César Botero González
Quand, par qui et comment remplacer Elio Di Rupo ?
Tout d’abord, laissons-nous guider par cette pensée sublime de Georges Clemenceau : « Les cimetières sont pleins de gens irremplaçables, qui ont tous été remplacés ». Inspiré par cette sagesse, je dirais : si tous les présidents de partis doivent être remplacés un jour, pourquoi diables postposer sine die la joie ou le chagrin de leur remplacement, lorsque les circonstances l’exigent ?
Critiquer c’est facile, c’est même vilain si on ne propose pas de solutions. Dans « Elio Di Rupo doit démissionner » publié ici même le 30 janvier, j’explique pourquoi. Voici donc la suite logique « Quand, par qui et comment remplacer Elio Di Rupo« . C’est une modeste proposition à la crise que traverse le PS. Elle veut encourager les débats d’idées. Le PS, malgré les scandales, reste un parti démocratique. Mais attention à ceux qui pensent sans le dire « Si nous voulons que tout reste tel que c’est, il faut que tout change. » G.T. di Lampedusa dans « Le guépard »
Quand faut-il remplacer Elio Di Rupo ?
Le plus tôt possible avant les élections de 2018. Le remplacer en 2019, à la fin de son 4e mandat après la défaite c’est trop tard pour cinq raisons :
- Les principaux problèmes du PS, ne sont pas Publifin, la bande liégeoise des cinq ou l’un ou l’autre margoulin qui sévit dans d’autres contrées de la Wallonie ou à Bruxelles. De plus, ce sont le président du parti et un groupe de dirigeants obligés de le soutenir pour se maintenir aux postes clefs. C’est de l’entraide entre copains.
- Ces gens encombrent le paysage politique depuis des années. Ils ont donné ce qu’ils pouvaient donner et ils n’en donneront pas plus. Et puis, on ne comprend pas pourquoi ils veulent s’accrocher au pouvoir jusqu’à la défaite du parti. Pourquoi faire compliqué quand il y a moyen de faire simple ?
- En quelque mois, ceux que Di Rupo avait promis de traquer lui-même il y a 11 ans, doivent être mis hors d’état de nuire avec l’aide de sa cour et de tous les militants. S’il y parvient, cela ne lui donne pas le droit d’aller jusqu’au bout de son mandat. Il ne fait que payer sa dette envers la Wallonie, Bruxelles et les socialistes après tant d’années d’insouciance et de mollesse.
- Une fois ce travail accompli, Di Rupo et ses acolytes doivent s’en aller. Ce serait un geste fort et un bel exemple. Le parti deviendra crédible, les militants reprendront des couleurs et les citoyens donneront une nouvelle chance au PS. On pourrait même leur rendre un hommage régional pour leur sens du devoir.
- Après le départ des anciens, sous les applaudissements nourris d’un parti reconnaissant, la nouvelle équipe s’installe avec son nouveau président et se met au travail. Galvaniser les troupes, préparer les élections de 2018 et 2019, continuer à mettre de l’ordre, élaborer un projet politique mobilisateur. Et pourquoi pas ? Enchanter la politique, nous faire miroiter des jours meilleurs. Les ressources humaines de la Wallonie et de Bruxelles sont sa principale richesse.
Qui doit remplacer Elio Di Rupo.
Le problème n’est pas de trouver un candidat. Si les irremplaçables sont tous remplacés, c’est parce qu’il y a toujours des remplaçants. Tout le problème est de choisir le meilleur ou le moins mauvais pour remplacer l’autre. Paul Magnette fait figure de favori. Mais l’idéal serait d’avoir au moins deux candidats. En cas de candidat unique, il n’y pas de choix. Le choix est fait avant le scrutin. Ce n’est pas démocratique. En attendant penchons-nous sur le candidat Magnette.
Quels sont ses handicaps ?
Avoir été parachuté au sommet du parti, mais il s’est racheté. Il a fait beaucoup mieux que d’autres parachutés.
Avoir cumulé le maïorat de Charleroi et la présidence du gouvernement wallon malgré ses promesses. Il ne perçoit qu’un salaire et ne remplit aucune fonction en tant que bourgmestre empêché, dit-il pour se faire pardonner. Ce serait donc logique qu’il renonce au maïorat.
Le peu de contact avec les militants de base.
L’euroscepticisme qui s’empare de lui progressivement comme on peut le lire dans Le Monde.
Un sentiment de reconnaissance personnel qui l’oblige à une fidélité totale envers Elio Di Rupo.
Quels sont ses atouts ?
C’est le candidat par défaut. Mais est-ce un atout ou un handicap ? Est-ce le meilleur ou le moins mauvais ? Quoi qu’il en soit, il n’y a pas de candidat parfait, et c’est bien ainsi.
