Quel avenir pour la Belgique ? 28 personnalités écrivent à Paul Magnette

Olivier Mouton Journaliste

A la demande du Vif/L’Express, vingt-huit acteurs de la société écrivent une lettre à l’informateur royal, Paul Magnette. Ils expriment leur crainte d’une crise existentielle belgo-belge, confient leur vision du pays et émettent des propositions pour éviter l’impasse.

Cher Paul Magnette, depuis le 5 novembre, vous menez une mission d’information royale que nous savons épineuse. Deux risques planent. Une paralysie politique totale pourrait mener rapidement à de nouvelles élections, avec le risque de voir les extrêmes se renforcer encore. D’autre part, à terme, une crise profonde pourrait menacer l’avenir même de la Belgique. Presque six mois après les élections, alors que le pays est  » géré  » depuis un an par un gouvernement minoritaire en affaires courantes, l’indifférence apparente de la population cache désormais une inquiétude froide. Monsieur l’informateur royal, vous avez choisi la transparence pour sortir de ce blocage et tenter d’inventer un nouveau futur pour le pays. En le stabilisant, avec une coalition la plus large possible. Le 11 novembre, vous vous êtes même déclaré, en flamand,  » plus optimiste « …

A l’heure où vous rédigez un texte à l’intention des présidents de parti, avant de revoir le roi le 18 novembre, la rédaction du Vif/L’Express a pris au mot votre volonté de travailler différemment. Nous avons demandé à une petite trentaine de personnalités, actives dans tous les champs de la société, de vous écrire une lettre pour exprimer leur aspiration à une Belgique plus stable ou leur préférence pour un choix plus radical. Avec, dans les deux cas, une demande de réformes urgentes pour le bien-être de la population. Vous le lirez, il y a dans leurs mots des craintes et des doutes, mais aussi des rêves, des conseils, de l’agacement ou de la colère, de la lassitude et des énergies. Monsieur Magnette, nous espérons que vous en tiendrez compte.

« La colère est parfois bonne conseillère » – Par Caroline Lamarche – Ecrivaine

 » Cher Paul Magnette,

Nos élus ignorent-ils de quel bois nous sommes faits ? Nombre d’entre nous pratiquent, dans leur vie quotidienne comme dans leur manière de penser, l’exercice de la lutte discursive, concrète, patiente, qui fait que nous restons un pays riche de toutes ses cultures. Nombre d’entre nous sont activement conscients des urgences sociales, migratoires, climatiques et vivent avec effroi et dégoût ce qui se défait, s’oppose, se rigidifie depuis les dernières élections. Nombre d’entre nous ont des enfants et des petits-enfants qui, dans la lucidité et l’énergie de leur âge, ont un besoin vital d’espoir. Monsieur Magnette, je suis incapable d’un conseil politique : cet art est le vôtre, non le mien. Je sais simplement que la colère est parfois bonne conseillère. Alors, trouvez les mots pour que tout le monde voie plus haut et plus loin. Merci et bon courage.  »

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Caroline Lamarche
Caroline Lamarche© DEBBY TERMONIA

« Faites appel à l’intelligence collective » – Par Pierre-Yves Monette – Ancien médiateur fédéral et expert en médiation politique pour l’ONU

 » Cher Paul Magnette,

[…] Au lieu de chercher la solution au blocage au sein des seuls acteurs politiques, pour répondre au seul objectif de former un gouvernement et par la seule recherche de compatibilité programmatique, il faut en réalité chercher la solution plus loin, en élargissant le cercle des acteurs impliqués, en dépassant l’objectif de réunir un nombre de partis totalisant une majorité au Parlement, et en utilisant les techniques consensuelles de recherche de solutions, comme par exemple le recours à l’intelligence collective.

Concrètement, on réunit 100 citoyens tirés au sort, miroirs des différentes langues et Régions du pays, accompagnés des experts dont ils choisiront eux-mêmes de s’entourer. Après avoir rencontré un à un les leaders politiques, ce panel citoyen se retirera pour s’accorder sur ses priorités pour le pays. Il les présentera ensuite au Roi qui s’informera, exhortera ou mettra en garde. Après quoi, ces citoyens rencontreront les leaders des partis politiques, ensemble cette fois, dans un échange approfondi pour les sensibiliser à leurs priorités, leur expliquer leurs recommandations, écouter les difficultés auxquelles ces leaders politiques sont confrontés, et, enfin, ouvrir avec eux des pistes pour dépasser ces difficultés. Le Roi nommera ensuite un (in)formateur – strictement politique ou un duo d'(in)formateurs politique et citoyen – qui invitera les partis qui le souhaitent à s’associer pour mettre en oeuvre ces priorités et recommandations.

[…] Le Canada, la France, l’Irlande, l’Islande, la Suisse – pour ne citer que quelques exemples – ont eu recours à ces panels citoyens. Dans un monde de défis et de désaffection pour le Politique, le panel citoyen est un outil puissant pour débloquer la situation et ouvrir la voie à un gouvernement fédéral au programme ambitieux et bénéficiant d’une forte légitimité.  »

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Pierre-Yves Monette
Pierre-Yves Monette© BELGAIMAGE

« Parlons de ce qui nous réunit » – Par Olivier De Schutter – Professeur à l’UCLouvain et coprésident du Panel international d’experts sur les systèmes alimentaires durables (Ipes-Food)

 » Cher Paul Magnette,

Les élections sont le temps des clivages : dans la compétition pour les votes, il s’agit de marquer les différences. Le temps est venu maintenant de parler de ce qui nous réunit, de ce qui fait tenir ensemble la société et qui peut réunir par-delà les idéologies et les slogans. Je propose trois priorités :

1. Réussir la transition écologique en la prenant comme levier de justice sociale et de réduction des inégalités. Réinvestir dans les transports en commun, financer l’isolation des bâtiments, rendre abordables les produits alimentaires sains (locaux, donc plus nutritifs, et issus de l’agriculture biologique ou de systèmes participatifs de garantie), aller vers la réduction généralisée du temps de travail pour un véritable équilibre entre vie privée et professionnelle… Ces mesures répondront à l’urgence écologique en même temps qu’elles amélioreront le quotidien des familles pour qui la priorité est la fin du mois.

2. Orienter la recherche et le développement de nouvelles technologies pour qu’elles répondent à l’urgence écologique. […] C’est pourquoi il est essentiel de relancer l’investissement public dans la recherche, en orientant celle-ci vers la quête de solutions qui permettent de réduire notre empreinte écologique.

3. Les innovations sociales citoyennes jaillissant de partout, dans les domaines de l’énergie, de l’alimentation, de l’économie circulaire, ou de la mobilité, il faut que les politiques s’en fassent les partenaires. On peut soutenir les initiatives citoyennes, en levant les obstacles à leur diffusion, en accélérant le partage des expériences et en créant les outils permettant de les faire vivre, par exemple par l’instauration d’un congé civique pour appuyer les initiateurs de transition. Apprendre des initiatives citoyennes, portées par des hommes et des femmes ordinaires, cela exige de la part des politiques un peu de modestie : ayons l’ambition d’être modestes.  »

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Olivier De Schutter
Olivier De Schutter© DEBBY TERMONIA

« Tournez votre regard vers les plus faibles » – Par Olivia Venet – Présidente de la Ligue des droits humains

 » Cher Paul Magnette,

Les droits humains et les libertés fondamentales sont le cadre de référence exclusif dans lequel doit d’inscrire toute gouvernance. Hors de ce cadre, il n’y a plus de protection des personnes contre l’arbitraire de l’Etat. Hors de ce cadre, il n’y a plus d’Etat de droit.

