La Wallonie réduit à la fois le montant de base et le plafond d’intervention des primes Habitation, portant sur des améliorations de la sécurité, de la salubrité et de la performance énergétique d’un logement. © Getty Images

La Wallonie réduit ses primes à la rénovation dès ce vendredi: «La situation était intenable»

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

Dès ce 14 février, le gouvernement de Wallonie serre la vis sur les primes Habitation et supprime celle dédiée aux petits travaux sans audit, dans l’attente d’un nouveau régime en octobre 2026. Les ménages ayant déjà entamé des démarches bénéficieront, sous conditions, de l’ancien système.

Comme le prévoit sa déclaration de politique régionale, le gouvernement de Wallonie a annoncé ce jeudi un changement de cap concernant les aides à la rénovation des logements. Dans l’attente d’un nouveau régime prévu pour le 1er octobre 2026, c’est bien une réduction significative des primes qui attend les Wallons, dès ce 14 février. «Nous avons fait le constat d’un véritable dérapage budgétaire», commente Cécile Neven, la ministre wallonne de l’Energie (MR), en référence aux quatre régimes de primes coexistant à l’heure actuelle: les primes Habitation 2019 et 2023, celles portant sur les toitures et petits travaux sans audit, et enfin les primes Chauffage. «A politique inchangée, la Wallonie devrait faire face à une facture de 674 millions d’euros d’ici fin 2025, précise-t-elle. Il aurait été irresponsable de ne pas en prendre la mesure.»

«La situation était intenable, ajoute le ministre-président wallon Adrien Dolimont (MR), en charge du Budget. Une bulle était en train de se créer.» Avec sa réforme, le gouvernement annonce une économie de 290 millions d’euros pour la seule année 2025.

Concrètement, le régime de soutien temporaire entrant en vigueur dès ce vendredi:

  • limite l’accès aux primes aux ménages dont le revenu globalement imposable est inférieur à 114.000 euros. Un plafond similaire à l’actuelle condition de revenu pour l’obtention de prêts wallons à taux zéro, d’un montant maximal de 60.000 euros;
  • supprime les primes portant sur les petits travaux sans audit (de moins de 6.000 euros TVAC);
  • réduit le montant des primes Habitation, portant sur des améliorations de la sécurité, de la salubrité et de la performance énergétique d’un logement. Le gouvernement agit à la fois sur les montants de base, diminuant de 60% en moyenne, et sur le plafond d’intervention actuel de 90%, que le gouvernement juge déraisonnable. Parmi les quatre tranches de revenus restantes, les deux catégories les plus basses bénéficieront d’un plafond de 70% et les deux plus élevées, de 50%.
Le but est d’aider plus de personnes en octroyant des montants plus raisonnables. A l’heure actuelle, on finance des effets d’aubaine.»

Cécile Neven

Ministre wallonne de l’Energie (MR)

Les ménages ayant introduit un dossier de demande de primes à l’administration avant le 14 février pourront, eux, continuer à bénéficier de l’ancien système. Il en va de même pour ceux qui ont uniquement entamé des démarches, à deux strictes conditions:

  • fournir la preuve qu’un acompte d’au moins 20% des travaux a déjà été payé;
  • avoir introduit une demande de réservation du droit du maintien du régime actuel avant le 1er mars à minuit. L’administration disposera alors de trois mois pour statuer sur leur dossier.

Cette mesure d’urgence budgétaire précède une vaste réflexion, en concertation avec tous les acteurs impliqués, visant à réformer les aides à la rénovation pour le 1er octobre 2026, tout en respectant l’objectif européen d’un parc immobilier à émissions nulles d’ici à 2050. Pour y parvenir, la Wallonie devrait rénover en profondeur au moins 3% des bâtiments résidentiels par an. Sachant que la cadence actuelle n’atteint même pas 1% par an, ce resserrage ne va-t-il pas freiner d’autant plus la transition énergétique? «Que du contraire, objecte Cécile Neven. En ne faisant rien, on aurait été en situation de moratoire forcé. Or, le moratoire, c’est mauvais pour le citoyen, le climat et le secteur de la construction. Le but est d’aider plus de personnes en octroyant des montants plus raisonnables. A l’heure actuelle, on finance des effets d’aubaine

«Le fait de fixer la condition de revenus à 114.000 euros maximum n’exclura que 5% des ménages du système de primes.»

Philippe Defeyt

Economiste et directeur de l’Institut pour un développement durable (IDD)

Il est vrai que de nombreux ménages wallons ont, jusqu’ici, bénéficié de primes sans en avoir financièrement besoin. Mais en l’absence d’analyses récentes sur le sujet, il n’est pas possible d’évaluer l’ampleur du phénomène. «Le fait de fixer la condition de revenus à 114.000 euros maximum n’exclura que 5% des ménages du système de primes, critique l’économiste Philippe Defeyt, directeur de l’Institut pour un développement durable (IDD). C’est une sélectivité toute relative. S’il est question d’utiliser ce système de primes, il ne faut pas monter trop haut dans les niveaux de revenus.»

De son côté, le gouvernement précise que les primes wallonnes restent plus généreuses qu’en Flandre et que dans la capitale, où le régime Renolution est suspendu, faute de financement et surtout de gouvernement. La Wallonie, elle, promet par ailleurs de s’atteler à la longueur des délais de traitement des dossiers de primes, qui peuvent atteindre deux ans.

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