Carte blanche

L’opération de police à Bruxelles-Midi: ou comment faire le lit de l’extrême droite pour 2024

Une carte blanche de Manuel Abramowicz, rédacteur en chef de RésistanceS, le webjournal de l’Observatoire belge de l’extrême droite.  

Samedi matin dernier, la gare de Bruxelles-Midi a été encerclée, puis massivement envahie par des agents de la police fédérale et de la zone de police Bruxelles-Midi (Anderlecht, Forest et Saint-Gilles). Dans le cadre d’une opération coup de poing contre les auteurs désignés d’une situation de violence qui s’y est installée depuis un certain moment. Plus de cinquante sans-abris, voleurs, consommateurs de stupéfiants et sans-papiers ont été arrêtés. La ministre fédérale de l’Intérieur, Annelies Verlinden (CD&V), est descendue sur les lieux de l’opération. Les bourgmestres PS d’Anderlecht, Fabrice Cumps, et de Saint-Gilles, Jean Spinette, sont également arrivés en appui.

Les médias avaient également fait le déplacement, certainement prévenus par les chargés de communication des politiciens initiateurs de la descente policière à Bruxelles-Midi. Résultat : la couverture médiatique a été maximale. C’était, sans doute, l’objectif principal de ce coup de poing afin de « rassurer » l’opinion publique en démontrant la prise en considération des problèmes de sécurité.

Bruxelles-Midi: la meute raciste part en chasse

Cette opération politico-policière s’est soldée, selon l’avis de ses multiples organisateurs, par une réussite totale. L’agissement des forces de l’ordre aurait été exemplaire. L’enjeu de cette action : un investissement répressif dans le but de retombées bénéfiques pour la ministre fédérale CD&V et les deux bourgmestres PS, lors des prochaines élections.

Pour mesurer l’impact de ce « nettoyage » de la gare auprès de citoyens actifs sur le Net, RésistanceS, le webjournal de l’Observatoire belge de l’extrême droite, a recueilli des réactions sur les réseaux sociaux de médias mainstream. Ce sont surtout des internautes exprimant un racisme virulent et des sympathies affichées pour la droite musclée qui se sont en majorité exprimés. Parmi eux, ont été repérés par RésistanceS, des trolls d’extrême droite, bien connus du monde digital. Ils ont ouvert la chasse à la meute raciste et poujadiste qui s’incruste dans les cafés du commerce et dans l’espace digital. Les propos de ces excités se singularisent par des accents très extrémistes et populistes. Des incitations à la haine raciste sont ainsi diffusées sur la place publique digitale. Sans aucune modération ni réaction des responsables des pages des médias concernés.

Sur les réseaux sociaux, l’omniprésence de l’extrême droite

Les termes qui ont été utilisés déterminent clairement l’orientation idéologique de leurs auteurs : « gaucholaxistes aux manettes », « islamo-gauchistes immigrationnistes », « juges bobos laxistes ! », « Seule solution : expulsion ! », « Nos politicards bien-pensants et bienveillants d’une certaine gauche », « Plus de 40 ans de laxisme », « La gestion de ces clowns », « Quartiers dépeuplés des blancs », « Il faut nettoyer la ville entière, le pays entier », « Les lois sont faites pour protéger les racailles et non pour protéger les honnêtes citoyens », « Il faudrait des rafles régulières », « Il est temps de mettre de l’ordre »… Des propos haineux dignes du public des meetings de l’extrême droite. Ce n’est pas pour rien dès lors que des partis aujourd’hui encore groupusculaires populistes de droite se sont joints à cette meute pour l’appeler à « Votez en 2024 » à l’extrême droite.

Qui va profiter de ce « nettoyage » ? L’extrême droite !

Que pouvons-nous conclure de cette observation des réactions sur Internet à propos de l’opération policière et politique à la gare Bruxelles-Midi ? Les commentaires de lecteurs de pages des médias consultés vont dans leur immense majorité toujours dans le même sens :

  • Ils considèrent cette opération de police comme une opération de communication.
  • Qui ne donnera aucun résultat.
  • Le problème de l’insécurité subsistera.
  • Les donneurs d’ordre de l’opération en question, la ministre fédérale CD&V de l’Intérieur et les deux bourgmestres PS, présents sur place pour superviser le « nettoyage » de la gare, y étaient uniquement dans le cadre des élections de 2024 à venir.
  • Un déchainement de propos racistes s’est ouvert sur le Net à cette occasion.
  • L’extrême droite en embuscade est sortie de sa tanière pour y diffuser sa propagande en vue de récupérer électoralement les auteurs mécontents et protestataires.

Si les actuels partis du gouvernement espèrent éviter, avec ce type de sortie médiatique, l’exode de leurs électeurs séduits par les sirènes extrémistes du Vlaams Belang en Flandre et à Bruxelles, vers les pseudopodes de feu le FN belge en Wallonie, il semble que cette tactique politicienne ne soit pas vraiment efficace. Madame Verlinden, ainsi que messieurs Spinette et Cumps doivent se remémorer un vieil adage diffusé, il y a trois décennies déjà, lors de l’ascension lepéniste en France : l’électeur préfère toujours l’original à la copie. Dès lors, ce n’est pas leur campagne électorale qu’ils font, mais celle de l’extrême droite.

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