Un gouvernement digne doit être l’agent et le moteur du respect effectif de ce cadre : respecter et garantir la séparation des pouvoirs et reconnaître la Justice comme un pouvoir à part entière ; respecter et garantir l’effectivité des droits et libertés consacrés par les Conventions internationales.

Gardez les yeux grands ouverts : les projets qui rejettent les protections fondamentales des individus sont liberticides et dangereux pour la démocratie.

A l’heure de discuter avec les plus puissants, tournez votre regard vers les plus faibles. Le rôle d’un Etat est de protéger les plus vulnérables. Il faut lutter, de manière cohérente, contre les inégalités et garantir que toutes et tous puissent vivre dans les conditions matérielles conformes à la dignité humaine. Il faut accorder une attention particulière à ceux qui sont discriminés, qu’il s’agisse de discrimination du fait du sexe, de l’orientation sexuelle, de la prétendue race, de la religion, de la nationalité, de l’appartenance à un certain groupe social ou des opinions politiques.

Le rôle d’un Etat, c’est aussi assurer la sécurité de ces citoyens : sécurité d’existence et de conditions d’existence dignes. La sécurité ne doit pas être envisagée comme une restriction à la liberté mais, au contraire, comme l’expression de nos libertés. […]  »

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Olivia Venet
Olivia Venet© BELGAIMAGE

« Dites bien que les Wallons sont une force de propositions » – Par Bernard Delvaux – CEO de la Sonaca

 » Cher Paul Magnette,

Je m’oppose à 100 % aux affirmations selon lesquelles la Belgique fonctionnerait bien sans gouvernement fédéral. Parce que le monde tourne à toute vitesse et la Belgique ne progresse pas aussi vite que les autres pays. Cette absence de gestion est forcément préjudiciable.

J’ai pris quatre exemples au hasard sur le site du think tank Itinera, qui classe les pays dans différents domaines :

1. La Belgique est actuellement 21e dans le classement du World Economic Forum et perd une place chaque année, tandis que les Pays-Bas sont 6e.

2. La Belgique est 24e dans un classement du patronat flamand, le Voka, sur le rapport entre les impôts payés et les politiques menées, les Pays-Bas 3e.

3. Nous sommes 31e sur 38 dans le classement du taux d’emploi de l’OCDE, les Pays-Bas 4e.

4. Enfin, toujours selon l’OCDE, nous sommes 38e sur 39 en ce qui concerne la part des dépenses consacrées aux investissements, les Pays-Bas 20e. Rien n’explique cette différence sinon cette non-gestion dont les effets sont catastrophiques.

En tant qu’informateur, Monsieur Magnette, vous pouvez être le porteur d’un message. Je ne vais pas vous dire comment négocier avec la N-VA, c’est très technique. Mais si l’on veut un fédéral fort et une Belgique unie, ce qui a du sens, nous, Wallons, devons convaincre les Flamands et les Bruxellois que nous sommes une force de progrès et de propositions.

Force est de constater que la Belgique ne fonctionne pas mieux depuis l’adoption de la sixième réforme de l’Etat. Il y a une réflexion à mener sur la façon dont on pourrait rendre cet Etat plus efficace. Ce que j’espère de votre mission, et des francophones dans leur ensemble d’ailleurs, c’est de venir avec des propositions concrètes en ce sens. Je sais qu’elles existent. Cela montrerait que nous sommes prêts au changement et non que l’on ne se préoccupe que de la survie de la sécurité sociale. Idéalement, ce devrait être un message commun de la part de tous les Wallons.  »

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Bernard Delvaux
Bernard Delvaux© ISOPIX

« Enrayez la violence faite aux femmes » – Par Sylvie Lausberg – Présidente du Conseil des femmes francophones de Belgique

 » Cher Paul Magnette,

Le premier des droits humains est le droit à l’intégrité physique. En Belgique, la lutte contre les violences envers les femmes doit devenir une priorité nationale. Pour que les filles et les femmes puissent vivre sans crainte d’être agressées, violées, frappées, battues, assassinées. La réponse ne peut pas être uniquement institutionnelle ou pénale. L’Etat belge, comme il s’y est engagé en ratifiant la Convention d’Istanbul (1), doit mettre en place des politiques concertées, prendre des mesures de prévention, de protection et assurer la poursuite des agresseurs. Les réponses, les dispositifs, le maillage géographique pour que chaque femme puisse bénéficier d’une vie à l’abri des violences, doivent être élaborés avec les associations de terrain et concerner tous les domaines : formation des magistrats et des policiers, éducation à l’égalité à destination des jeunes – mais pas seulement ! – campagnes de sensibilisation, etc. pour que partout, chaque fois qu’un acte de violence se produit, il y ait une réponse adéquate, la plus rapide possible. Ce doit devenir un réflexe et on est loin du compte puisque les femmes cibles de violence sont souvent rejetées, isolées et leur parole mise en doute. Sur le terrain, les asbl qui mettent des refuges à disposition sont débordées ; il n’y a pas assez de places d’accueil, ni de services de première ligne. Ces associations doivent endosser d’énormes responsabilités ; leur financement structurel est indispensable. […] Nous demandons d’inverser la tendance, comme en Espagne, où le nombre de féminicides a été divisé par trois en dix ans. Le coût global de ces violences doit être évalué. Nous demandons que cet argent soit investi en amont, par tranche, sur une période de cinq ans renouvelables, période au terme de laquelle les résultats obtenus pourront être analysés afin d’améliorer ce qui a été mis en place. Enrayer la spirale des violences envers les filles et les femmes est un premier pas vers l’éradication de ce fléau généralisé, indigne d’une démocratie.  »

(1) La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, ratifiée en 2016.

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Sylvie Lausberg
Sylvie Lausberg

« Sortons de cette crise par le haut » – Par Philippe Van Parijs – Economiste et philosophe

 » Cher Paul Magnette,

Que la N-VA participe ou non au gouvernement fédéral, il est légitime et opportun de faire place à une conversation ouverte sur l’avenir institutionnel du pays.

La N-VA présente aujourd’hui son modèle de confédéralisme à deux non comme une étape aussi courte que possible vers l’explosion du pays mais comme une manière durable de mieux faire fonctionner l’entité Belgique, dans l’intérêt de chacune de ses composantes. Ce modèle doit être pris au sérieux, pas suspecté d’insincérité et récusé a priori, sans lui accorder l’attention que mérite le seul effort qu’ait produit un parti politique pour concocter une proposition de solution structurelle aux blocages récurrents dont souffre notre état fédéral.

Mais ce n’est bien sûr pas la seule proposition possible. Il y a le confédéralisme à trois ou à quatre, le modèle bruxellois de majorités jumelles, la circonscription fédérale, un Sénat sans sénateurs, un gouvernement constitué à la proportionnelle comme en Suisse et en Irlande du Nord, et bien d’autres encore.

