Carte blanche

Sans-Papiers et confiné à perpétuité ? (carte blanche)

Adam est membre du collectif de la Voix des Sans-Papiers de Liège. Il a quitté le Niger pour trouver une vie meilleure en Belgique. Quand il est arrivé, il ne savait quasi ni lire ni écrire. Il partage un texte pour parler des sans-papiers, les « oubliés de la crise ».

En quittant son pays, il cherchait protection et solidarité. Au bout d’un périple de 2,5 ans, il s’est posé en Belgique, où nos gouvernants lui ont offert leur mépris et une vie faite de cul-de sacs et de précarité. Mais à 27 ans, avec toutes les personnes qui luttent avec lui pour le droit aux papiers et à une vie digne, il continue d’espérer un futur meilleur.

Adam a écrit ce texte en plein confinement, quand les Sans-Papiers étaient (et sont toujours) de tous ces « oubliés de la crise ». Son message : « Ce n’est pas parce qu’un bout de corde est court qu’il ne sert à rien. C’est parce que son jour n’est pas arrivé! »

Je m’appelle zéro, je viens de nulle part, j’habite un peu partout dans le monde et ma vie ne sert à rien. Corona, confinement, je suis en confinement depuis le début. Déjà en tant que Sans-Papiers, je suis en confinement depuis longtemps. Par pauvreté et non par fainéantise, tout simplement parce que je suis sans papiers.

Or la société d’aujourd’hui ne défend que les papiers, mais pas les vraies valeurs humaines. Donc je n’ai pas peur du corona. J’ai peur de l’être humain. Car l’humain est son propre corona. Dans la société, plus il y a d’argent, plus il y a de pauvreté. Plus il y a des hôpitaux, plus il y a des malades. Plus il y a des études hors normes, plus il y a des problèmes.

Donc s’il faut changer la société, alors revenons aux vraies valeurs humaines. Tout le monde a des droits et devoirs. Pour quelles raisons d’autres personnes ne peuvent y accéder, à ces droits et devoirs, comme certains privilégiés ? Ils ne le méritent pas ? Ce n’est pas écrit sur le front de chacun qu’il n’a pas ces droits ou qu’il les a. Ce sont les humains qui interdisent aux autres humains d’avoir leurs droits et devoirs. Je me pose la question : est-ce que je suis pauvre ou pas ?

Je ne suis pas pauvre parce que je réfléchis, j’écoute, je pense, j’analyse, je regarde, j’imagine, je parle et je garde les contacts avec des bonnes personnes. J’ignore ce qui me dépasse, j’apprends ce qui me permet de vivre dans une société sans injustice. Ce n’est pas parce qu’un bout de corde est court qu’il ne sert à rien. C’est parce que son jour n’est pas arrivé.

Adam

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