Procès des attentats de Bruxelles: les djihadistes belges étaient vus par l’EI comme peu éduqués et peu compétents
Les djihadistes belges étaient généralement considérés comme peu éduqués et peu compétents par le groupe terroriste État Islamique (EI), a expliqué jeudi après-midi l’islamologue Mohamed Fahmi devant la cour d’assises de Bruxelles chargée du procès des attentats du 22 mars 2016 commis à l’aéroport de Zaventem et dans la station de métro Maelbeek. Peu d’entre eux occupaient des postes importants, a-t-il précisé.
« Beaucoup de djihadistes belges ne connaissaient pas l’État Islamique et ne comprenaient pas le conflit syrien », a expliqué M. Fahmi. Leur manque d’expérience militaire et de connaissances religieuses leur donnait une mauvaise image aux yeux de l’organisation, qui les traitait de manière utilitaire : « les femmes pour satisfaire la sexualité des combattants et pour la démographie, et les hommes pour des attaques suicides ou des tâches logistiques ». Selon lui, ce manque de considération concernait globalement tous les djihadistes européens.
L’Islamologue a également expliqué que le profil des djihadistes belges avait changé après les printemps arabes (une série de révolutions dans plusieurs pays du moyen-orient, NDLR), en 2011. « Avant, on avait des personnes issues de la première génération d’immigrés. Ils étaient arabophones et avaient une bonne connaissance de l’Islam et des enjeux socio-politiques. C’est l’époque où Al-Qaïda était l’organisation la plus connue. Après 2011, alors que l’EI monte en puissance, on a plutôt des gens issus des 2e et 3e générations qui n’ont qu’une faible connaissance de la langue, de l’Islam et des enjeux socio-politiques. »
La présentation a également été consacrée a l’explication de ce qu’est l’Islam, ses différents courants avec un accent sur la mouvance salafiste, soit un courant ultra-orthodoxe, fondamentaliste, qui prône une interprétation littérale du Coran et une vision sectaire de la vie sociale, et le djihadisme, une idéologie politico-religieuse qui prône l’instauration d’un régime politique islamiste par le biais du djihad armé. La combinaison de ces deux termes définit la vision de l’État Islamique.
M. Fahmi a par ailleurs retracé l’historique de l’organisation depuis son origine en 2004 jusqu’à l’adoption de son nom actuel en 2013. Il est également revenu sur le conflit syrien, qui a eu un rôle déterminant dans le développement de l’EI. Certains profils pouvant favoriser une adhésion au djihad ont aussi été énumérées. L’islamologue a notamment évoqué les idéologistes, qui connaissent et adhèrent aux projets de l’EI ; les déviants, souvent atteint de troubles psychologiques, qui partent pour se battre et tuer; ou encore les désorientés, en quête de sens ou d’identité.
Ces profils peuvent se combiner avec les défis amenés par la diversité, comme les préjugés et l’altérité, ou encore avec le rapport de l’Islam à la société, concernant la place de la femme, par exemple. M. Fahmi a toutefois précisé qu’il n’y avait pas de profil type mais bien une combinaison de plusieurs facteurs qui peuvent évoluer.
Questionné sur la possibilité pour les combattants belges partis en Syrie de revenir en Belgique en quittant l’organisation, M. Fahmi a expliqué que, à partir de 2014, les retours étaient beaucoup plus difficiles car l’EI confisquait les passeports. Ceux-ci n’étaient restitués que si le combattant était missionné pour retourner en Europe.