Dans un billet pour Canal+, Myriam Leroy s’est attaquée à Dieudonné. Elle a récolté en retour une surcote d’insultes et de menaces. Pourquoi est-il si délicat de se frotter au comique ?
Myriam Leroy s’est heurtée au sujet le plus épineux du paf de cette dernière décennie: Dieudonné M’bala-M’bala, mis à l’écart des projecteurs en 2003, à la suite d’un piètre sketch dans lequel il campait un colon israélien. La suite s’enchaîne très vite, l’humoriste n’est plus invité nulle part, il se rapproche d’infréquentables et multiplie les provocations sous couvert de liberté d’expression. Quelques années plus tard, la formule fonctionne, il remplit les salles et ses dernières vidéos en ligne dépassent aujourd’hui les 2 millions de vue. En France, il ne se passe pas une semaine sans qu’un signe marquant de ralliement au polémiste – une « quenelle » – ne soit évoqué. Même le ministre de l’Intérieur, Emmanuel Valls, déclare ouverte la chasse au comique. Au beau milieu de ce chambard, Myriam Leroy balance quelques gouttelettes d’huiles innocentes et maladroites sur l’incendie. Attaquant là où ça fait mal, la jeune femme affirme que Dieudo ne fait plus rire personne. Outch.
Qui s’y frotte s’y frique
Au-delà des polémiques, plusieurs questions découlent de l’affaire. La première, la plus logique: Pourquoi Myriam Leroy, chroniqueuse hebdomadaire de l’émission La Nouvelle Édition s’est-elle attaquée à un sujet aussi brûlant ? A l’heure où Yann Barthès et son Petit Journal de la même chaîne y ont laissé quelques plumes, l’obsession de Canal + pour l’humoriste laisse perplexe. Depuis la rentrée, l’étendue du réseau Dieudonné dépasse tout entendement : personnalité sportive ou politique, militaires, pompiers, gardiens de prison… Fight Club et son armée de l’ombre dépassent la réalité. Les fans pullulent à travers la toile, prêts à tout pour défendre leur idole. Chaque vidéo créée le ramdam. Chaque fois que le nom du polémiste est évoqué, les chiffres grimpent, la fameuse « quenelle » est depuis quelques jours devenue une marque déposée…oui, Dieudonné fait vendre. La radicalisation de nos voisins français est une affaire juteuse ! Gageons que ces données n’ont pas échappé aux productions de la chaîne cryptée.
Liberté d’expression
Myriam Leroy est-elle une victime consentante de cette petite course à l’audimat? Peut-être pas, mais son intervention soulève une problématique sur laquelle chaque personne doit s’interroger, partisan de Dieudonné ou non : où se situe la liberté d’expression ? Si comme il le prétend l’humoriste fut limogé, victime d’une pensée verrouillée, l’inverse s’opère. Plus personne n’est en droit d’émettre la moindre opinion à son sujet, sans se faire insulter par ses supporters. Aussi drôle soit-il, le comique navigue en eaux troubles. Cette résistance organisée qu’évoque Dieudonné, où en est-elle par rapport au Front National français, dont son ami proche, l’écrivain Alain Soral évoquait les liens dans une récente vidéo ? Dès qu’une personnalité médiatique s’attaque à la bande, celle-ci menace de brandir des dossiers embarrassants à son encontre. Si toute cette affaire part du rire et de la façon de le pratiquer, aujourd’hui les faits, eux, sont de moins en moins drôles.
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