Koen Metsu (N-VA), quand il président la commission parlementaire sur la lutte contre le terrorisme. © Belga

Réveillons notre démocratie face à la menace terroriste (analyse)

Olivier Mouton Journaliste

Cinq ans après les attentats de Bruxelles, le député fédéral Koen Metsu (N-VA), ancien président de la commission Lutte contre le terrorisme, publie en néerlandais un livre qui est un piqûre de rappel: la menace est toujours là.

Koen Metsu est député fédéral N-VA et bourgmestre d’Edegem, une commune de la banlieue anversoise. Il fut aussi président de la commission parlementaire sur la lutte contre le terrorisme. Avec le juriste Julien De Wit, il publie un livre (Ontwapend, Désarmé en néerlandais) pour tirer les leçons, cinq ans après les attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles. « Les attaques, la terreur… Cela est perçu comme quelque chose du passé, écrivent-ils dans leur introduction. Un vague souvenir. Nous sommes préoccupés par d’autres choses. Pourtant, nous ne pouvons pas perdre de vue d’autres menaces. De nouveaux attentats en Autriche ou en France, comme la décapitation de Samuel Paty, sont là pour nous rappeler que le mal n’est pas encore passé. »

Ce livre est le fruit d’une longue enquête, soulignent-ils, et – « ne nous détrompons pas » – nos services de sécurité continuent à déjouer des intentions malveillantes, tandis que des prêches radicaux continuent à être prononcés dans des mosquées: la menace demeure. Voilà ce qu’il ressort de leur immersion sur le terrain. Voilà ce qui ne peut pas être nié, disent-ils, malgré la pandémie et ses angoisses.

« Réveiller la démocratie »

Tout le monde se souvient de ce 22 mars 2016 aux alentours de 8h du matin, quand toutes les radios du pays se sont soudain figées sur la nouvelle d’une attaque à Zaventem. C’est forcément le point de départ du livre. Puis, les deux auteurs passent en revue les différents visages de la menace, avant d’apporter des solutions, leurs solutions.

Après une analyse du changement de contexte géopolitique généré par les attentats du 11 septembre 2001 à New York, Koen Metsu raconte une longue rencontre avec trois des victimes des attentats de Bruxelles. « Je me rends compte que la Belgique a fait trop peu pour les victimes des attentats, écrit-il. Après ceux de mars, une task force a été mise en place au sujet de cette problématique. Peu de succès ont été engrangés. Après la disparition de cette task force, le débat sur l’aide aux victimes a peu à peu disparu. » Les premières pistes de solutions vont donc dans ce sen : un fonds de garantie pour les victimes, un encadrement, une écoute…

Place à « la démocratie décapitée », le 16 octobre 2000. Les auteurs évoquent la décapitation de Samuel Paty, cet enseignant français sauvagement assassiné parce qu’il avait montré des caricatures du prophète en classe, dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression. « C’est le coeur de l’enseignement, soulignent les deux auteurs. L’enseignement amène à se poser des questions. Mais certaines idéologies ne supportent pas les doutes et les questions. »

Le député N-VA souligne combien il assume le discours polarisant de son parti. « C’est bien nous, qui souscrivons aux valeurs de la société occidentale, contre eux, qui les combattent. » Il s’agit bien de s’en prendre à « une idéologie de la haine et à des pratiques moyenâgeuses », mais aussi de ‘réveiller la démocratie » trop souvent bridée par la politique politicienne.

« Contrer la radicalisation »

La deuxième partie du livre s’attaque au processus de radicalisation, au départ de l’histoire de David, un jeune homme attiré par la propagande de l’Etat islamique. C’est l’histoire ordinaire d’un garçon aimé par ses parents, fort en sports, courtisé par les filles… Jusqu’à ce qu’à 17 ans, son comportement change, il se pose des questions sur la religion, laisse tout tomber et parte finalement pour la Syrie, avant d’être rattrapé à temps. « Le récit de David est celui d’une jeune qui a pu être sauvé, écrivent les auteurs. Pour beaucoup d’autres jeunes, il est trop tard. Cela démontre que l’on a besoin d’un accompagnement pour ces gens. Besoin d’un cadre. D’une approche intégrée. »

Parmi les solutions proposées: la formation des enseignants à la détection des indices de radicalisation ou le financement de la Cybercrim unit de la police pour mener un travail plus important sur les réseaux. Face aux déviances de l’Islam radical, le député plaide encore pour une stricte neutralité à l’école, le refus absolu du port des signes religieux ou la tolérance zéro à l’encontre le la charia comme source de droit.

Dans Ontwapend, Koen Metsu lance un vibrant plaidoyer pour une fermeté sans failles contre les sources de la terreur, il demande que la Belgique soutienne toutes les initiatives pour vaincre les terroristes en Afrique, où ils resurgissent, notamment. Puis, il entre dans le « cockpit » de nos institutions de Sûreté et dénonce un « compromis à la belge » – forcément peu enviable pour un nationaliste flamand. Pour autant, ses pistes s’inscrivent davantage dans la continuité du gouvernement Michel que dans un grand soir à la sauce extrémiste.

« Cela va lentement pour changer véritablement les choses dans un pays comme la Belgique, lit-on dans la conclusion. Notre pays est particulièrement complexe et notre système politique n’est pas le plus simple. Pourtant, nous devons continuer à croire en lui. Oui, la démocratie est parfois moins rapide. Mais pour citer Winston Chruchill: c’est le moins mauvais des systèmes parmi ceux que nous avons déjà utilisés. Nous devons choyer notre modèle de société. »

Dans sa position de combat comme dans sa modération, ce livre est une piqûre de rappel alors que la Covid camoufle bien des débats.

Ontwapend, Koen Metsu et Julien De Witte, éd. Doorbraak

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