Revenge porn : une pratique bientôt durement sanctionnée
Vendredi dernier, Benjamin Griveaux, candidat à la mairie de Paris, annonçait le retrait de sa candidature suite à la diffusion d’une vidéo à caractère sexuel le mettant en scène. L’affaire relance le débat sur le « revenge porn », un fléau qui frappe également la Belgique et qui fait l’objet d’une proposition de loi, ce mardi, à la Chambre.
Le « revenge porn » consiste à diffuser, dans le but d’une vengeance, des contenus sexuellement explicites d’une personne sans son consentement. Il s’agit souvent d’un ex-partenaire désireux de se venger. Il peut aussi s’agir d’un pirate qui exige de l’argent en échange de la suppression du contenu. La plupart des victimes ont envoyé elles-mêmes les images intimes à leur agresseur.
Selon la RTBF, 90% des victimes sont des femmes, souvent des adolescentes, qui fragilisées et harcelées suite à la diffusion des images sur les réseaux, vont parfois jusqu’à se suicider. « Il y a dix ans, on traitait un dossier par an. Aujourd’hui, c’est 15 dossiers par an. Dans 80% de mes dossiers, ce sont des personnes qui ont moins de 18 ans. Parfois, cela descend très bas: 13,14 ans. Un dénominateur commun chez les victimes, c’est la souffrance », explique Etienne Wery, avocat et défenseur de victimes de revenge porn, à la RTBF.
Selon l’avocat, beaucoup de victimes vivent la diffusion de leurs images comme un viol. « C’est un viol de l’intimité, mais elles le vivent comme un viol », dit-il. « Du côté des agresseurs, soit c’est de la colère, soit c’est de l’inconscience », estime-t-il.
En Belgique et en France, le revenge porn est déjà punissable par la loi, mais le 4 février dernier, la députée Vanessa Matz (cdH) a déposé une proposition de loi visant à sanctionner encore plus durement cette pratique. La proposition de loi prévoit des peines de prison allant jusqu’à 5 ans et des amendes très importantes allant de 200 et 15 000 euros.
Six heures pour retirer le contenu
Le dispositif proposé par Vanessa Matz prévoit une procédure de retrait ou de masquage des images par un référé en extrême urgence devant le président du tribunal de première instance. Six heures seraient alors laissées à l’auteur des images, le diffuseur ou l’opérateur télécom pour retirer ou masquer le contenu.
« L’humiliation et la honte sont grandes chez les victimes. Le dommage moral subi face au dévoilement de leur plus stricte intimité doit être sérieusement pris en compte », déclare Vanessa Matz à la Libre Belgique.
Interrogé par la RTBF, Etienne Wery estime que la proposition de loi ne permettra pas d’éradiquer le revenge porn, la plupart des agresseurs étant des mineurs d’âge. « Et même par rapport aux adultes, dire que l’on va payer plus d’amende, cela ne va pas arrêter l’homme en colère ou excité qui en veut à son ancienne compagne. Dans ce contexte-ci, aggraver les peines, ne va changer grand-chose », estime-t-il.
Une arme pénale massive
« Est-ce qu’on traite des dossiers comme ceux-là avec une arme pénale aussi massive? », se demande-t-il. Pour lui, mieux vaut miser sur l’éducation et la sensibilisation dans les écoles afin que les agresseurs prennent conscience du dommage moral qu’ils causent à leurs victimes.
La nouvelle loi sur le « revenge porn » pas encore votée en Commission Justice de la Chambre
Le dépôt de cette proposition de loi date du 10 juillet dernier, et est donc bien antérieure à l’affaire qui secoue le monde politique français.
Le texte belge diffère de la législation française. La Belgique veut privilégier la procédure judiciaire là où la France utilise une procédure administrative.
La matière est juridiquement complexe et le texte a fait l’objet de nombreux amendements et remarques pratiques. Un amendement global a finalement été déposé par Mme Matz, reprenant l’ensemble des remarques des différents groupes politiques. Celui-ci a lui-même encore fait l’objet d’amendements. Le texte a dès lors été renvoyé en deuxième lecture.
Belga
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