A Bruxelles, les dépenses dans la mobilité pèsent très lourd sur le budget

Bruxelles, la mauvaise élève bientôt en faillite? « Le train des dépenses est en marche »

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

La dette de la Région Bruxelles-Capitale s’accroit d’année en année, malgré l’appui du fédéral, de la Flandre et de la Wallonie. Le gouvernement bruxellois ne regarderait pas à la dépense, loin de gérer les finances en bon père de famille. De quoi mener la région à la faillite ?

C’est le 15 octobre dernier que le budget bruxellois pour 2024 est (enfin) dévoilé. À quelques heures seulement de la deadline fixée par la Commission européenne, qui n’attendait plus que Bruxelles pour examiner les prévisions budgétaires de la Belgique. Un budget bruxellois qu’on dit négocié dans la douleur, aussi le dernier à être mis sur les rails. Mais si le budget de la Région Bruxelles-Capitale a été remis en temps et en heure dans les mains européennes, il n’est pas réjouissant pour autant.

L’année prochaine, le déficit sera réduit de 150 millions d’euros par rapport à 2023. Plusieurs efforts ont été consentis: baisse des salaires (de 3%), des frais de fonctionnement (de 5%) et des investissements (de 10%). Pour autant, le manque à gagner – 950 millions d’euros – reste énorme, et montre le déséquilibre entre des dépenses toujours aussi gourmandes et des recettes insuffisantes. « Bruxelles n’est pas en faillite », assure le ministre des Finances Sven Gatz (Open VLD), qui reconnait néanmoins que le budget n’est pas idéal. « Le train des dépenses est en marche, j’essaie de le freiner mais il n’est pas possible de l’arrêter pour le moment ».

Pourquoi le budget bruxellois est « le pire du pays »

Le gouvernement bruxellois finance la Stib via un fonds d’investissement européen

« Le budget bruxellois est le pire du pays, le seul qui ne redresse pas la barre malgré les mesures prises », commente Maxime Fontaine, chercheur en finances publiques à l’ULB. « Le déficit de la région s’élève à 25% : c’est quasiment 5 fois plus que celui de la Belgique ! Chaque année, un quart des dépenses à Bruxelles ne sont pas financées par le budget ».

En particulier, les investissements dans la mobilité (tunnels, trams, nouveau métro) pèseraient lourd sur les finances. Ce sont des investissements stratégiques décidés lors de la précédente législature, à hauteur de 500 millions d’euros par an. « Ils étaient intéressants au départ, car le taux d’emprunt était de 0%, développe le chercheur. Mais aujourd’hui on continue à financer ces projets, alors que les taux n’en finissent plus d’augmenter ». Ces investissements stratégiques ne se retrouvent pas dans le budget.

« La Cour des Comptes refuse de lire et de certifier les budgets parce qu’ils ne tiennent pas la route »

Maxime Fontaine, chercheur en finances publiques à l’ULB

La situation se dégrade à un tel point à Bruxelles que la Cour des Comptes – qui contrôle les comptes des gouvernements – s’abstient depuis 3 ans de donner un avis sur la conformité des finances régionales bruxelloises. « En gros, résume Maxime Fontaine, la Cour refuse de lire et de certifier les budgets ne tiennent pas la route ».

« Des musées, des trams, des métros… On ne peut pas tout faire à Bruxelles! »

Le ministre des Finances Sven Gatz (Open Vld) © belga

Conscient de la mauvaise santé économique de Bruxelles, le ministre des Finances Sven Gatz (Open VLD) visait initialement 600 millions d’euros d’économie pour 2024. Un chiffre ambitieux, au vu des 150 millions d’euros finalement prévus pour le futur budget. « Il y a eu des frictions au moment de la négociation du budget », reconnait Sven Gatz.

« On devra inévitablement faire des économies, la prochaine législature sera difficile »

Le ministre des Finances Sven Gatz (Open Vld)

« C’est là tout le problème à Bruxelles, abonde Maxime Fontaine. On veut tout faire : des musées, des piscines, une nouvelle ligne de métro, des trams… Je ne m’oppose pas aux projets en tant que tels, mais la Région ne peut pas tout financer ! ». De son côté, le ministre des Finances est conscient qu’il faut faire plus de choix, mais refuse de désinvestir sur des matières comme le logement ou la mobilité. « Ce sont des aspects cruciaux pour les Bruxellois et les navetteurs. Et puis, Bruxelles est la capitale de la Belgique et de l’Europe. Son statut de ville internationale l’oblige encore plus à réussir ses politiques en la matière ».

Le libéral flamand, qui vit sa dernière année en tant que ministre bruxellois, donne des pistes à son successeur, « qui aura du pain sur la planche ». Sven Gatz prévient que 2024 sera la dernière année avec des investissements stratégiques hors-budget. « On devra inévitablement faire des économies, ce sera une législature difficile ».      

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