Tout cela peut faire partie de la conversation institutionnelle à mettre en place, sans que la formation du gouvernement ne soit suspendue à son aboutissement. Une conversation, pas d’emblée une négociation entre partis politiques corsetés par des considérations tactiques. Une conversation large associant la société civile, portée par la presse de qualité, et conçue de manière à enjamber résolument la frontière linguistique, à favoriser l’écoute mutuelle, à stimuler l’imagination, à permettre une réflexion commune et, en fin de parcours, à forger une réforme qui ait quelque chance de recueillir la super-majorité qu’elle requiert.

Oui, même si ce n’est pas joué d’avance, même s’il faudra beaucoup de tact et d’habileté, il doit être possible de sortir de cette crise par le haut.  »

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Philippe Van Parijs
Philippe Van Parijs© ISOPIX

« Prends ton temps » – Par Alain D’Haene – Citoyen, retraité

 » Dis Paul,

Ne t’emballe pas.

Y a pas plus le feu à la mer du Nord qu’au lac de l’Eau d’Heure.

Le déficit qui se creuse ? C’est pas ta faute.

Et ce n’est pas toi non plus qui pourra le combler.

Même ceux qui le voulaient expressément et qui l’avaient promis n’y sont pas arrivés.

Te presse pas. T’as le temps. Du moment que tu vas vite.

Vite dire aux autres qu’on veut à peu près tous la même chose.

Soit : vivre en paix avec nos proches, nos voisins et le reste du monde. Manger et boire assez ce qu’on aime. Se loger convenablement. Respirer de l’air pur à la campagne. Se soigner pas cher lorsqu’on est malade. Circuler librement.

Demande-leur s’ils ont des plans là-dessus.

Et s’ils n’en ont pas, laisse-les tomber.

Ils ne nous apporteront que des sujets de dispute.

Evite les querelleurs,

Pas de gouvernement à tout prix.

Pas avec n’importe qui.

[…] Donc, si tu peux, prends surtout le temps de recoller les morceaux avec des gens qui veulent ce pays entier.

L’affaire n’est pas de survivre encore cinq ans (moins quelques jours…), mais de reprendre l’initiative vers un retour à la solidarité.

Voilà, c’est bien cela : un retour à la solidarité.

Un bon plan simple et compréhensible qui vise prioritairement la reconstruction d’un pays sur base de l’intérêt commun de ses habitants.

Du nord comme du sud.

De la mer du Nord comme du lac de l’Eau d’Heure.

Sans oublier les Bruxellois.

Prends ton temps.  »

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Alain D'Haene
Alain D’Haene© DR

« Il est urgent de faire des concessions » – Par Olivier de Wasseige – Administrateur délégué de l’Union wallonne des entreprises

 » Cher Paul Magnette,

Mon rôle n’est certainement pas de dire quelle coalition vous devez privilégier, mais elle doit être majoritaire, suffisamment majoritaire pour ne pas être en danger comme ce fut le cas en Wallonie à la fin de la dernière législature. Son programme commun proposera un budget rigoureux et suffisamment ambitieux pour faire face au contexte économique moins favorable qui semble s’annoncer pour les prochains mois. Moins la conjoncture sera bonne, plus vite nous aurons besoin d’un gouvernement fédéral, c’est évident.

[…] Monsieur l’informateur, il est urgent de se parler, de faire des concessions et de s’entendre sur le plus grand dénominateur commun possible. Si chacun reste dans ses exclusives, nous serons encore au même stade dans deux ans. La vie en commun, que ce soit dans la société, une entreprise ou un ménage, nécessite des concessions. C’est une question d’état d’esprit. […]

Nous avons évidemment besoin d’une ambition pour ce pays. Nous avons besoin de cette identité belge forte avec Bruxelles au centre de l’Europe. Il est nécessaire d’avoir un gouvernement fédéral pleinement en charge, dans l’intérêt de toutes les Régions. C’est à ce niveau-là que l’on peut prendre en charge les nécessités socio-économiques, baisser les charges sur le travail et réformer l’impôt sur les personnes physiques pour augmenter le salaire poche des bas salaires. […] L’essentiel des compétences pour augmenter la compétitivité des entreprises se trouve au niveau fédéral. Il en va de même pour les indispensables réformes pour améliorer la mobilité ou diminuer le coût de l’énergie.

Nous n’avons pas le droit d’être en léthargie. Plus on attend, moins nous avons de contrôle sur les déficits. Nous engageons les générations futures. Monsieur Magnette, mon message s’adresse à vous comme il s’adresserait à n’importe quel informateur, de quelque parti qu’il soit.  »

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Olivier de Wasseige
Olivier de Wasseige© BELGAIMAGE

« Vous devez construire un nouveau Pacte social » – Par Edouard Delruelle – Professeur de philosophie politique à l’ULiège

 » Cher Paul Magnette,

[…] La Belgique se trouve face à une bifurcation historique, la plus importante peut-être de son histoire depuis 1945 : soit la fuite en avant néolibérale et sécuritaire incarnée par le gouvernement précédent se poursuit, avec des conséquences irréversibles sur la cohésion sociale, la démocratie et l’unité du pays ; soit les forces politiques, sociales, économiques arrivent à conclure un nouveau Pacte social et écologique, à condition d’inverser les politiques actuellement menées.

Votre défi, c’est de convaincre que le prochain gouvernement, quelle que soit la majorité, devra relever trois défis colossaux :

1. Sauver la sécurité sociale (douze milliards d’euros de déficit à l’horizon 2024, creusé par la politique irresponsable de définancement du gouvernement Michel).

2. Entamer la transition environnementale (exigée à cor et à cri par nos jeunes).

3. Restaurer l’Etat de droit (justice, police, fiscalité, services publics).

Nous n’allons pas droit dans le mur : nous sommes dans le mur ! L’enjeu, c’est : comment sortir du mur ? Monsieur l’informateur royal, vous devez essayer de faire de votre mission l’occasion d’une prise de conscience collective. Avec trois balises :

1. Etre pédagogique, transparent à l’égard de l’opinion publique. Expliquer l’importance et l’urgence des enjeux : c’est un choix de civilisation, pas un petit jeu d’intrigues politiciennes.

2. Ouvrir le débat à d’autres interlocuteurs que les partis : corps intermédiaires, milieux économiques, académiques, société civile.

