Le "débat des présidents" entre David Leisterh et Ahmed Laaouej a attiré 150 étudiants à Saint-Louis

Sécurité, SmartMove, voile: Ahmed Laaouej et David Leisterh confrontent leurs projets bruxellois

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

David Leisterh (MR) et Ahmed Laaouej (PS), deux des trois candidats à la ministre-présidence bruxelloise, ont débattu pour la première fois en face à face à l’Université Saint-Louis.

C’est la première fois, vendredi 10 mai, que David Leisterh (MR) et Ahmed Laaouej (PS) débattaient en public et en face-à-face, sur le modèle d’une élection présidentielle française ou américaine, chacun d’un côté de l’estrade, séparés par l’animateur des discussions, le journaliste Sylvain Anciaux (La DH). Ils avaient répondu à l’invitation des étudiants socialistes de l’Université Saint-Louis.

Têtes de liste de leurs partis respectifs, et présidents de leur fédération régionale, le Koekelbergeois et le Boitsfortois sont deux candidats à la ministre-présidence de la Région de Bruxelles-Capitale après les élections du neuf juin. Mais ils ne sont pas les seuls: l’écologiste Zakia Khattabi, troisième aspirante à la ministre-présidence, n’était pas conviée, et ce n’est pas un hasard. Tant Ahmed Laaouej que David Leisterh ont intérêt à cette manière de bipolarisation.

Le premier aspire à rassembler les électeurs du centre et de la gauche à partir d’un projet pour « une région apaisée » alors que son parti est à la tête des gouvernements régionaux depuis 2004, tandis que le second souhaite incarner l’alternance et, sur cet antagonisme, combler un déficit de notoriété personnelle. Les 150 étudiants présents penchaient à gauche. Mais Ahmed Laaouej n’a pas spécialement défendu le bilan des gouvernements régionaux, l’eût-il fait qu’il aurait peut-être été moins applaudi. Et David Leisterh n’a pas spécialement affirmé les véritables ambitions de son projet libéral, l’eût-il fait qu’il aurait sans doute été moins respecté.

Voici, sur les différents thèmes abordés, comment l’un et l’autre se sont positionnés.

“Dans les arbitrages à poser, il y avait la liberté de pratiquer son culte, et pour certains c’état une entrave disproportionnée”

Ahmed Laaouej

Ahmed Laaouej et David Leisterh se rejoignent sur la taxe kilométrique Smart Move

David Leisterh a répété « ne pas vouloir ajouter une taxe à des taxes. Je ne vois pas pourquoi on pénaliserait uniquement les Bruxellois », a-t-il lancé, rappelant que ni la Wallonie ni la Flandre n’avaient introduit de dispositif similaire. « Très mauvaise idée! » a renchéri Ahmed Laaouej, ajoutant que « 20 milliards d’euros de taxes sur les véhicules sur les 150 que perçoit la Belgique sont déjà prélevées sur les véhicules ,et pourtant les gens ne roulent pas moins en voiture, c’est la preuve que ce n’est pas dissuasif ».

Sur l’abattage rituel

« Dans les arbitrages à poser, il y avait la liberté de pratiquer son culte, et pour certains c’état une entrave disproportionnée », a commencé Ahmed Laaouej, pointant « la manière hypocrite, ciblée sur certaines minorités, juives et musulmanes », par laquelle le débat avait été lancé. « Nous, on est pour le code du bien-être animal. Et nous, on est cohérent, on a voté pour l’abattage avec étourdissement en Wallonie, et si ça revient à Bruxelles on le votera aussi », a répondu David Leisterh.

Sur l’allocation étudiante

Le revenu de base pour les jeunes (1000 euros par mois pour les 18-24 ans) est au programme du PS. David Leisterh ne s’y est pas montré philosophiquement hostile. « Aider le plus de monde à faire des études supérieures, c’est crucial. Je vois de plus en plus de jeunes venir frapper à la porte du CPAS, que je préside à Watermael-Boitsfort depuis douze ans. S’il y a bien un moment où l’Etat doit intervenir, c’est pendant les études », a-t-il expliqué.

