Le PTB entre dans la majorité à Mons: Martin (PS) assume, Bouchez (MR) dénonce une « honte », Prévot (Engagés) fustige « une association sulfureuse »
Le PTB, parti communiste, entre pour la première fois dans une majorité locale en Wallonie. A Mons, leur présence a été validée par le PS et Ecolo. La question d’une alliance avec les extrêmes divise les partis wallons.
Pour la première fois, le PTB entre dans une majorité dans une commune wallonne, à la suite de l’accord conclu à Mons avec le PS et Ecolo. Celui-ci a été avalisé par les sections locales.
Le parti rêvait de pouvoir chiper l’écharpe maïorale à Bart De Wever à Anvers. Il ambitionnait aussi de monter au pouvoir dans les deux grandes métropoles wallonnes que sont Liège et Charleroi. Mais finalement, c’est à Mons que cette entrée en majorité se concrétise.
Dans la Cité du Doudou, les communistes n’ont remporté que 4 sièges au conseil communal (+1). Mais l’exclusive du bourgmestre Nicolas Martin (PS) à l’encontre de la liste Mons en Mieux de Georges-Louis Bouchez (MR), cumulée au refus des Engagés d’entrer en coalition avec les socialistes, lui ont ouvert la voie.
La présence du PTB dans une majorité communale n’est pas une première en Belgique. Sous la précédente législature, l’expérience avait été menée à Zelzate (Flandre orientale), au sein d’une coalition formée avec Vooruit. Mais cette alliance a vécu. Le 13 octobre, les socialistes ont gagné deux sièges tandis que les communistes en ont perdu un. Ils ont été renvoyés dans l’opposition.
En Wallonie, Mons devrait être la seule commune comptant le PTB dans sa majorité. A Herstal, autre ville où le parti pouvait revendiquer une place au collège, le PS a finalement décidé de s’allier au MR. A Bruxelles, le PTB pourrait entrer dans les majorités à Forest, Molenbeek et Schaerbeek. Les discussions sont toujours en cours dans ces communes.
La question de former des coalitions avec les communistes divise les partis francophones. Au MR et chez Les Engagés, le mot d’ordre est clair: pas d’alliance avec les extrêmes, et donc avec l’extrême gauche. Au PS et chez Ecolo, la porte reste ouverte bien que la question suscite des débats en interne. Chez les verts, la question a été abordée lundi en Bureau, rapportait La Libre. Aucun mot d’ordre n’a été donné : pas de feu vert, ni de stop, laissant les sections locales décider.
Nicolas Martin assume son accord avec le PTB et pointe l’attitude des Engagés
Le bourgmestre de Mons Nicolas Martin a assumé l’accord validé la veille au soir entre le PS, le PTB et Ecolo pour gérer la Cité du Doudou ces six prochaines années.
« J’ai voulu tenir mes engagements, c’est-à-dire de ne pas gouverner avec la liste Mons en Mieux de Georges-Louis Bouchez, qui a détruit la réputation de la ville de Mons pendant toute la campagne électorale à des fins électoralistes », a déclaré le socialiste au micro de La Première (RTBF).
Un attelage PS-PTB-Ecolo n’était toutefois pas sa « coalition de prédilection ». Nicolas Martin a confirmé avoir contacté Les Engagés. « Ils n’ont à aucun moment accepté d’envisager un tripartite sans les libéraux de Georges-Louis Bouchez », a-t-il affirmé. Le bourgmestre a indiqué avoir demandé aux centristes une note écrite détaillant leurs intentions…. « et la moitié de cet écrit, c’était de demander: ‘pourquoi vous ne faites pas venir M. Bouchez ?’ et ‘pourquoi on ne peut pas faire une tripartite avec les libéraux ? ».
Faire monter le PTB dans une majorité ne constitue pas, à ses yeux, une rupture du cordon sanitaire. « La théorie du cordon sanitaire à l’égard du PTB est une invention de la droite, de M. Bouchez, avec pour seul objectif de se rendre incontournable sur la scène politique en faisant en sorte de diviser les partis de gauche. Le PTB n’est pas un parti raciste. Le seul cordon sanitaire que je connais, c’est à l’égard de l’extrême-droite. » « Le PTB que j’ai eu en face de moi s’est montré modéré, constructif et a répondu au préalable que j’ai fixé: la nécessité d’un développement économique dynamique basé sur la création d’activité privée. Et sur la volonté d’avoir une politique budgétaire rigoureuse et sérieuse », a-t-il conclu.
