Salaires: les jeunes négocient, les autres, si peu

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Pour 74% des travailleurs, aborder son patron pour négocier ou même évoquer son salaire est inimaginable. D’ailleurs, ils ne l’ont jamais fait. Mais la donne change avec les salariés plus jeunes: 31% des 18-34 ans ont déjà parlé franchement de leur rémunération avec leur supérieur. 2.11.0.0 2.11.0.0

Parler salaire avec son patron ? Vous n’y pensez pas: le sujet est tabou. Cette affirmation est toujours vraie en 2024 pour 3 travailleurs sur 4 qui, à ce jour, n’ont jamais négocié la hauteur de leur rémunération. Les jeunes, eux, franchissent allègrement le pas et abordent frontalement la question de leur salaire avec leur direction.

Il y aurait pourtant à redire, pour les plus hésitants: 27% des salariés considèrent par exemple que leur salaire, ou la façon dont des augmentations sont accordées à certains, ne sont « ni honnêtes, ni équitables », révèle une étude réalisée auprès de 2500 personnes par le prestataire de services RH Tempo-Team, en collaboration avec la professeure de la KULeuven Anja Van den Broeck, spécialisée en motivation du travail.

Ce sont précisément ce manque de transparence et l’absence de marges de négociation de la rémunération avec la hiérarchie qui expliqueraient pourquoi 74% des travailleurs n’évoquent pas la question de leur salaire avec leurs supérieurs. Quelque 48,5% d’entre eux affirment n’avoir jamais eu le temps ni la possibilité d’avoir une discussion sur ce sujet. Près de 40% avouent qu’ils n’en ont pas eu l’audace.

Certains se sentent bien démunis face à cette éventuelle négociation puisque seuls 23 % des sondés se disent informés des procédures en vigueur pour déterminer la hauteur d’une rémunération. Enfin, si une majorité (55,3 %) affirme vouloir déterminer elle-même la composition de sa rémunération, seuls
25 % ont la possibilité de recourir au plan cafétéria.


« Si l’on estime avoir droit à une majoration de son salaire, il faut oser aborder le sujet, affirme Wim Van der Linden, porte-parole de Tempo-Team. Cela donne à l’employeur la possibilité
d’expliquer ce qu’il attend en échange et quelle est la politique salariale de l’entreprise. Celle-
ci a d’ailleurs tout intérêt à se montrer transparente et ouverte sur le sujet, et donc de détailler le salaire attribué à chaque poste. Notre étude montre en effet une nette corrélation entre la satisfaction au travail et la rémunération, le plaisir ressenti au travail et la productivité ».

Les plus jeunes changent la donne


Du côté des plus jeunes, il en va tout autrement. Plus de 31% des 18-34 ans ont déjà négocié leur salaire, contre 23 % des travailleurs âgés de 35 à 54 ans et 22 % des plus de 55 ans. Et près de 40 % des sondés de moins de 34 ans envisagent de le faire (contre respectivement 29 et 24 % pour les deux autres catégories d’âge).

L’étude révèle enfin de fortes disparités entre les sexes : les femmes parlent bien moins volontiers de salaire que les hommes. Elles ne sont que 17 % à avoir déjà abordé la question avec leurs supérieurs, contre 31 % des hommes. Seules 24 % d’entre elles disent entrevoir des marges de négociation pour une revalorisation de leur salaire, ou, à tout le moins, la possibilité de trouver un moment adéquat pour lancer la discussion, contre 39 % des hommes.


« Ces résultats corroborent les stéréotypes qui dominent en entreprise : les jeunes seraient
mieux capables de défendre leurs intérêts, et les femmes trop peu audacieuses pour
négocier, analyse la professeure de la KULeuven Anja Van den Broeck. La culture de l’entreprise peut
soit renforcer ces stéréotypes, soit, au contraire, jouer la carte de l’ouverture, ce qui facilite les
discussions. »

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