“S’il y a bien un moment où l’Etat doit intervenir, c’est pendant les études”

David Leisterh

Sur le port des signes convictionnels dans les administrations

« Ah moi, je vois beaucoup trop de freins à l’accès au travail pour considérer que l’inclusion n’est pas une question. Et il faut arrêter de penser que la neutralité ce n’est une question d’apparence: la première chose que font les personnes mal intentionnées envers notre société, et notre Etat, c’est justement de masquer leur appartenance politique et religieuse », a remarqué Ahmed Laaouej, dont le parti autorise les signes convictionnels excepté dans les fonctions d’autorité en contact avec le public. « C’est source de tensions », a constaté David Leisterh « J’ai donné cours à des dizaines d’étudiantes qui portent un voile« , a-t-il ajouté, car quand il n’est pas candidat à la ministre-présidence il est aussi prof de langues à Saint-Louis: « Nous ce qu’on demande c’est que lorsque vous travaillez pour l’Etat, vous retirez votre signe convictionnel ».

Ahmed Laaouej et David Leisterh sur la sécurité

« Le phénomène n’est pas nouveau mais s’est amplifié de manière dramatique, certaines organisations mafieuses internationales sont en capacité de mener une guerre à d’autres bandes et aux autorités pour prendre le contrôle de certains territoires. Il faut une réponse au plus haut niveau de l’Etat, la police judiciaire fédérale, les parquets, la Justice. Il faut viser le butin, leur enlever les capacités de blanchir de l’argent », a appelé Ahmed Laaouej, pointant ceux qui « pointent du doigt Bruxelles, je pense à la N-VA pour ne pas la citer, alors qu’ils ont définancé avec le gouvernement Michel les services de justice et de police » et qui dirigent Anvers, par où arrivent des tonnes de cocaïne.

“C’est pas normal que ça soit aussi moche à la gare du Midi”

David Leisterh

« Il faut revoir la norme KUL« , celle qui règle le financement des zones de police, et qui désavantage Bruxelles, a répondu David Leisterh à la question de Sylvain Anciaux. Mais, a-t-il ajouté, « la question du financement, si vous mettez mille ou deux mille policiers dans la rue, et que la Justice ne suit pas, ça ne sert à rien. Il faut qu’il y ait une politique des poursuites qui soit beaucoup plus sévère. Nous estimons que ce n’est pas suffisamment le cas. Est-ce que tout cela, c’est de la compétence du ministre-président? C’est aussi une question de caractère, mais ça ne fait pas tout, et c’est vrai que ça concerne absolument tous les niveaux de pouvoir », a-t-il expliqué, prenant ensuite l’exemple de Malines, dirigée par le libéral Bart Somers. Comme à Malines, « il faut refaire du beau, c’est pas normal que ça soit aussi moche à la gare du Midi », a-t-il conclu en faisant bien rire les spectateurs.

Bruxelles: “C’est une différence entre la gauche et la droite”

« Ah ça tombe bien, Bart Somers a autorisé les signes convictionnels dans l’administration, y compris aux guichets », lui a dit Ahmed Laaouej et se faisant fort applaudir par les spectateurs et les spectatrices. « Mais tant qu’il n’y a pas un réinvestissement on n’en sortira pas. La prévention, ca demande des moyens, et oui, ça c’est une différence entre la gauche et la droite: on a besoin d’un Bruxelles apaisé, où on se respecte, et où on ne laisse personne au bord du chemin », a-t-il précisé.

« On est d’accord sur la prévention, mais vous ne m’en voudrez pas de faire remarquer que des centaines de millions sont investis en prévention, dans les maisons de quartiers, des ASBL, etc., et pourtant on a le taux de chômage des jeunes et le taux de criminalité les plus élevés. C’est que quelque chose a dû mal se passer, non? », a relancé David Leisterh.

On a ensuite, bien sûr, parlé du conflit israélo-palestinien. On en reparlera. Mais pas ici.

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