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Voici 7 mesures de l’Arizona qui provoquent la grogne sociale: «Une supercherie» et «des portes fermées»
![Noé Spies](https://img.static-rmg.be/a/view/q75/w150/h150/4368203/copy-copy-photos-detourees-pierre-7-png.png)
La manifestation nationale de ce 13 février marque la première grande étape des revendications syndicales envers les projets de l’Arizona. La FGTB conteste plusieurs projets, surtout économiques, dans l’accord du gouvernement. Et redoute une cassure dans la concertation sociale.
Ce 13 février, veille de Saint-Valentin, ne marquera pas le début d’une histoire d’amour entre le gouvernement Arizona et les organisations syndicales. Il amorcera surtout le début d’une série de ruptures, où le dialogue relationnel semble déjà bien mis à mal: une grève «au finish» chez bpost, un débrayage de neuf (!) jours annoncé sur le rail, une manifestation nationale ce jeudi 13 février, et une autre, encore, prévue fin mars. Autant d’événements qui viennent signer un début de divorce qui paraît déjà inéluctable.
La discorde est féroce (et précoce) envers les nouvelles mesures envisagées par l’Arizona dans son accord de gouvernement. «La grogne sociale sera plus forte que sous la Vivaldi», assurent les organisations syndicales, bien décidées à mettre la pression d’emblée sur le gouvernement fédéral à peine formé. Mais que réclament-elles, concrètement? «Les promesses non tenues en termes de pouvoir d’achat et de fin de carrière constituent les éléments majeurs de la mobilisation», explique Thierry Bodson, président de la FGTB, qui pointe sept mesures source de friction avec l’Arizona «et le patronat».
1. La fin de carrière: le nerf de la guerre
Tout le package «fin de carrière» tel que décrit dans le nouvel accord de gouvernement est l’élément numéro 1 qui mobilise les syndicats. «La vraie angoisse chez les gens, c’est la fin de carrière, assure le président de la FGTB Thierry Bodson. A la lecture de l’accord, toutes les portes sont fermées et il semble désormais presqu’impossible de partir à la retraite avant 67 ans. La prépension est supprimée, l’emploi en fin de carrière devient inaccessible, les personnes qui souhaitent partir plus tôt perdent 5% par année d’anticipation», liste-t-il.
Le fait d’avoir une quasi impossibilité d’anticiper la fin de carrière est un vrai traumatisme pour les gens qui pratiquent un métier lourd ou pénible.
Thierry Bodson
Président de la FGTB
Accumuler 42 ans de carrière à 60 ans permet toutefois de partir avant l’âge légal de la retraite. Une mesure obtenue par les socialistes flamands de Vooruit, après une franche négociation. Cette possibilité requiert cependant d’avoir commencé à travailler à 18 ans. «Mais dans le nouveau calcul de la pension, une année compte à partir du moment où elle comporte neuf mois de travail effectif. Pour cette pension anticipée (NDLR: pas pour la pension classique), le chômage temporaire et la maladie ne sont plus assimilés au calcul. De nombreux travailleurs n’y auront donc pas droit car ils ont eu au moins trois mois de chômage économique/Covid en 2020 et 2021».
Pour le président syndicaliste, «le fait d’avoir une quasi impossibilité d’anticiper la fin de carrière est un vrai traumatisme pour les gens qui pratiquent un métier lourd ou pénible.»
2. Le mode de calcul de la pension
Le temps de travail effectif est désormais le maître-mot qui dicte l’accord gouvernemental sur les pensions. Pour la FGTB, cette nouvelle façon de calculer le montant de la retraite pose un sérieux problème. «De nombreuses personnes vont perdre de l’argent, surtout les fonctionnaires et les personnes qui ont des carrières hachées, principalement les femmes, qui n’auront droit qu’à la pension minimum. Dans les faits, cela représente 300 euros en moins tous les mois», estime Thierry Bodson, pour qui «le plan de l’Arizona pour les pensions est une supercherie.»
La FGTB ne se dit pas contre une réforme des pensions – jugée nécessaire par de nombreux experts pour la viabilité des finances publiques – mais elle dénonce des mesures «linéaires», trop brutales qui «provoquent des injustices», comme le fait de «passer en une fois d’une période assimilée de 50% à 20%.»
