Rien qu’en FWB, il y a désormais… 6 ministres de la Santé: «On peut analyser ce choix de deux façons»
Six ministres francophones disposent aujourd’hui de compétences ayant un rapport avec la santé, contre trois sous le gouvernement Jeholet. Une répartition que la coalition Azur défend.
Il a fait ses premiers pas en politique il y a quelques mois à peine. Aujourd’hui, Yves Coppieters (Les Engagés) est propulsé au rang de ministre de la Santé. Un titre porté à la fois au gouvernement wallon mais aussi en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB). Officiellement, cette double casquette lui permet d’adoucir le millefeuille administratif, en unifiant les postes occupés respectivement par Christie Morreale (PS) et Bénédicte Linard (Ecolo) sous la législature précédente.
Simplification? En fait… complexification. Car d’autres ministères, surtout en FWB, disposent eux aussi de compétences liées à la santé. Sous le gouvernement Jeholet, trois ministres étaient dans ce cas. Désormais, ils sont six, et Yves Coppieters ne possède en réalité qu’un nombre réduit de prérogatives.
Un constat que la coalition Azur tempère: le nouveau gouvernement estime avoir réparti les portefeuilles de manière plus cohérente que par le passé.
Le passage d’une logique à une autre
Sous Pierre-Yves Jeholet, il existait une «seconde ministre de la Santé», avec de nombreuses compétences en la matière: Valérie Glatigny (MR), dont le poste a été récupéré en 2023 par Françoise Bertieaux (MR). Chacune leur tour, elles ont été en charge des hôpitaux universitaires, de l’Académie royale de médecine, du contrôle médico-sportif, de la recherche en matière de santé, de l’agrément des professions des soins de santé, etc. Caroline Désir (PS) n’avait pour sa part «que» les centres psycho-médicaux-sociaux. Avec Bénédicte Linard, il existait donc bien trois ministères relatifs à la santé.
Aujourd’hui, ce trio a été remplacé par un sextuor: Yves Coppieters, Valérie Lescrenier (Les Engagés), Elisabeth Degryse (Les Engagés), Valérie Glatigny, Jacqueline Galant et Adrien Dolimont (MR). Le premier ne s’occupe «que» de l’Académie royale de médecine, de l’agrément des professions des soins de santé, et de la société scientifique de médecine générale. Des compétences qui étaient paradoxalement celles de Valérie Glatigny et de sa successeure, pas celles de l’ex-ministre de la Santé.
C’est Valérie Lescrenier, nouvelle ministre de l’Enfance et de la Jeunesse, qui a récupéré les anciennes prérogatives de Bénédicte Linard.
Les autres compétences ont été réparties selon une logique similaire à celle appliquée pour Valérie Lescrenier. Elisabeth Degryse, ministre-présidente en charge de l’Enseignement supérieur, chapeaute les hôpitaux universitaires. Jacqueline Galant, ministre des Sports, s’occupe du contrôle médico-sportif. Adrien Dolimont, ministre de la Recherche, est responsable des scientifiques travaillant sur la santé. Enfin, Valérie Glatigny récupère le ministre de l’Éducation et donc le contrôle sur les centres psycho-médicaux-sociaux.
Le choix entre deux cohérences
Pour Audrey Jacquiez, porte-parole des Engagés et de son président Maxime Prévot, le plus important n’était pas de mettre toutes les compétences de santé dans un seul ministère, mais de «faire des regroupements cohérents» avec les autres thématiques. «La santé irrigue l’ensemble des compétences et ici, on a vraiment essayé de faire des liens, explique-t-elle. Nous avons distribué les portefeuilles de manière à répondre aux réalités du terrain.»
«On peut analyser ce choix de deux façons, réagit Jean Faniel, directeur général du CRISP. Soit on remet la Santé entre les mains d’une seul personne, et on peut estimer ici que cette répartition est très éclatée. Soit on cherche une autre cohérence, avec ce type de regroupements. Personnellement, le choix de la coalition Azur ne me choque pas.»
Une répartition des ministères rectifiée à la dernière minute
Le politologue est davantage frappé par le fil des négociations qui a abouti à cette configuration. «A l’origine, Elisabeth Degryse aurait dû devenir ministre de la Santé en FWB et Yves Coppieters en région wallonne. Mais dans cette configuration, le MR et Les Engagés ne respectaient pas l’obligation légale d’avoir au moins un tiers d’hommes au sein du gouvernement communautaire. Pour équilibrer, Yves Coppieters a récupéré cette double casquette qu’il n’aurait initialement pas dû avoir.» Ce contexte pourrait expliquer pourquoi Yves Coppieters a aujourd’hui paradoxalement peu de compétences pour le ministère qu’il détient.
Autre détail important: Elisabeth Degryse a la main sur la coordination de la politique du gouvernement. Selon Jean Faniel, elle pourrait ainsi avoir un rôle à jouer dans la santé, sans que son collègue des Engagés ne soit impliqué. En contrepartie, Yves Coppieters devrait être le seul représentant du sud du pays à la CIM (Conférence inter-ministérielle) Santé publique qui rassemble les ministres de la Santé de toute la Belgique, détaille Audrey Jacquiez.
Cette architecture ministérielle sera-t-elle efficace? «Il faudra vérifier dans la pratique, juge Jean Faniel. Peut-être que cela créera une coordination plus « facile » qu’à l’époque du Covid. Le sujet avait fait couler beaucoup d’encre pendant la crise sanitaire, lorsque le millefeuille administratif était accusé d’avoir une responsabilité dans le bilan humain. Aujourd’hui, il faudra faire attention à ce que cela se passe bien entre les différents cabinets.»
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