« La coalition de la honte », selon Georges-Louis Bouchez
« La coalition de la HONTE », c’est en ces termes que le président du MR Georges-Louis Bouchez a qualifié l’accord conclu entre le PS, le PTB et Ecolo à Mons.
Pour le libéral qui tirait la liste « Mons en Mieux », il s’agit d’une coalition « entre des perdants qui s’associent à des communistes qui vont achever de ruiner les femmes et les hommes qui travaillent. »
« Cette ligne rouge franchie ne peut rester sans conséquence », avertit-il sur sa page Facebook, sans préciser les conséquences en question.
« Les mêmes qui parlent de populisme sans cesse s’associent aux pires populistes… » « En tant que citoyen montois, j’ai honte aujourd’hui que ma Ville renoue avec une idéologie qui a fait 100 millions de morts dans l’Histoire. Alors que le bourgmestre avait l’occasion de saisir notre main tendue, il a préféré l’affrontement et la ruine de la Ville… C’est tellement regrettable d’avoir tant de haine », conclut-il dans son message, sous une illustration générée par l’intelligence artificielle montrant l’hôtel de ville flanqué de drapeaux rouges. Jeudi soir, les instances locales du PS, du PTB et d’Ecolo ont avalisé l’accord de coalition, maintenant de cette manière les libéraux dans l’opposition.
Les Engagés ne voulaient pas « jouer les faire-valoir de la politique du PS local », Prévot parle d’une « association sulfureuse »
Le président des Engagés Maxime Prévot confirme et défend le refus des centristes d’entrer en coalition avec le PS à Mons.
« Nicolas Martin, conscient de l’association sulfureuse qu’il va promouvoir dans la 4e ville wallonne avec le PTB aux côtés d’Ecolo, se cherche désormais des coupables. Quand ce n’est pas à cause du MR, ce serait à présent la faute des Engagés? », réagit Maxime Prévot. « Nous nous sommes montrés ouverts à une coalition mais pas à n’importe quel prix. Pas pour jouer les simples faire-valoir de la politique du PS local », explique-t-il dans un message diffusé sur les réseaux.
« Aucun projet de ville n’a été esquissé au-delà du programme du PS. Et quand notre tête de liste locale s’est entendu dire par le bourgmestre qu’il demandait, pour nous accueillir en majorité avec lui, des lettres de nos ministres s’engageant à continuer de financer les projets de Mons, on a compris que les vieilles pratiques politiques étaient toujours à l’agenda… », rétorque-t-il. « Que Nicolas Martin assume son choix plutôt que de singer l’indignation. Banaliser le PTB et ses idées marxistes est une erreur stratégique grave et un fait politique inquiétant », conclut Maxime Prévot.
On ne va pas tout changer du jour au lendemain », concède le PTB
La future échevine montoise PTB, Céline De Bruyn, s’est dite consciente vendredi des difficultés budgétaires et des réalités de gestion d’une ville comme Mons, en l’absence de toute « solution miracle ».
La première participation du parti d’extrême gauche à une majorité au sud du pays questionne sur sa capacité à se confronter à la gestion quotidienne et sur la cohérence de son action avec son programme électoral, qui appelle à la rupture.
« La rupture, c’était surtout pour les élections de juin que nous la défendions », a affirmé l’élue communiste, en marge de la présentation à la presse de la nouvelle coalition PS-PTB-Ecolo. « Pour les communales, il y avait une volonté de tenter des expériences« .
« Ce sera difficile, comme dans beaucoup d’autres villes wallonnes, on n’a pas de réponse miracle, nous nous montrerons donc créatifs dans la recherche de solutions », a-t-elle ajouté. « On ne va donc pas tout changer du jour au lendemain, d’autant qu’on a trouvé d’emblée pas mal de convergences avec le PS et Ecolo« , deux partis de la majorité sortante.
Céline De Bruyn voit des marques de l’apport pétébiste au pacte de majorité dans le gel de la taxe poubelle, ou dans l’expérience de « points mauves » pour la sécurité des jeunes et l’accueil des victimes de violences sexistes lors d’événements festifs. D’autres politiques comme celle du logement ont particulièrement retenu l’attention du parti lors des négociations. « Il y a beaucoup d’attentes à notre égard, on est conscient qu’on sera observé, surtout dans les premières semaines, mais on va ensuite trouver notre rythme de travail« , assure l’élue, appelée à devenir échevine de la Jeunesse, de la Petite enfance, de l’Égalité des chances et du Logement.