Quelle Eglise après Léonard ?
Mgr Léonard a incarné, au cours de son quinquennat à la tête de l’Eglise belge, la ligne conservatrice de Benoît XVI. Son successeur choisi par le pape François sera-t-il l’archevêque du changement ?
Le pape François n’a pas attendu longtemps avant d’accepter la renonciation de Mgr Léonard à sa charge d’archevêque de Malines-Bruxelles. Le 1er juin, moins d’un mois après l’envoi de la lettre de démission du prélat ? ayant atteint la limite d’âge, 75 ans, pour diriger un diocèse ? ce que l’on subodorait se vérifiait : le mandat du prélat wallon, dont les déclarations sur les questions de société ont si souvent suscité la polémique, et qui s’est montré fort peu en phase avec la révolution bergoglienne, ne serait pas prolongé, même de quelques mois. « La procédure de nomination du futur archevêque suit son cours, sans calendrier formel », indique Tommy Scholtes, porte-parole de la Conférence épiscopale de Belgique. En attendant la décision de Rome, Mgr Léonard continue d’assumer, ad interim, la fonction archiépiscopale.
Le nonce apostolique, Mgr Giacinto Berloco, doit dresser la « terna« , une liste de trois noms de personnalités religieuses qu’il juge, après consultation du terrain ? évêques, prêtres, laïcs… ?, les plus aptes à assumer la succession. Le représentant du Saint-Siège à Bruxelles envoie ensuite cette short list secrète à la Congrégation pour les évêques, organisme de la curie qui peut valider ou modifier l’ordre préférentiel du trio, voire sa composition. Retouchée ou non, la liste est alors remise au souverain pontife. « L’habitude veut que le pape en tienne compte, mais il reste libre de son choix », remarque Scholtes.
Des « réformistes » comme favoris
Une fois encore, les responsables de la communication de l’Eglise de Belgique se refusent à tout pronostic sur les chances des candidats à la succession cités dans les cercles catholiques et les médias. Comme en 2009, année de supputations sur l’après-Danneels, le nom de l’évêque d’Anvers, Mgr Johan Bonny, circule beaucoup, surtout en Flandre. Le prélat, qui aura 60 ans ce 10 juillet, jouirait du soutien de son clergé et de la hiérarchie de l’Université catholique de Leuven. Ses interventions remarquées en faveur d’une réforme de la doctrine familiale de l’Eglise et son aisance médiatique lui valent une popularité qui dépasse largement les milieux chrétiens.
Son principal challenger est l’évêque de Bruges, Jozef De Kesel, 67 ans. Apprécié par le clergé et les fidèles au cours de ses huit années d’évêque auxiliaire de Bruxelles (2002-2010), ce prélat de consensus était un proche de l’archevêque Danneels, qui lui faisait une confiance totale. Homme d’ouverture, De Kesel a remis plus d’une fois en cause le célibat des prêtres et fait figure de réformiste modéré. Muté dans la Venise du Nord en juin 2010, il a hérité d’une situation délicate : son prédécesseur était l’évêque démissionnaire Roger Vangheluwe, auteur d’abus sexuels sur mineurs. Peu présent dans les médias, De Kesel y a été épinglé, fin 2014, pour sa réaction tardive et son manque de fermeté dans des affaires de prêtres déviants réhabilités.
La coutume veut qu’un archevêque néerlandophone succède à un francophone. Toutefois, Mgr Danneels ayant occupé la fonction pendant trente ans et Mgr Léonard pendant cinq ans seulement, il n’est pas exclu qu’un évêque du sud du pays soit choisi. Dans ce cas de figure, Mgr Jean-Pierre Delville, 64 ans, tient la corde. Son handicap : il n’est à la tête du diocèse de Liège que depuis deux ans. Ses atouts : c’est à la fois un brillant théologien et un prélat soucieux du sort des plus démunis. Proche de Sant’Egidio, communauté catholique engagée auprès des pauvres, il est tout à fait dans la ligne du pape François. Autre proche de Sant’Egidio cité comme successeur potentiel : Mgr Léon Lemmens, 61 ans, évêque auxiliaire pour le Brabant flamand depuis 2011, qui s’est investi dans le dialogue avec l’Eglise orthodoxe.
Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :
– Bonny superstar
– Ce qui peut compliquer sa nomination
– Doit-on donc s’attendre à un virage radical au sein de l’Eglise belge au cours d’un mandat qui pourrait durer quinze ans ?
– 6 archevêques de choc de notre Histoire
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