Il est jeune, mais avec dix ans d’expérience derrière lui et n’est pas encore dirupoïsé. Tout au moins il l’a déclaré au JT de la RTBF du 9 ou 10 février « Je ne crois pas aux hommes providentiels. » Mais il ne parlait pas d’Elio Di Rupo.
On le dit intelligent. C’est bon à savoir. C’est la moindre de choses. Le tout est de savoir quel est son type d’intelligence et comment il pourrait l’utiliser une fois élu à la place de l’autre. La bande liégeoise des cinq est intelligente, mais au bénéfice des intérêts personnels.
Il a redressé l’image de Charleroi, il pourrait redresser celle de la Wallonie.
Il n’a pas besoin de la politique pour gagner convenablement sa vie. La politique peut être pour lui un service au lieu d’un métier.
Peut-être que ce garçon deviendra le champion d’une gauche qui ne meurt jamais, mais qu’il sortira de l’agonie, le précurseur d’une nouvelle gauche crédible, le leader des combats autrement plus positifs que celui de gouverner au jour le jour et de traquer les parvenus. Il y a mieux à faire.
Comment remplacer Elio Di Rupo ?
Tout d’abord, il faut savoir ce que l’on veut. Un parti qui ronronne et qui de temps en temps s’agite, malmené par les affaires ou un parti qui prenne à bras le corps l’urgence de changer pour faire face aux défis du XXI siècle ? Pour une nouvelle démocratie, il faut un autre président, une nouvelle équipe, une nouvelle éthique, une nouvelle dynamique. Au diable les réformettes et les irremplaçables.
Il ne suffit pas de dire que Di Rupo doit partir, comme certains l’ont dit y compris moi simple militant de base. Il faut plus que ça, il faut qu’il parte effectivement. Mais comment ? C’est ici que les choses se compliquent. Quelles solutions ?
Elio Di Rupo démissionne
C’est peu probable. Le camarade président est persuadé d’être l’homme providentiel, irremplaçable et indispensable qui mènera le PS à la victoire aux prochaines élections. Mais il y a un risque. Nous ne le saurons qu’après les élections de 2018 et surtout celles de 2019 l’année de la fin de son mandat. Ces individus qui se croient indispensables, sont têtus comme une mule.
Et puis, la commission d’enquête parlementaire risque de durer deux ans. Elle est composée par les partis qui seront éclaboussés si elle fait toute la lumière sur Publifin/Nethys. Soit pas de lumière et c’est pire. Dans les deux cas, c’est mauvais pour le PS. Encore une petite pensée de Clemenceau : « Une commission d’enquête pour être efficace, ne doit compter que trois membres, dont deux sont absents. »
Paul Magnette prend ces responsabilités.
Le favori devrait choisir entre sa fidélité à Elio et sa fidélité au PS et son combat pour une gauche qui ne meurt jamais. Mais il ne faut pas rêver. À chaque fois qu’on lui demande si Di Rupo doit s’en aller, il répond inlassablement : « EDR a été élu démocratiquement (!), il doit aller jusqu’au bout de son mandat. » Certaines fidélités sont des complicités.
Les Jeunes socialistes se révoltent
Plusieurs voix ont exprimé leur mécontentement et demandé une plus grande participation des jeunes. Robert Joly, président de la fédération PS Namur, le futur secrétaire général de la FGTB, des jeunes socialistes (RTL et Le Soir), Alain Onkelinx dans Le Soir du 11 février : « Nous devons évoluer, améliorer notre fonctionnement. Faire monter des jeunes. Il y a une génération toute prête à prendre ses responsabilités. Il faut préparer maintenant ce renouveau. »
Ce renouveau ne peut venir des Grands Propriétaires du PS, mais des militants de base. Pour cela, les Jeunes Socialistes avec ceux qu’on appelle « figures montantes » doivent prendre la tête de cet immense travail. Vous avez une responsabilité générationnelle. Vous dites sur votre site : « la jeunesse est une source intarissable d’idées nouvelles et de dynamisme. » Je le crois.
Qu’attendez-vous pour vous révolter ? Le départ naturel ou volontaire des irremplaçables ? Avez-vous peur ? De qui de quoi et pourquoi ?
Oui, révoltez-vous avant de devenir des oiseaux aux ailes brisées, libérez-vous de ceux qui vous empêchent de prendre votre envol. Laissez votre générosité, votre imagination, votre énergie se déployer sans crainte, sans calculs et sans tabous. Si vous ne vous révoltez pas maintenant, vous ne vous révolterez jamais et vous deviendrez comme ceux qui ont démérité. La gauche ne meurt jamais, sauf quand on la laisse mourir pour non-assistance au parti en danger. Comptez avec mon soutien et ma modeste collaboration. Sans jetons de présence.
Nous avons commencé avec Clemenceau, terminons avec lui : « Il faut savoir ce que l’on veut. Quand on le sait, il faut avoir le courage de le dire ; quand on le dit, il faut avoir le courage de le faire. »
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