3. Le plus difficile : convaincre les familles libérale et chrétienne qu’à force de casser l’Etat social et l’Etat de droit, elles scient la branche sur laquelle elles sont assises…

Vous devez convaincre nos concitoyens que l’enjeu n’est pas « le PS avec ou sans la N-VA ? » mais : « Un nouveau Pacte social est-il encore possible ? » Même au risque de nouvelles élections…  »

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Edouard Delruelle
Edouard Delruelle© BELGAIMAGE

« Démystifions la question migratoire » – Par Mehdi Kassou – Porte-parole de la Plateforme citoyenne pour l’accueil des réfugiés

 » Cher Paul Magnette,

Il est grand temps d’avancer car un pays ne peut pas rester sans gouvernance. Nous ne pouvons pas rester à la traîne du reste de l’Europe. Je regrette à cet égard la position du gouvernement en affaires courantes, en l’occurrence celle de Maggie De Block (Open VLD) de ne pas se joindre aux six pays qui ont décidé une répartition solidaire des réfugiés sauvés d’urgence en mer. J’envoie à l’informateur un message d’espoir afin qu’il génère une démystification des problèmes migratoires en Belgique et que l’on puisse enfin aborder cette question de façon sereine, apaisée, pragmatique. L’attitude de certains interlocuteurs lors de la dernière législature a empêché tout dialogue et utilisé une rhétorique qui a crispé la situation. J’espère de tout coeur que vous pourrez contribuer au début d’une nouvelle ère. Et que vous démontrerez qu’il est possible de mener une politique ambitieuse dans ce domaine, comme c’est désormais le cas en Région bruxelloise. « 

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Mehdi Kassou
Mehdi Kassou© BELGAIMAGE

« Utilise la Force de l’adversaire » – Par Nicolas Vadot – Dessinateur de presse

 » Cher Paul Magnette,

Vous citez Lao Tseu, c’est bien, ça fait intello. Mais je vous avoue que je ne suis pas familier du gaillard. Je connais beaucoup mieux Yoda. Vous pourriez vous en inspirer, ça mettrait les geeks de votre côté. Vous avez déjà les bobos ; or, les geeks sont d’une autre tribu. Car on parle bien de tribus, en Belgique, de nos jours, plus que d’un pays.

« Paul, le dernier des Jedi tu seras. »

« Beaucoup à apprendre, tu as encore. »

« Robuste je suis grâce à la Force, mais pas à ce point-là. Le crépuscule m’envahit et bientôt tomber la nuit va. »

J’ai aussi trouvé ce proverbe égyptien qui devrait parler à l’émérite boulanger que vous êtes : « Le pain croustillant est pour celui qui sait le chercher. »

Je vais vous faire une confidence : nous avons 11 jours d’écart : vous êtes né le 28 juin 1971, moi le 17. Je suis donc votre aîné, donc permettez-moi de vous tutoyer.

Tu as vu le récent rapport du Giec sur le climat ? En 2100, Termonde sera une station balnéaire et Ostende sera sous eau (on comprend mieux pourquoi Marc Coucke investit tant à Durbuy : il anticipe son statut de réfugié climatique).

[…] Donc, si j’étais à ta place (ce qui n’est pas le cas, Alleluia, pour reprendre une expression chère à tes – peut-être – futurs partenaires du CD&V), je ne commencerais pas à revenir avec tout le bazar social(isant) qui crispe tant de l’autre côté de la frontière linguistique, mais je leur ferais comprendre ce qu’est la realpolitik : sans les francophones, d’ici 80 ans, ils seront comme Kevin Costner dans Waterworld : des naufragés prêts à tout pour trouver de la terre ferme. Le rapport de force est en ta faveur, si tu pars perdant « avec deux chances sur dix de réussir » comme tu dis, ça ne fonctionnera pas. Pratique le judo, utilise la Force (avec une majuscule, comme dans Star Wars) de l’adversaire et montre-leur que c’est toi le plus fort, comme tu as fait avec Elio !

Voilà, je pense t’avoir bien aidé, Paul Skywalker, enfin j’ai essayé, un peu comme tout le monde. Mais es-tu plus avancé pour autant ?

Alors une petite dernière pour la route : « On gouverne un Etat comme on cuit un petit poisson : avec précaution. » C’est du Lao Tseu. « 

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Nicolas Vadot
Nicolas Vadot© DEBBY TERMONIA

« N’écoutez pas les conseils » – Par Freddy Tougaux – Humoriste

 » Cher Paul Magnette, si je pouvais vous donner un conseil, ce serait de ne pas écouter les conseils… sauf le mien.  » L’humoriste Freddy Tougaux, en charge du  » micro-terroir  » du Grand cactus à la RTBF, a enregistré une vidéo désopilante.

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« Il faudra peut-être repenser le modèle démocratique » – Par Pierre Rion – Business angel wallon

 » Cher Paul Magnette,

Je suis bien en peine de vous conseiller car la situation est très compliquée, voire inextricable si personne ne met d’eau dans son vin. Je pense que votre approche – à savoir partir d’un biais différent pour considérer d’abord les besoins du pays, mais en ayant l’intelligence de faire fi de ce que le populisme ambiant a fait croire à la population, lui faisant pour une part grandissante voter un peu n’importe quoi – est une approche qui mérite certainement une itération supplémentaire. Si cela ne fonctionne pas et que nous devons retourner aux urnes, il faudra peut-être oser repenser le modèle démocratique actuel. J’ignore de quelle façon, mais il devra intégrer une conscience individuelle bien mieux informée. A défaut, nous irions vers une polarisation encore plus accentuée des choix électoraux. De toute façon, une crise aiguë s’impose aujourd’hui pour faire bouger les positions.  »

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Pierre Rion
Pierre Rion© BELGAIMAGE

« Faites-nous rêver » – Par Baudouin Meunier – Administrateur délégué du CHU Mont-Godinne-Dinant, professeur invité à l’UNamur et cofondateur de la plateforme citoyenne eChange.

 » Monsieur l’informateur,

D’abord bravo pour la méthode annoncée. Avec eChange, nous la proposons depuis longtemps et avons cherché à la mettre en oeuvre à l’essai dans des débats organisés avec Le Vif/L’Express avant les élections, lesquels ont trouvé écho dans ce magazine.

Permettez-moi dès lors de poursuivre brièvement le « discours sur la méthode » :

1. Faites-nous rêver ! Nous, pauvres citoyens, rêvons d’entendre les responsables politiques fixer des ambitions qui répondent aux défis qui nous touchent vraiment : par exemple, créer 200 000 vrais emplois dans les secteurs boostés par le numérique, diminuer la pauvreté infantile de 50 %, réduire les temps de déplacement de 30 % en cinq ans, sortir du nucléaire par étapes, sans effets négatifs sur notre approvisionnement, sur les prix et sur les émissions de CO2, ou même améliorer de 20 % la valeur des soins pour le patient, définie comme le rapport entre l’impact sur sa santé et le coût encouru…

2. Impliquez le maximum de partis démocratiques. Il est, comme vous le dites, sans doute plus facile de s’entendre sur des projets que sur une coalition. Et ces projets vont probablement demander plus de temps que celui d’une législature. Autant y inclure le maximum de partenaires, pour éviter les remises en question stériles à peine l’impulsion est-elle donnée.

3. Prenez votre temps avant d’aller dans les détails de ces projets. Fixez-en maintenant le cadre et les principales composantes. Et mettez-vous d’accord sur la suite de votre méthode nouvelle. Confiez l’élaboration détaillée des plans d’action qui mettent en oeuvre ces ambitions à l’administration, des experts et des représentants de la société civile. Impliquez les partenaires sociaux. Cherchez quand c’est possible à mêler les gouvernements des entités fédérées. Notre lasagne institutionnelle fait que l’efficacité de ces plans d’action dépend souvent de compétences partagées et demande une cohérence dans l’action des différents niveaux de pouvoir. Et soumettez ces plans pour un débat de fond au parlement.

