Selma Benkhelifa
« Quand mon fils sort, c’est des policiers dont j’ai peur, pas des voyous » (carte blanche)
Maman d’enfants racisés, j’en ai marre. Mes enfants sont nés en Belgique, moi aussi, nous sommes belges mais qu’importe. Mes enfants sont des jeunes que nos compatriotes du nord du pays appellent allochtones.
Il a fallu qu’une vidéo de deux policières racistes d’Anderlecht circule sur internet pour que nos politiciens s’indignent des propos tenus: macaques.
Vous savez quoi ? Qu’ils nous traitent de bougnoules et de macaques on le savait déjà. On y est même habitué. Le racisme dans la police est endémique.
Tous nos enfants le savent. Ils sont contrôlés tout le temps, pour rien, pour certains par des policiers qui leur demandent leur carte d’identité en les appelant par leur nom. Oui oui des policiers contrôlent des identités qu’ils connaissent déjà. Absurde? Oui si le but du contrôle est de connaître l’identité, non si le vrai objectif est d’affirmer une supériorité et d’humilier le jeune.
On ne se plaint même plus d’une humiliation. On est en vie. Certains jeunes n’ont pas cette chance. On peut ne pas survivre à une rencontre avec les flics quand on est un jeune « allochtone ». Nos enfants pourraient être les prochains Lamine, Sabrina, Ouassim, Adil, Mehdi, Akram ou Ibrahima.
Nos enfants peuvent réussir à l’école, être gentils, serviables, se lever pour les personnes âgées dans les bus, n’avoir jamais commis un seul fait répréhensible… qu’importe. La police leur fait peur. La police nous fait peur. A nous les mamans.
Quand mon fils sort, c’est des policiers dont j’ai peur, pas des voyous. Parce que les voyous ont intégré la police, avec l’aval des politiciens.
Alors je voudrais inverser les questions qui nous sont sans cesse posées sur notre éducation.
Comment les mères de ces policières racistes les ont élevées? Est-ce que les pères des policiers qui ont matraqué et gazé des mineurs aux casernes d’Etterbeek le dimanche 24 janvier étaient des hommes violents? Est-ce qu’il y a quelque chose dans l’histoire et la culture de ce pays qui explique cette violence lâche et gratuite? Dans quel genre d’école ont-ils été pour devenir aussi brutaux? Quel genre d’homme de gauche (excusez l’ironie) est le Bourgmestre socialiste Philippe Close pour dire dans les médias qu’il assume ce que la police a fait ce dimanche-là.
Des enfants se sont faits insultés, matraqués, gazés, menottés, humiliés. 86 mineurs et des majeurs à peine plus âgés. Dans quelle société est-ce acceptable? Il faut d’urgence revoir l’intégralité de la loi sur la fonction de police. Parce que les dérapages à répétition ne sont que le prélude de quelque chose de bien plus grave. « Faites attention, quand une démocratie est malade, le fascisme vient à son chevet mais ce n’est pas pour prendre de ses nouvelles » (Albert Camus).
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