Peter Mertens
Pourquoi la réduction de la TVA sur l’énergie est une bonne idée (carte blanche)
Avec 300 000 signatures à la pétition « Baissons la TVA à 6% sur l’énergie » et des factures qui explosent, la proposition est à l’ordre du jour du gouvernement. Enfin. Il est grand temps de dissiper les derniers doutes et de saisir la fenêtre d’opportunité de la majorité parlementaire qui se dessine, estime Peter Mertens, député fédéral PTB.
6 % de TVA, c’est ce que vous payez sur le café et sur le lait. Sur l’eau du robinet, sur l’aspirine et sur la pilule. En revanche, pour l’électricité et le gaz, qui sont pourtant des produits de première nécessité, vous payez 21 %, soit le taux applicable aux produits de luxe tels que le caviar et le homard. C’est absurde. Sur les 4 166 euros qu’une famille type paie par an pour l’énergie, 718 euros vont à la TVA. Avec une réduction de la TVA à 6 %, la même famille économiserait 512 euros.
C’est là l’essentiel. Le fait que les personnes les plus riches se chauffent aussi ne fait pas de l’énergie un produit de luxe. Le fait qu’ils en consomment davantage doit être fortement relativisé. Ils vivent dans des maisons mieux isolées et peuvent économiser l’énergie plus facilement. Mais même si c’était le cas : les plus riches consomment également plus d’eau pour remplir leur piscine, par exemple. Il ne viendrait certainement à l’idée de qui que ce soit d’imposer une TVA de 21 % sur l’eau du robinet…
La réduction de la TVA à 6 % est une mesure sociale, précisément parce qu’elle soulage beaucoup plus les familles pour lesquelles les coûts énergétiques pèsent le plus lourd. Faire contribuer les plus riches ; c’est ce que l’on fait avec un impôt sur la fortune, pas avec la TVA. La présidente de Groen Meyrem Almaci cite Fernand Huts – une des plus grosses fortunes belges – dans son plaidoyer contre la baisse de la TVA. Ça tombe bien : dans le comté du Kent, où Huts réside actuellement, le gouvernement britannique taxe sa consommation d’énergie à… 5 % de TVA.
Une TVA à 6 % réduit le pouvoir d’achat ?
Avec une réduction de la TVA, vous perdez plus d’argent que vous n’en gagnez, car cela retarderait l’indexation des salaires, selon certains. Tous dans la rue pour des factures d’énergie encore plus élevées et les salaires suivront ? Non, évidemment. L’indexation des salaires ne compense malheureusement pas suffisamment les coûts énergétiques. Ces coûts représentent environ 5 % dans l’index, alors que pour de nombreuses familles, ils représentent beaucoup plus. Avant la crise, la moitié des familles monoparentales consacraient déjà plus de 10 % de leur budget à l’énergie. Pour eux, l’index ne compense même pas la moitié de la hausse des prix.
Il y a également plusieurs mois entre l’augmentation du coût de la vie et l’indexation des salaires. Quand le salaire est entièrement dépensé, le mois n?est pas fini. Réduire la TVA allégerait immédiatement la facture.
6 % de TVA va nous faire consommer plus ?
Avec les prix actuels, qui vont se maintenir pendant des mois, une réduction de la TVA n’est pas suffisante pour beaucoup. Penser que baisser la facture va encourager le gaspillage d’énergie ne repose sur aucun fait. Pour les produits de première nécessité, comme l’énergie, les signaux de prix du marché libre ont peu d’influence sur la consommation. La grande majorité des gens considèrent les économies d’énergie comme très importantes : ils ne laissent pas les fenêtres et les portes grand ouverts pendant que le chauffage est allumé. Et ce même si la facture énergétique diminue.
6 % de TVA est inabordable ?
Le Premier ministre Alexander De Croo cherche des « solutions durables pour les finances publiques ». La bonne nouvelle est que nous avons dans notre pays un joueur qui peut tout à fait payer la facture : Engie-Electrabel.
Le coût de production de l’électricité produite dans leurs centrales nucléaires amorties est resté le même, mais maintenant que le prix du gaz s’envole, Electrabel vend son énergie nucléaire à des prix records. Comme si des pêcheurs de la mer du Nord vendaient leur hareng bon marché à la criée au prix du filet de morue en disant cyniquement : « C’est comme ça que le marché libre fonctionne. » Pour beaucoup d’entre nous, les factures deviennent impayables. Et pendant ce temps, des géants de l’énergie comme Electrabel font des profits jamais vus. Notre service d’études a calculé que les surprofits s’élevaient à 2,6 milliards. Ça permettrait de financer largement la réduction de la TVA…
Le fait que le gouvernement étudie la manière de reprendre une partie des surprofits est une bonne chose. Il est dommage que, depuis septembre, lorsque nous avons mis une première fois le dossier sur la table, trois mois aient été perdus. Mais ne perdons plus de temps et agissons rapidement maintenant.
C’est le moment
C’est maintenant qu’il fait froid. C’est maintenant que les gens ont des problèmes. Ils n’ont pas le luxe de repousser le paiement de leurs factures pendant des mois. La réduction de la TVA est facile à mettre en oeuvre et apporte un soulagement immédiat. Il existe aujourd’hui une majorité parlementaire en sa faveur. Saisissons cet élan maintenant pour faire ce qui doit être fait.
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