4. Rendez nos institutions plus efficaces, donc plus légitimes. […] Mettez en chantier une septième réforme de l’Etat en dehors des travaux gouvernementaux, et, à nouveau, en impliquant au maximum la société civile dans toutes ses composantes. Son objectif ne sera pas de faire plaisir à un parti ou l’autre, mais de rendre possible, matière par matière, un minimum d’autonomie dans les compétences de l’Etat central et des entités fédérées (en ce compris, en refédéralisant certaines compétences si nécessaire) et, lorsque ce n’est pas possible, de prévoir des règles du jeu qui organisent la collaboration entre les différentes entités.

[…] Vous avez un sacré boulot à réaliser, Monsieur Magnette, mais comme disait Lao Tseu… « 

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Baudouin Meunier
Baudouin Meunier© DR

« Etudions l’avenir possible pour l’Etat belge » – Par Hugues Dumont – Professeur à l’université Saint-Louis, à Bruxelles

 » Cher Paul Magnette,

Vous allez tenter de former un gouvernement minoritaire. Très bien : il est important que le pays sache jusqu’où l’Open VLD et le CD&V sont attachés à la prétention de la N-VA à être incontournable. Une façon loyale de les convaincre d’entrer dans ce gouvernement, tout en ne se montrant pas sourd à la demande de la N-VA d’ouvrir le débat sur le confédéralisme, consiste à confier au Sénat la rédaction d’un rapport d’information approfondi sur les différents scénarios d’un avenir possible pour l’Etat belge. A mes yeux, il est temps d’associer à cette étude un panel représentatif de citoyens tirés au sort, même s’il est clair que le rapport d’information ne pourra être formellement adopté in fine que par les élus.

Les sujets seraient abordables par des citoyens de bonne volonté, moyennant leur éclairage par des experts-pédagogues. Elus et tirés au sort gagneraient d’abord à bien prendre la mesure de ce que signifie encore un Etat aujourd’hui à l’heure de la mondialisation et de la crise de l’intégration européenne. Sous le bénéfice de cette réflexion préliminaire, ils devraient examiner toutes les conséquences qui résulteraient d’une éventuelle scission de l’Etat belge en prenant en compte les différentes façons possibles de concevoir et d’organiser cette scission, ainsi que les différents processus de création et les chances de développement des micro-Etats qui prendraient la place de l’Etat défunt. Ils devraient aussi prendre une connaissance précise des dysfonctionnements dont souffre l’Etat belge tel qu’il est organisé aujourd’hui, le millefeuille institutionnel bruxellois méritant une attention toute particulière.

Il leur reviendrait de passer alors en revue tous les scénarios de restructuration ou de déstructuration possibles de l’Etat, avec les divers modes de financement qui vont de pair, notamment les schémas tantôt abusivement, tantôt adéquatement qualifiés de confédéraux, le transfert des compétences résiduelles aux entités fédérées conformément à l’article 35 de la Constitution, la montée en puissance des appartenances régionales dans une Belgique à quatre ou, inversement, des deux principales Communautés dans une Belgique à deux.

Si ce travail est bien mené, le rapport d’information qui en résulterait serait l’instrument idéal pour forcer chacune des formations politiques à prendre des positions claires sur l’avenir de l’Etat ou sa disparition. Les citoyens seraient ainsi mis en mesure, le jour venu, d’élire en connaissance de cause les membres d’un Congrès national. Celui-ci serait distinct du Parlement parce qu’investi non pas du pouvoir législatif mais du pouvoir constituant originaire qui était celui du Congrès national de 1830-1831. Une telle assemblée ad hoc, élue selon une procédure exceptionnelle à fixer par les Chambres rendues constituantes par l’adoption d’une déclaration de révision, aurait le pouvoir de décider de la suppression de notre Etat ou de sa refondation sur de nouvelles bases, le cas échéant moyennant la ratification de sa décision par un référendum d’autodétermination.

En cas d’échec de la formation du gouvernement minoritaire à laquelle vous aspirez, les inévitables élections devraient être déclenchées par l’adoption d’une telle déclaration de révision de la Constitution qui rendrait la mise sur pied de cette procédure exceptionnelle possible.  »

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Hugues Dumont
Hugues Dumont© BELGAIMAGE

« Votre lucidité m’a impressionné » – Par Etienne Davignon – Ministre d’Etat

 » Cher Paul Magnette,

Il serait prétentieux de ma part de vous donner des conseils ou présenter des suggestions.

La lucidité de votre première conférence de presse m’a impressionné.

En effet, ce dont le pays a urgemment besoin est l’identification concrète des défis de tout ordre qui interpellent le pays et la recherche de la manière de les rencontrer.

C’est évidemment la mission d’un gouvernement de plein exercice disposant d’une majorité parlementaire.

Il ne suffit pas de se demander comment réunir une majorité si l’on ne détermine pas ce que sera son programme.  »

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Etienne Davignon
Etienne Davignon© BELGAIMAGE

« L’arc-en-ciel est le chemin le plus court vers le séparatisme » – Par Pieter Bauwens – Rédacteur en chef du site flamingant Doorbraak.be

 » Cher Paul Magnette,

En tant que Wallon, vous voulez former un gouvernement arc-en-ciel (socialistes, libéraux, écologistes). Vous avez raison. Les résultats électoraux en Wallonie vous y contraignent. Mais quand même : du côté flamand, cette coalition arc-en-ciel n’a pas de majorité. Davantage encore : il y a de grandes chances que la politique menée par cet arc-en-ciel ne soit pas du tout du goût des Flamands. Le risque d’un retour de flamme est inévitable en 2024.

Je suis convaincu, Monsieur Magnette, qu’une telle coalition arc-en-ciel provoquerait précisément le contraire de ce que vous souhaitez. Vous pourriez gouverner de façon joyeuse pendant quatre ans et demi. Oui, vous donneriez l’impression qu’il n’y a aucun problème structurel en Belgique. Mais en niant le problème, vous risqueriez de le rendre plus grave encore.

L’arc-en-ciel est le chemin le plus court vers le séparatisme. Les nationalistes flamands vous en seraient reconnaissants. En 2024, la chance serait très grande que l’on se retrouve le dos au mur au vu des résultats électoraux en Flandre. La N-VA et le Vlaams Belang, en profitant de leur travail dans l’opposition fédérale, pourraient gouverner ensemble au niveau flamand et devenir incontournables au fédéral. Et tout cela, grâce à l’arc-en-ciel…

Cher Monsieur Magnette, la structure belge, telle qu’elle découle de six réformes de l’Etat, est un obstacle à une bonne gestion. Cela prend beaucoup trop de temps pour former un gouvernement fédéral à des moments où les changements arrivent à grande vitesse. Les gouvernements qui sont finalement formés minorisent une partie du pays ou s’ensablent dans une politique centriste qui ne résout rien.

Votre tâche, Monsieur l’informateur, est de constater si les responsables politiques de ce pays peuvent encore réussir à porter une vision d’avenir commune pour la Belgique. Comment éviterons-nous les prochains blocages ? Comment générerons-nous les réformes indispensables ? Comment, tout simplement, ferons-nous en sorte qu’une politique ambitieuse puisse être menée ?