«L’aspect pénibilité du travail, aussi, est totalement oublié dans l’accord», déplore encore Thierry Bodson.
3. Le pouvoir d’achat et le travail de nuit
Pour la FGTB, c’est clair, les promesses d’augmentation du pouvoir d’achat de l’Arizona sont vaines. La fédération épingle surtout une nouvelle mesure pour le marché du travail, qui vise à faire du dimanche un jour de travail ordinaire. «Pour le travail de nuit ou le dimanche, les primes ne seront plus négociables».
4. La réforme fiscale
La réforme fiscale pensée par l’Arizona promet une augmentation progressive des salaires à partir de 2027 (70 euros net en plus par mois, sans que le brut ne soit augmenté). Mais le gouvernement souhaite en contrepartie diminuer de moitié le quotient conjugal. Cette mesure permet d’octroyer au partenaire qui a un revenu professionnel très bas voire inexistant, une partie des revenus professionnels de l’autre partenaire. «Au vu du statut de nombreux ménages (par exemple, une personne travaille à temps plein, l’autre à temps partiel), cette mesure représente une perte nette de 100 euros par mois. Donc, 70 euros–100 euros, pour moi, cela donne -30 euros», dit, agacé, Thierry Bodson.
5. La demande de flexibilité
Augmenter le besoin de flexibilité pour les travailleurs qui sont déjà dans des métiers très flexibles fait aussi bondir la FGTB. «Un paquet de 360 heures supplémentaires ne devra même plus être négocié au travers des organisations syndicales. Le rapport de force n’est plus en faveur du travailleur.»
6. La limitation dans le temps des allocations de chômage
La limitation des allocations de chômage à deux ans est une mesure déjà maintes fois évoquée, et que Thierry Bodson trouve inadmissible pour deux raisons. «D’abord, la charge administrative sera conséquente pour la commune. Ensuite, un impact direct pour les ménages en cohabitation se fera sentir. Le cohabitant n’aura plus droit à rien.»
Par ailleurs, la qualité des contrats proposés au sortir du chômage est insuffisante en Wallonie, souligne le président, «ce qui démontre un vrai problème au niveau du patronat wallon». Il chiffre: «Un chômeur qui retrouve du travail en Flandre obtient dans 80% de cas un contrat à durée indéterminée et, en Wallonie, seulement dans 25% des cas.»
7. Une concertation sociale mise à mal
Thierry Bodson craint que le dialogue soit «dur» pendant cinq ans. «Pour nous, il est logique de mettre la pression tout de suite, aussi bien sur le gouvernement, mais aussi sur le patronat.» Car, selon lui, toutes les demandes patronales ou presque ont été intégrées à l’accord de gouvernement. «Tout ce qu’ils ont demandé, ils l’ont obtenu: plus de flexibilité, suppression des systèmes de fin de carrière anticipée, limitation du chômage à deux ans, conservation de la loi de 1996, suppression de l’enveloppe bien-être, réintroduction de la période d’essai, diminution des préavis, suppression des trois jours d’absence sans certificat médical, liste-t-il. On est au-delà de ce qui avait été décidé sous Charles Michel.»
A quoi sert-il de se mettre à table avec les patrons au niveau interprofessionnel ou sectoriel si un gouvernement, en deux nuits, casse tous les accords sociaux?
Thierry Bodson
Président de la FGTB
Enfin, la FGTB estime que l’accord gouvernemental casse des conventions et ne respecte plus les interlocuteurs sociaux. «A quoi sert-il de se mettre à table avec les patrons au niveau interprofessionnel ou sectoriel si un gouvernement, en deux nuits, casse tous les accords sociaux?», regrette Thierry Bodson, pour qui la concertation sociale est désormais en danger. «Le gouvernement s’accapare des mesures qui relèvent normalement de la concertation sociale, et, en plus, il met à mal toute une série de grands accords passés entre patrons et syndicats.»
De son côté, le cabinet du ministre fédéral de l’Emploi et de l’Economie David Clarinval (MR) fait savoir que «la manifestation nationale est un signal important, qui n’est pas pris à la légère». «Il reste une place importante pour la discussion et la concertation sociale. Certaines mesures doivent encore être détaillées et clarifiées après proposition des partenaires sociaux», assure-t-on.
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