note Ecolo
Les coprésidents d’Ecolo Marie Lecocq et Samuel Cogolati ont lancé un processus de refondation qui envisage même, selon une note interne, un changement de nom © Belga Image

«Sommes-nous vraiment des donneurs de leçon? Faut-il changer le nom d’Ecolo comme parti?» : voici la note interne qui lance la refondation d’Ecolo

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Selon une note interne dont Le Vif a pris connaissance, Ecolo ne s’interdit rien dans le cadre de sa refondation. Même pas un changement de nom.

Juste après les communales du 13 octobre, dans la discrétion d’un Conseil de fédération qui n’a, comme d’habitude, fait l’objet d’aucune communication externe, Ecolo a lancé la première étape de son processus de refondation. Ce processus avait été annoncé avec la désignation, l’été dernier, des nouveaux coprésidents écologistes Marie Lecocq et Samuel Cogolati, mais ils n’en ont plus parlé depuis, et cette encore très discrète refondation est, depuis les communales d’octobre, leur tâche principale. « Les coprésidents Marie et Samuel, élus en juillet 2024, ont en effet fait de l’évaluation et de la refondation du parti un axe fort de leur projet. Le secrétariat fédéral et le bureau du conseil de fédération souhaitent aujourd’hui consacrer les moyens humains et financiers nécessaires à relancer le parti en connaissance des transformations à opérer, et ce, en sortant de l’entre-soi », est-il écrit dans une note interne d’Ecolo présentée au Conseil de fédération du 18 octobre, gardée secrète jusqu’à présent, et dont Le Vif s’est procuré une copie (voir en bas de l’article).

Un comité de refondation a été constitué, et il opérera en deux temps « une évaluation de quatre mois, puis une refondation à partir du printemps 2025 ».

Cette première phase se termine en janvier, avant le début officiel de la refondation, en mars. Ses conclusions seront présentées au Conseil de fédération de février. L’évaluation, « marque le départ d’une nouvelle aire (sic) pour l’écologie politique« . Car si, dit la note, « cette refondation, c’est là où nous voulons aller, il serait hâtif de la dessiner sans avoir les éléments principaux de l’évaluation de là où nous sommes », c’est-à-dire un parti qui a durement perdu les deux scrutins de 2024.

Le processus d’évaluation qui se termine donc ce mois-ci comporte cinq chapitres perçus comme autant de « regards complémentaires », pilotés à chaque fois par une petite équipe de quatre à cinq personnes, « paritaire, équilibrée géographiquement et comprenant au moins une personne n’ayant pas été mandataire ou permanente d’Ecolo pendant la législature précédente ».

Le premier chantier est interne

Il consiste principalement en une vaste enquête sur le fonctionnement du parti et la manière dont ses membres le perçoivent. Toutes ses couches, des ministres sortants aux employés, en passant par les membres non mandataires, auront été sondées, et l’invitation à répondre à un questionnaire en ligne a été envoyée à tous les membres en octobre. Les centaines de réponses reçues doivent aider à identifier « les zones de tension et de bon fonctionnement » d’Ecolo.

Le deuxième chantier est tourné vers “la société civile”

Il « mobilisera des regards externes, des ONG, des associations environnementales, des syndicats, le monde des entreprises », pour « évaluer ce qu’Ecolo a défendu avec la société civile et le mettre en regard de ce que la société civile attend qu’Ecolo défende ». Parmi les questions auxquelles ont été soumis les représentants de cette société civile, pointons « les qualités et les défauts d’Ecolo lorsque nous participons à une majorité ».

Le troisième chantier porte sur la communication

Il fera encore sortir les écologistes refondateurs de leur « entre-soi » puisque « ce chantier sera mené par une équipe de professionnel.les de la communication », extérieurs aux partis. Ceux-ci devront répondre à trois questions:

« 1. Quels sont les trois stéréotypes positifs et les trois stéréotypes négatifs que le grand public associe à Ecolo?

2. Pourquoi si peu de nos personnalités clés apparaissent dans les personnalités préférées des Belges?

3. Que peut-on améliorer dans l’articulation entre la communication des mandataires publics (ministres, parlementaires, bourgmestres et échevins) et celle du parti? »

Le quatrième chantier s’est intéressé au grand public

Il s’agit là pour les refondateurs écologistes de « prendre le pouls à l’extérieur de nos cercles proches » en récoltant « l’avis de ceux qui n’en sont pas membres ou sympathisant.es, ni d’organisations structurées et actives dans la décision ou le débat public ». Ces avis concerneront notamment la mesure dans laquelle Ecolo répond aux mutations induites par « des crises majeures et des changements brusques de dynamiques qui pouvaient paraître immuables (retour de la guerre en Europe et au Moyen-Orient, COVID, etc.) ». Et surtout les architectes de ce quatrième chantier auront testé deux hypothèses spécifiques: 1. Sommes-nous vraiment des donneurs de leçons? et 2. Faut-il changer le nom d’Ecolo comme parti? ».

Le cinquième chantier comparera Ecolo à ses voisins étrangers

« Longtemps, Ecolo a servi de modèle aux autres« , pose la note au Conseil de fédération, qui pousse les verts francophones à traverser les frontières. « Aujourd’hui, il s’agit de s’inspirer de ce qui fonctionne en Scandinavie ou en France par exemple. Mais il s’agit aussi de comprendre pourquoi les Verts sont largement en recul face à une montée des droites conservatrices, nationalistes et populistes », concluent les coprésidents.

Les rapports des cinq chantiers seront dépouillés avec une attention évidemment très particulière par la direction d’Ecolo, et ensuite par le Conseil de fédération de février. On sait déjà que les verts ne s’interdisent rien, qu’un changement de nom est même possible, et qu’il devra s’agir de davantage qu’une rénovation, mais bien d’une refondation.

Le timing et les termes, sans tabou, hors de l’entre-soi et qui ne s’interdisent rien, pas même un changement de nom, sont presque identiques chez l’autre grand battu des scrutins de 2024, le PS. Sauf que les socialistes ont laissé leur président pourtant battu, Paul Magnette, aux manettes de leur refondation « sans tabou et qui n’exclut pas un changement de nom », tandis que les écologistes, eux, ont délibérément choisi de la faire incarner par deux très jeunes dirigeants, Marie Lecocq et Samuel Cogolati.

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