Il est temps que l’on prenne au sérieux les différences qui existent dans ce pays et qu’on les traite. Aujourd’hui, la Belgique se trouve au bord de l’effondrement. L’arc-en-ciel serait un grand pas en avant dans cette direction.  »

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Pieter Bauwens
Pieter Bauwens© DR

« Surtout, tenez vos promesses » – Par Jean Hermesse – Secrétaire général de la Mutualité chrétienne

 » Cher Paul Magnette,

Rassurez-nous. Nous avons besoin de stabilité budgétaire et d’une vision à long terme qui tienne compte de l’évolution des besoins, avec un plan pluriannuel clair et tenu. La stabilité est indispensable pour libérer les inquiétudes, pour oser innover, être prêt à prendre des risques, mener une politique de santé transversale et porteuse de sens. L’instabilité, les changements continus minent l’initiative.

Faites-nous rêver. La qualité de vie ne se résume pas au pouvoir d’achat, à l’équilibre budgétaire. Le développement des liens sociaux va faire croître le capital social, celui qui donne du bonheur et de l’espoir pour tous, celui qui brise la solitude et l’individualisme. Pour cela, il faut miser sur la solidarité, sur les transports en commun, sur la mobilité douce, sur un environnement sain, sur des places, des parcs publics, des services collectifs, un aménagement du territoire qui favorisent les liens et la cohésion sociale.

Tenez vos promesses. Ne nous promettez pas la lune, des objectifs lointains inatteignables, des effets d’annonce. Parlez vrai. Le coût du vieillissement de notre population nécessitera plus de moyens. Ne choisissez que quelques grands objectifs, tentez d’y faire adhérer le plus grand nombre, Régions et Communautés, et tenez le cap. Rendez-nous confiants dans la politique.  »

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Jean Hermesse
Jean Hermesse© FREDERIC RAEVENS

« Il faut doper le pouvoir d’achat » – Par Robert Vertenueil – Président de la FGTB

 » Cher Paul Magnette,

[…] La FGTB a identifié au moins trois domaines d’actions qu’elle juge prioritaires.

D’abord, face à l’augmentation des inégalités sociales (une personne sur cinq en Belgique est en situation de pauvreté), il est temps d’apporter des réponses sérieuses aux préoccupations sociales. Il faut prioritairement s’attacher à augmenter le pouvoir d’achat des citoyens. C’est pourquoi la FGTB demande :

– De rehausser les allocations sociales minimales au dessus du seuil de pauvreté (actuellement 90 % des allocations sociales minimales sont en-dessous du seuil de pauvreté) ;

– De porter la pension minimum à 1 500 euros net et prévoir que la pension corresponde à 75 % du salaire moyen du travailleur ;

– D’augmenter le salaire minimum à 14 euros/heure (2 300 euros/mois).

Dans une économie (comme le dit la Commission européenne dans son rapport automnal 2019) largement influencée par sa consommation intérieure, cet objectif prend tout son sens. Ainsi, doper le pouvoir d’achat des travailleurs, des allocataires sociaux, des pensionnés, de la majorité des citoyens, permet non seulement de réduire les inégalités mais aussi de stimuler notre machine économique.

Ensuite, face au risque d’implosion de notre sécurité sociale et aux menaces qui pèsent sur notre modèle (vieillissement, volonté de privatisation ou de régionalisation), nous plaidons pour une sécurité sociale fédérale, forte et solidaire, qui soit financée justement. Celle-ci devra répondre demain à la promesse de protéger nos citoyens à tous les stades de la vie.

Enfin, comme nous le disons aux côtés des milliers de jeunes, nous estimons que le prochain gouvernement devra agir de manière résolue et déterminée pour lutter contre le réchauffement climatique et la menace d’atteinte d’un point de non-retour. Il n’y a pas d’emploi possible sur une planète morte.

J’en terminerai en espérant que les personnalités politiques puissent dépasser leurs différences pour donner à notre pays la chance qu’il mérite. La complexité institutionnelle et politique ne peut en aucun cas être utilisée comme prétexte pour accroître la précarité et la pauvreté. « 

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Robert Vertenueil
Robert Vertenueil© BELGAIMAGE

« Vous avez les solutions, donc agissez » – Par Antoine Lebrun – CEO du WWF

 » Cher Paul Magnette,

Il ne devrait guère être difficile pour le prochain gouvernement d’aller de l’avant en matière environnementale. Dans l’accord de la coalition précédente, les mots « nature » et « biodiversité » n’étaient même pas mentionnés. Or, les besoins sont immenses et les solutions possibles entre vos mains.

La biodiversité décline en Belgique. Bien que les Régions disposent des principaux instruments, l’Etat fédéral a l’obligation d’en assurer la coordination et dispose malgré tout de clés importantes en matière de production et de consommation.

Les solutions entre vos mains ?

– Arrêter de subsidier les énergies fossiles, c’est le cas à hauteur de 2,7 milliards actuellement.

– Mettre en place une stratégie nationale en matière de lutte contre la déforestation importée, c’est-à-dire l’importation de produits ayant causé d’importantes déforestations.

– Arrêter le commerce international de bois, qui entre en Europe via notre pays en raison d’un manque de contrôle de nos douanes.

– Protéger de façon ambitieuse la mer du Nord.

– Elaborer un plan national pour les pollinisateurs.

A vous d’agir, Monsieur Magnette.  »

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Antoine Lebrun
Antoine Lebrun© BELGAIMAGE

« Diaboliser la N-VA est insensé » – Par Jules Gheude – Essayiste

 » Cher Paul Magnette,

Au fil des décennies, la Flandre a fini par se constituer en nation. Diaboliser la N-VA est une chose insensée. En plaidant pour le confédéralisme, Bart De Wever ne fait que donner suite aux fameuses résolutions que le parlement flamand a adoptées en 1999 et qui étaient calquées sur le projet confédéraliste proposé dès le début des années 1990 par le ministre-président flamand CVP, Luc Van den Brande. Wouter Beke, l’actuel président du CD&V, a d’ailleurs déclaré en 2007 :  »Nous voulons une véritable confédération où chacun pourra agir comme il l’entend. »

[…] Wouter Beke, encore lui, a précisé qu’une nouvelle réforme de l’Etat devrait avoir lieu en 2024 et son coreligionnaire Koen Geens, négociateur CD&V, a annoncé qu’il était hors de question que son parti s’engage au fédéral sans la N-VA.

Tout cela confirme les propos tenus naguère par l’ancien ministre CVP Stefaan De Clerck :  »La relation entre le nationalisme et la démocratie chrétienne est profondément ancrée dans l’ADN flamand. »

Le démantèlement de l’Etat est donc un processus inéluctable. Lors de la crise de 2010-2011, un rapport de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française avait conclu que la division de la Belgique en deux groupes linguistiques de plus en plus cohérents et dissemblables rendait son existence de moins en moins probable. Les résultats des élections de mai 2019 n’ont fait que renforcer ce constat.

