d’une fête de la veille, par exemple ». Les opposants souhaitent une étude plus profonde pour évaluer l’impact de la mesure sur les employés.

Médecin de contrôle

Amandine Boseret rappelle que même s’il n’est plus tenu de présenter un certificat médical, que ce soit pour un, deux ou trois jours, l’employé demeure soumis à une série d’obligations envers son employeur. « Il doit prévenir son employeur et lui communiquer son lieu de résidence s’il n’est pas chez lui. L’employeur garde en effet toujours la possibilité de faire contrôler cette absence par un médecin de contrôle. La dispense du certificat médical n’entraîne donc qu’un changement dans la justification ». Si la proposition de loi passe, la juriste ne s’attend pas à ce qu’elle soit d’application avant le 1er janvier 2024, au plus tôt.

La proposition risque de donner lieu à de vifs débats au sein de la Vivaldi. Le MR, par la voix de Caroline Taquin, a fait part la semaine dernière à la Chambre de sa vive opposition au souhait du ministre de la Santé. « Nous ne sommes pas d’accord », a déclaré sans ambiguïté la libérale. À ses yeux, une telle proposition mettrait potentiellement en danger la qualité des soins. Depuis l’opposition, Maxime Prévot (Les Engagés) a également fustigé l’idée.

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