En 1981, François Perin, le grand militant wallon, avait déclaré :  »Cela fait des années que je pressens ce qui va arriver. Après d’éventuelles élections qui n’auront qu’exacerbé le malaise dû à une crise financière et économique insoluble, le malheureux chef de l’Etat se mettra à courir après un gouvernement introuvable : la Belgique peut disparaître par implosion. »

Nous y sommes ! Il faut avoir le courage de le reconnaître et de renoncer aux vains combats d’arrière-garde.  »

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Jules Gheude
Jules Gheude© HATIM KAGHAT

« Que pouvez-vous réellement faire ? » – Par Alain Berenboom – Avocat et écrivain

 » Cher Paul Magnette,

Le problème, c’est de savoir ce que vous êtes réellement en mesure de faire. Le pouvoir fédéral s’est de longue date dépecé d’une grande partie de ses compétences. Le grand enjeu du moment est l’environnement, mais dans notre pays compliqué, le fédéral n’a pas la main, il y a énormément de ministres compétents et l’on voit à chaque COP la difficulté de rédiger un texte commun. Le deuxième problème majeur, du moins aux yeux de la population, c’est l’immigration et, au-delà des discours scandaleux de Theo Francken, on se rend compte que le gouvernement fédéral ne peut pas faire grand-chose. Dans un cas comme dans l’autre, l’enjeu est largement européen.

Le seul problème que vous pouvez prendre réellement à bras-le-corps, c’est la justice. On ne peut pas considérer qu’il y a un troisième pouvoir s’il est dans l’incapacité d’agir. Aujourd’hui, un justiciable doit attendre un an pour un jugement en première instance, de trois à cinq ans en appel. Or, un pays qui n’a pas de justice efficace est un pays qui ne fonctionne pas. J’ai beaucoup de respect pour Koen Geens (CD&V), le ministre sortant de la Justice, mais il ne peut pas grand-chose. Or, pour l’instant, cela reste une compétence fédérale. Et le grand test sera d’éviter que les Flamands ne demandent pas une défédéralisation. Le gouvernement flamand n’a-t-il pas déjà désigné une ministre de la Justice en la personne de Zuhal Demir (N-VA) ?

L’autre problème majeur de la Belgique, c’est l’enseignement. Je sais qu’il s’agit d’une compétence communautaire mais, idéalement, le fédéral devrait pouvoir contribuer à son bon fonctionnement en y investissant, lui aussi. Monsieur Magnette, le fédéral doit cesser de mettre la tête dans le sable et laisser le champ libre aux Régions et Communautés dans les compétences qui intéressent les citoyens.  »

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Alain Berenboom
Alain Berenboom© BELGAIMAGE

« Gardez le pied sur l’accélérateur » – Par Isabella Lenarduzzi – Entrepreneure sociale, fondatrice de Jump (qui promeut la place des femmes dans les entreprises)

 » Cher Paul Magnette,

En matière d’égalité, si on n’avance pas, on recule. En matière d’égalité femme-homme, le dernier gouvernement fédéral a brillé par sa mauvaise volonté (au pire) ou son dilettantisme (au mieux). Une législature a suffi pour faire reculer la Belgique dans le classement réalisé par l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (Eige) de la 6e à la 8e place. Nous sommes aussi le seul pays à avoir voté un quota pour le genre le moins représenté au sein des conseils d’administration des sociétés cotées mais sans le respecter ! Nous devrions avoir au minimum 33 % d’administratrices depuis le 31 décembre 2017 et nous arrivons péniblement à 31 %. Et les 20 % des sociétés qui ne sont pas en règle ne se voient ni réprimandées ni infliger les sanctions prévues par la loi de 2011 : invalidation des décisions du CA et non rétribution de ses membres. […] Nous sommes également dans le bas du classement européen en ce qui concerne la mixité des métiers : 40 % des femmes travaillent dans le secteur des soins ou de l’éducation contre 11 % des hommes, et 6 % seulement de femmes sont dans les Stem (sciences, technologies, ingéniérie, maths) contre 34 % des hommes. Tous les métiers à dominante masculine ou, inversement, à dominante féminine, sont des métiers en pénurie !

Si on veut que la société soit réellement plus égalitaire, il faut faire respecter les lois existantes ; instaurer de nouveaux objectifs et indicateurs ; classer les entreprises selon ceux-ci ; être exemplaires au niveau de la fonction publique (un seul SPF est dirigé par une femme) : imposer aux grandes sociétés des plans d’égalité et de formation à l’inclusion de tous les talents, comme en France ; inciter les mères à revenir sur le marché du travail pour réduire leur risque de pauvreté et celui de leurs enfants ; obliger tous les membres du nouveau gouvernement à suivre une formation aux stéréotypes, aux privilèges et biais inconscients.

Rappelez-vous que l’égalité, c’est comme une voiture dans une montée : si vous n’avez pas constamment le pied sur l’accélérateur, vous reculez tout de suite. « 

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Isabella Lenarduzzi
Isabella Lenarduzzi© DR

« Un arc-en-ciel ou, si c’est impossible, la clarté » – Par Marc Uyttendaele – Avocat et constitutionnaliste

 » Cher Paul Magnette,

Monsieur l’informateur, « Avec le temps. Avec le temps va tout s’en va. On oublie les passions et l’on oublie les voix Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens. Ne rentre pas trop tard surtout ne prends pas froid. » Voilà les mots que j’ai envie aujourd’hui de vous murmurer. Le temps s’écoule, de manière indicible, depuis le 21 décembre de l’année passée, date où la Belgique a perdu son gouvernement, depuis le 26 mai dernier, date où la Belgique est devenue ingouvernable ou presque.

Le temps passe. Le temps corrode. Le temps abîme la parole politique. Nul ne pourra vous reprocher de ne pas vous allier avec votre exact contraire au seul motif que le pays doit être doté d’un gouvernement. En ce faisant, vous auriez trahi ceux qui vous ont fait confiance. On ne peut tout à la fois reprocher à votre parti son goût immodéré du pouvoir et sa volonté de ne pas y accéder en bradant ses idéaux. […] Si vous pouvez dessiner dans le ciel national un arc-en-ciel, il ne faudra pas hésiter à avancer, à célébrer le courage de vos partenaires néerlandophones tout en regrettant – mais toute autre solution aurait été impossible – que ce gouvernement ne soit pas soutenu par une majorité au nord et au sud du pays. […]

Mais si cette option devait être impossible à mettre en oeuvre, il faudra la clarté. Faire l’inverse de ce que le monde politique fait depuis le 21 décembre 2018 : admettre l’existence d’un fossé entre les Communautés, admettre que la Belgique est confrontée à une crise existentielle et cesser de considérer les élections comme un virus dont il faut à tout prix se prémunir. Il vous faudra alors proposer des formules originales qui conduisent à un vrai débat national sur le devenir du pays et à rendre la parole aux électeurs. Il vous faudra proposer que la Constitution soit, dans son ensemble, soumise à révision et inviter tous les partis politiques à soumettre aux citoyens ce que doit être à leur sens la Belgique demain, celle qui, aujourd’hui, est déjà plus que coupée en deux. En ce faisant vous redonnerez son lustre à la parole politique.

Mais il est une certitude : il ne faut plus traîner. Il faut enrayer le processus de décomposition démocratique qui, sournoisement, progresse tous les jours. Faire vite Monsieur l’informateur. Voilà pourquoi je vous murmure : « Ne rentre pas trop tard. Ne prends pas froid. »

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Marc Uyttendaele
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« Celui qui se vainc lui-même est fort » – Par Dave Sinardet – Professeur de sciences politiques (VUB/Université Saint-Louis) et chroniqueur à De Standaard

 » Cher informateur royal,

[…] Presque tous les partis appelés à gouverner ont royalement perdu les élections et se retrouvent donc dans des crises d’identité et de leadership. Les plus grands gagnants étant le Vlaams Belang et le PTB, 30 des 150 sièges à la Chambre ne sont pas  »utilisables ». Beaucoup de coalitions « logiques » (centre-gauche, centre-droit, tripartite traditionnelle) ne sont dès lors plus possibles. Il y a aussi la dualité du système politique belge, avec un résultat électoral nettement différent au nord et au sud. Etcetera.

Mais […] pourrait-on un peu regarder ailleurs que notre nombril ? Dans beaucoup d’autres pays européens, les cartes ont tout autant été battues de manière difficile par les électeurs, résultant dans des paysages politiques également fortement fragmentés avec des partis radicaux antiestablishment qui gagnent du terrain et des partis traditionnels qui en perdent, obligeant à des coalitions contre nature ou à des gouvernements minoritaires formés par des partis en crise.

Une différence fondamentale avec la Belgique n’est-elle pas que dans ces autres pays, les responsables politiques prennent… leurs responsabilités ? En Italie, par exemple, quelques jours ont suffi pour former un gouvernement entre deux partis qui s’étaient violemment affrontés, en remplacement d’une autre coalition tout aussi contre nature.

Chez nous, presque six mois après les élections, certains osent encore dire qu’il est « trop tôt » pour commencer une vraie formation. Vous devez comprendre que je ne peux plus prononcer de telles phrases de façon crédible. Il est vrai que dans sa recherche d’excuses, le monde politique est aidé par certains commentateurs, qui parlaient déjà de nouvelles élections le jour d’après… les élections. Personnellement, je ne veux en tout cas pas contribuer à justifier que, sans aucune gêne, les stratégies et tracas partisans passent avant la formation d’un gouvernement auquel la population a plus que droit.

Je vous souhaite donc tout le succès du monde dans vos tentatives de faire revenir le sens des responsabilités, et d’abord dans votre propre parti. Car, sachant que vous aimez les pensées de Lao Tseu : « Celui qui vainc les autres a de la force. Celui qui se vainc lui-même est fort ». « 

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Dave Sinardet
Dave Sinardet© BELGAIMAGE

« Faites de la démocratie participative le fil conducteur d’une solution politique partagée » – Par Fatima Zibouh – Doctorante en sciences politiques et sociales

 » Cher Monsieur Magnette,

[…] Il est peut-être temps de questionner notre modèle de démocratie représentative qui permet de confier aux élus, une fois les résultats des urnes connus, les commandes de l’Etat… surtout si ces derniers n’y arrivent plus ! […] Il est temps de saisir cette occasion des négociations en vue d’un gouvernement fédéral pour réfléchir à la façon dont on peut mieux impliquer les citoyens, les citoyennes mais aussi les acteurs de la société civile. Bref, il s’agit de réoxygéner un modèle de démocratie, vers plus d’interaction, vers plus de délibération, vers plus de participation.

[…] Aujourd’hui, on ne peut plus se permettre de demander l’avis des citoyens tous les cinq ans par le biais des urnes, il faut créer des espaces d’échanges et de rencontres pour mieux les impliquer dans les prises de décisions publiques. Ils font partie de la solution. Comment ? Plusieurs pistes ont été proposées, notamment à travers le mécanisme du tirage au sort. Certains proposaient même que le Sénat devienne cette antichambre délibérative, une agora citoyenne, pour discuter des enjeux tels que le climat, les pensions ou l’immigration. Pourquoi pas ? Mais il faut aller plus loin que le tirage au sort pour veiller à ce que ce modèle soit le plus inclusif possible et tenir compte des voix des citoyens qui viennent, par exemple, de milieux populaires ou des plus jeunes… leur voix compte aussi et ils ne sont pas toujours pris en considération. Remettre à l’ordre du jour de l’agenda politique la mise en place de la circonscription fédérale pourrait aussi permettre d’avoir un espace pour créer un lien entre tous les citoyens du pays en traçant un horizon commun, car ce qui nous manque profondément, c’est aussi cette vision commune dans cet espace partagé qu’est la Belgique.

On peut encore réfléchir à d’autres pistes innovantes en matière de démocratie participative pour renforcer l’efficacité et la légitimité de nos institutions. Les études montrent qu’investir dans l’inclusion et dans la diversité renforce le sens mais aussi les performances des entreprises. Ces résultats pourraient être partagés pour réfléchir une meilleure gouvernance pour notre pays. […]  »

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Fatima Zibouh
Fatima Zibouh© DR

« Vous pourriez marquer l’histoire de ce non-pays » – Par Pierre Kroll – Caricaturiste

 » Cher Paul Magnette,

Je suis parfois las de vivre dans ce non-pays. […] Alors, il m’arrive de penser que la Wallonie devrait partir, ou presser les autres de le faire mais ce n’est apparemment pas possible non plus parce qu’il y a Bruxelles – me dit-on – et parce que, comme en témoigne l’exemple catalan, l’Europe ne le permettrait pas. Le confédéralisme ? Je ne peux pas m’empêcher de penser que ses partisans ne souhaitent pas que ce soit une formule qui marche, mais un truc qu’ils saborderont aussi pour montrer que rien n’est possible ensemble.

Je vais vous dire : au fond… je m’en fous. Je continue à voter par obligation.

[…] J’ai des enfants qui vivent à Washington et à Londres. Ils y rencontrent évidemment des Flamands. Ils se parlent en anglais et même pas de la Belgique. Ils n’ont pas quitté un pays qu’il fallait fuir. Non, ils s’en foutent ! Ils ne sont ni pessimistes, ni optimistes, ils sont dans une autre dimension. Pour eux, tout cela n’a plus d’importance, ils ont une identité d’un genre nouveau, transportable.

Je pense parfois que la Belgique pourrait aller de l’avant et donner précisément naissance à un projet d’un genre nouveau, avec de l’enthousiasme et qui fonctionne bien, comme c’est le cas dans des pays scandinaves. Parce que, dites-moi, Monsieur l’informateur, c’est quoi le projet actuel de la Belgique ? Elle ne parvient même pas à faire son état des lieux, comment pourrait-elle faire des plans ?

Faire de ce pays un seul vrai pays n’est plus possible. Se séparer pour en faire deux (ou trois ou quatre) non plus. Alors ?

Vous pourriez peut-être marquer l’histoire de ce non-pays, en faisant comprendre que le redressement de la Wallonie est dans l’intérêt de tous, mais je crois que vous essayez déjà, ou peut-être aussi en osant remettre tout sur la table (je crois que vous appelez ça un dialogue institutionnel) mais vraiment tout ! Et si les Flamands veulent leur indépendance pour économiser six milliards d’euros et bien tant pis, vous aurez accéléré les choses. Merci.

Et si vous n’arrivez à rien, qu’on convoque de nouvelles élections ? Si une majorité se dégage en Flandre avec la N-VA et le Vlaams Belang, ça aura le mérite de la clarté. Nous, Wallons, pourrions alors enfin nous tenir debout dans l’adversité pour dire que nous ne voulons rien avoir à faire avec des fascistes… Vous aurez aussi accéléré un peu les choses. Bon travail, à bientôt.  »

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Pierre Kroll.
Pierre Kroll.

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